L'hopital d'Eréthia

Elle flottait, elle flottait d'un espace vide et sans couleur. Elle ne ressentait rien de plus que la lourdeur de son corps. Cependant, elle entendait un bip bip incessant et la voix des médecins. Tout comme la voix hideuse de sa mère.

Le coma était une drôle de chose qui différait selon les personnes. Certains n'entendaient rien tandis que d'autres, comme elle, pouvaient entendre le monde extérieur. Elle entendait clairement les gens discuter autour d'elle et lui avait fait comprendre sa situation merdique.

Elle voulait se réveiller, elle voulait savoir ce qu'il c'était passé pour finir ainsi. Elle avait la haine, la haine d'être coincé dans cet espace vide et sans couleur. Elle hurla, encore et encore. Elle força son corps à bouger, son esprit, à revenir parmi les vivants.

Elle y était presque, elle le sentait. Elle sentait le picotement dans le bout de ses doigts, elle sentait le poids de la couverture sur son corps et la fermeté du matelas sur son corps. Un air frais passa sur son visage et elle sentit la chaleur du soleil sur sa peau.

Ses paupières était lourdes pourtant elle se força à les ouvrirent. La lumière du soleil lui agressa les rétines, si bien qu'elle dut les refermer. Le bip bip s'affola et bientôt la porte de la chambre s'ouvrit à la volée.

Une horde d'infirmières venaient d'entrer dans la chambre, la faisant paniqué. Elle voulut se redresser mais un vertige la prit soudainement et une main la fit s'allonger.

- Comment vous sentez vous mademoiselle ?

- Dans les vapes. Combien de temps ?

Le médecin parut surpris par sa question si bien qu'il mit quelques secondes avant d'ouvrir la bouche pour répondre :

- Un an et quelques mois. Les premiers temps seront durs, mais les scientifiques de votre mère ont réalisé une prouesse technique hors normes pour vous permettre de vivre normalement.

- Comment ça ?

Quelque chose n'allait pas, son cœur se mit à battre follement dans sa cage thoracique. Son souffle se coinça dans sa gorge. Elle regardait le médecin avec une peur certaine.

- Vous avez eu un grave accident, en tombant de votre cheval vous vous êtes brisé la jambe. Nous avons dû l'amputer. Je suis désolé Mademoiselle.

Son cœur s'arrêta de battre, elle vira la couverture avec rage. Ses yeux se brouillèrent et les larmes dévalèrent sur son visage. Elle ne pouvait y croire, elle regardait avec horreur sa jambe fait désormais de métal. Soudain, les souvenirs remontèrent à la surface, elle se souvient. De tout.

Elle se souvient du ravin, de l'éboulement. Du hennissement de douleur de son cheval, de la douleur de la chute. Des hurlements de sa partenaire. De l'hélicoptère, des pompiers. De tout.

- Mon cheval, est-ce qu'il...

Les mots se coincèrent dans sa gorge, elle n'osait pas poser la question. Elle avait peur de la réponse, pourtant le médecin lui confirma sa peur. Un hurlement de rage sortit de sa gorge, elle hurla sa peine et sa douleur. Ce jour-là, elle avait perdu bien plus qu'une jambe. Elle avait perdu son ami, son confident, son âme sœur.

Elle perdit la notion du temps, elle était devenue muette. S'enfonçant dans les ténèbres de la mélancolie. Peu de personne l'aurait comprise et de toute façon, elle ne voulait pas qu'on la comprenne. Pour beaucoup, ce n'était qu'un animal, un gagne-pain, mais pas pour elle. Non, il avait toujours été là pour elle. Et elle l'avait tué, pour une stupide compétition. Elle était un monstre.

Remonter la pente fut long et douloureux. La rééducation fut simple comparée au dégât mental qu'avait créer sa chute. Sa jambe de métal était directement reliée à son cerveau et remplacée merveilleusement bien son ancienne jambe. Seule une petite boiterie montrait son absence de vie.

Beaucoup seraient contents, mais pas elle. Non la douleur de la perte était bien trop grande et le remord trop présent pour qu'elle profite de cette seconde chance. Elle sortit de l'hôpital, six mois plus tard. Elle avait encore du chemin à parcourir avant de vivre de nouveau pleinement.

Elle abandonna sa vie de cavalière pro et démangea dans un coin paumé. Loin de tout, reprenant petit à petit goût au monde extérieur. La douleur dans son cœur finit par s'estomper sans pour autant disparaître, il ferait toujours partie d'elle.