— captain.

— I am the master of my fate;
I am the captain of my soul.

Ce jour-là, j'allais poser mes fesses sur le dos de Captain pour la première fois. Cette première fois était d'autant plus symbolique que c'était ma séance d'essai, celle qui me permettrait de me décider ; allai-je prendre Captain en demi-pension, oui ou non ? Serai-je à la hauteur ? C'était ma plus grande crainte. Je n'étais pas une cavalière exceptionnellement talentueuse et je ne savais pas si je serai en mesure d'aider Captain à progresser, lui qui était si vert dans son travail. Mais c'était un défi à relever et je trouvais ça intéressant. Il ne s'agissait simplement pas de briser ou planter Captain. Il fallait se contenter de peu et y aller progressivement, j'étais persuadée que là était la clé de notre réussite.
Notre première séance serait, suivant la logique des choses, une séance de dressage. On m'avait dit qu'il était délicat puisque très peu inexpérimenté et qu'il faudrait revoir toutes les bases. C'était donc équipé en conséquence que nous étions entrés dans le manège ;  je lui avais posé des bandes de travail mais sans autre équipement. Moi, j'avais pris mon stick et mis mes éperons. En premier lieu, je lui laissa le temps de marcher un peu dans le manège; sentir les différentes odeurs des chevaux qui étaient déjà passés. Quand il me sembla tout à fait serein, je me mis en selle légèrement en m'aidant d'un montoir pour ne pas trop tirer sur son dos. Je l'avais senti; à l'instant même où j'avais posé mes fesses sur la selle il s'était raidi, comme s'il s'attendait à ce qu'il lui arrive la pire des choses. Restant dans mon optique de tranquillité, je lui mis les rênes longues et le laissa marcher dans le calme, ne me servant que de mon assiette pour entretenir le pas. Je lui laissais le choix d'aller où il voulait, et ce fut plutôt efficace puisqu'au bout de quelques longues minutes, je sentis qu'il se détendit légèrement. Il était sûrement trop habitué à ce que ces quelques séances montées soient faites dans la précipitation. Mon but à moi, c'était que nous prenions plaisir tous les deux, et comme je n'avais aucun objectif qui me demandait de me presser, je n'avais plus qu'à prendre mon temps pour que Captain et moi puissions travailler dans le calme, la sérénité et pourquoi pas, en osmose totale.
Mais bien entendu, je ne comptais pas marcher rênes longues pendant toute la séance. On m'avait dit qu'il était encore vert dans son travail même en plat, je n'allais pas lui demander beaucoup de chose tout de suite. Tout d'abord, il fallait s'assurer que je sois aux commandes ; arrêts et figures de manège simples, tel que des voltes, des serpentines, afin de vérifier qu'il réponde à mes aides. Et ce fut le cas. Certes, il manquait encore de réactivité, comme s'il lui fallait quelques secondes pour comprendre ce que chacun de mes ordres signifiait, mais c'était tout à fait acceptable. Je me contentais d'une détente tout à fait basique. Mais je l'arrêta au bout d'un moment, lui laissa les rênes longues sans pour autant lui demander d'avancer. J'allais faire quelques flexions de nuque, pour travailler la décontraction du bai. Je tirais donc sur ma rêne gauche, vers moi, pour lui demander de venir tourner le bout du nez jusqu'à moi. J'y allais progressivement, je lui demandais peu et relâchais la pression dès que je le sentais venir un peu. Il n'aimait pas trop, il manquait clairement de réactivité suite à mes demandes, mais je perservais et le laissa dès que j'obtins une flexion de nuque minime, des deux côtés.
Vint ensuite la détente au trot. Il était fort confortable au trot, et c'était très agréable. Les éperons tatant ses flancs à chaque foulée, je lui demandais de venir engager les postérieurs. Il n'avait pas encore le déclic de tendre le dos et céder dans sa nuque, mais je le sentais dans une bonne énergie et c'était déjà bien satisfaisant. Là encore, je travailla sur des choses basiques : arrêts, transitions montantes et descendantes, transitions dans l'allure assez minimes, figures de manège simples. Ce que je souhaitais obtenir de lui, tout d'abord, c'était d'être disponible aux deux premières allures, concentré, attentif. C'était le cas tant que j'enchaînais les exercices; je voyais qu'il se lassait vite, il fallait que ça bouge, sans quoi il plaquait les oreilles en arrière et se faisait bien plus mou. Rebelotte, je l'arrêtas et lui demanda à nouveau des flexions de nuque afin de voir si l'exercice commençait à rentrer. Il témoignait déjà moins de résistance, semblant comprendre la facilité de l'exercice mais avant encore cet air de gamin effronté qui ne veut pas écouter les adultes simplement pour les embêter.
Je décidais de passer au travail avant de galoper. Ce fut donc après quelques minutes rênes longues, que je remonta sur mes rênes pour commencer un travail sur une volte. Le but était l'incurvation, réelle. Je voulais l'avoir rond, pas simplement le pli à l'intérieur. Il fallait constamment faire pression avec ma jambe intérieure, mais il avait tendance à sortir trop les hanches du cerlces lorsque je lui demandais de s'enrouler autour de ma jambe, et ma jambe isolée faisait son devoir correctement, rappelant à l'ordre l'étalon sans arrêt. Tandis que ma main intérieure faisait en sorte d'avoir le pli à l'intérieur, je jouais des des doigts sur cette même rêne, tout en bloquant de ma rêne extérieure les hanches pour ne pas qu'elles dérapent à l'extérieur. Postérieurs engagés, dos qui se tend, il mâchonnait son mors et vient se faire plus rond, la nuque un peu plus basse. C'était un fort bon travail, même si ça avait demandé pas mal de batailles de mon côté. Je réitéra bien évidement le travail à l'autre main. Je le sentais se déconcentrer un peu, nous travaillions depuis bien trois quart d'heure et je savais que certains chevaux avaient largement eu leur dose de travail après autant de temps. Je nous offris donc, enfin, un passage au galop. Quelques petites transitions pour vérifier si les aides du départ au galop étaient connues, c'était le cas, et je le laissais galoper sur un grand cercle, sans lui demander pour le moment d'incurvation ou un bon équilibre. Il semblait d'ailleurs plutôt content d'être tranquille, sans que je ne veuille toucher à sa bouche ou à son attitude, et donna même un coup de dos qui me fit plus rire qu'autre chose.
La séance s'était donc bien passée. Assez courte pour ne pas qu'il ne s'essouffle trop, suffisament chargée pour le faire travailler et lui faire reprendre doucement les bases de dressage. Il aurait de quoi réfléchir après notre séance, et des connaissances à ressortir pour notre prochaine fois.
J'avais fini la séance sur une petite balade au pas dans le Haras avant de ramener l'étalon bai à son boxe, lui offrant tous les soins qu'il méritait.

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