Box de Horus

Pré-débourrage.

Cela faisait quelques jours que j’avais acquis un foal de 6 mois tout juste sevré. Un magnifique mâle isabelle nommé Horus qui avait déjà de belles allures et une grâce naturelle assez impressionnante pour son âge. Né de fantastiques poneys de sport, une superbe carrière sportive l’attendait. Mais pour l’heure, je le laissais tranquillement s’habituer aux installations et ses nouveaux congénères avant de venir l’embêter pour son pré-débourrage.

Pourtant, lui qui d’habitude était toujours de bonne humeur à gambader dans son pré, était cette fois-ci introuvable. Il était très tôt, il faisait à peine jour, peut-être dormait-il encore ? Je m’introduis dans le paddock à sa recherche, examinant au passage si les autres allaient bien. Leur abreuvoir était propre et rempli, mais je remarquai que le foin avait grandement diminué en quantité par rapport à d’habitude. Les autres chevaux se portaient visiblement bien, un était couché, en train de se reposer, les autres brouter tranquillement à ses côtés, surveillant par la même occasion les alentours à tour de rôle. Pourtant, je ne remarquais pas Horus, ce qui me semblait de plus en plus inquiétant.

J’entrai dans l’abri et vit enfin le poulain, mais je ne fus pas rassuré pour autant, bien au contraire. Le petit était en train de se rouler dans les copeaux, puis se relever, gratter le sol, se retournait pour examiner ses flancs, et recommençait de plus belle à se rouler avec violence. Prise de panique, je couru vers la sellerie récupérer un petit licol. Sur la route,  je sortis mon téléphone, essayant de composer le numéro d’Aqua, notre vétérinaire, en dépit de mes mains qui tremblaient frénétiquement. Je retournais auprès du poulain qui transpirait beaucoup. Il avait vraiment mal, s’était évident. Je m’approchais de lui en prenant garde de ne pas recevoir un coup de sabot et lui mis le licol. Lui aussi était visiblement en panique, il était tout tremblant et la peur se lisait dans ses yeux.

S - « Je suis désolée bonhomme, j’aurais voulu faire ça plus progressivement, mais je n’ai pas le choix. »

Je fis de mon mieux pour tenter de le relever, mais il tenait à peine sur ses jambes. Marcher, il fallait qu’il marche, c’était bien ce qu’on devait faire dans ces cas là. Mais Horus refusait. Ma gorge était serrée, les larmes prêtes à couler à flot, j’étais stressée, je me sentais impuissante, je ne savais pas comment aider mon poulain. J’exerçais de la pression sur la longe, mais rien n’y faisait, il ne bougeait pas. Je finis par me mettre derrière lui, essayant de le pousser aux fesses. Enfin, il fit un pas en avant, puis un autre. Je me remis devant lui, essayant de le faire avancer. Petit à petit, je réussi à l’amener dans l’écurie pour le rentrer dans son box, mais la route me parut interminable.

Aq - « Je suis là Selena, calme toi, je vais m’occuper de lui, je te le promet. »

Ses paroles ne pouvaient pas être plus réconfortantes. Maintenant qu’elle était là, toute la pression se relâcha d’un coup et je ne pus retenir mes larmes. Elle posa sa main sur mon épaule amicalement et se concentra sur Horus. Elle examina d’abord son état général puis l’ausculta. Elle prit sa fréquence cardiaque et respiratoire, puis écouta son ventre en m’expliquant ce qu’elle faisait. Son pouls était rapide, tout comme sa respiration, c’était signe d’une intense douleur. Il transpirait beaucoup et était en état de choc, il fallait agir vite. De plus, aucun bruit ne provenait de son ventre, il y avait un bouchon dans son transit digestif.

Elle m’expliqua que d’habitude, dans ce genre de cas, elle pratiquait une palpation rectale pour pouvoir localiser le bouchon et vérifier qu’il n’y a pas d’autre souci, Horus étant poulain,il allait falloir oublier cette option. Elle palpa donc doucement le ventre du poulain, plus particulièrement su côté gauche. Le petit n’avait pas l’habitude d’être manipulé, c’était la première fois, mais il n’avait pas la force de se débattre.

Aq - « Bon, c’est bien ce que je pensais, stase de la courbure pelvienne. À cet endroit, son intestin fait quasiment un demi tour, c’est ici qu’est localiser le bouchon, c’est une cause plutôt fréquente de colique, mais heureusement ce n’est pas si grave que ça. »

Je lui expliquai alors qu’en effet, il avait dû ingérer une grande quantité de foin sans penser à s’hydrater correctement, et elle confirma mes dires. Elle administra alors des antalgiques pour le soulager de la douleur, ainsi que de la paraffine pour pouvoir évacuer le bouchon. Il fallait maintenant que je fasse marcher le petit. J’exerçais à nouveau une pression de longe sur son licol, et cette fois, il se mit doucement à avancer. Je le fis avancer dans l’écurie, puis je lui fis faire le tour du domaine plusieurs fois. Au fur et à mesure que le traitement agissait, il adoptait une démarche plus assuré. Aqua m’accompagnait, proposant régulièrement de l’eau au petit pour le réhydrater.

J’eus l’impression de la faire marcher des heures et des heures jusqu’à ce qu’enfin un crottin apparu. Le soulagement fut immense. La vétérinaire ausculta à nouveau le ventre de Horus et cette fois, elle entendait des bruits provenant de son système digestif, preuve que son transit s’était remis en route. Tout allait bien se passer pour lui à présent. Elle me donna tout de même quelques précautions pour éviter qu’il ne récidive : je devais désormais mettre le foin dans des sacs à foin, en effet, même si toujours disponible à volonté, cela permettait que les chevaux prennent de plus petites quantités à chaque bouché, et également de lui mettre de l’huile isio4 dans ses futures rations. En plus d’être un excellent apport énergétique pour les chevaux, cela permettrait également de « lubrifier » tout le système digestif afin de faciliter la progression des aliments dans celui-ci.

Rien qu’à observer la tête du petit, on voyait qu’il allait beaucoup mieux. Plus détendu, il retrouvait ses allures naturellement gracieuse et sa joie de vivre. Aqua s’éloigna pour retourner à son cabinet, et moi je ramenai le petit dans son box pour m’occuper de lui. Maintenant qu’il marchait bien en longe, j’allais en profiter pour terminer son pré-débourrage. Je le caressais partout, même sur les jambes, mais Horus ne bougea pas cette fois-ci. Visiblement, se faire manipuler par Aqua avait suffi pour qu’il accepte sagement. Je pris alors des brosses et je nettoyai tendrement son petit corps, d’abord avec une étrille en plastique, puis un bouchon et pour finir la brosse douce. Très affectueux, il venait se coller dans mes jambes, me faisant comprendre qu’il appréciait vraiment beaucoup ce genre de moment. Cela sonnait comme un massage à ses yeux, ce qui lui plaisait beaucoup. Encolure, épaule, dos, ventre, croupe, membres, il n’était dérangé par aucun de mes mouvements.

J’avais l’impression, dans son regard, que c’était sa façon de me remercier de l’avoir aider. Une petite complicité s’était rapidement installé entre nous, ce que j’avais bien l’intention de développer au fur et à mesure. Je finis par prendre mon cure-pied et de lui demander chacun de ses petits pieds. D’abord hésitant, il finit par s’exécuter sans broncher. Prenant garde de ne pas toucher sa fourchette, je curai délicatement chacun de ses sabots, tout en le félicitant de nombreuses caresses, et grattage de garrot. Pour finir, je rempli un seau d’eau tiède et pris une éponge. Je la passai alors doucement sur son encolure pour nettoyer son corps et le débarrasser de toute la transpiration qu’il avait émis durant son épisode de colique. Une fois terminé, je le laissais se reposer et récupérer de ses émotions dans son box. Je le réintégrerais progressivement dans le paddock une fois sûre qu’il était de nouveau en pleine forme.