Balade automnale
“Juste besoin d'une balade dans un bel endroit, accompagné ou non, pour me vider la tête..”
Un nouveau jour se lève sur le domaine du Haras de Pado, les installations se dévoilant petit à petit à travers la brume légère du matin. Comme chaque matin, on peut apercevoir les cavaliers les plus déterminés à affronter le froid matinal, couverts jusqu'aux oreilles, fermement armé d'une paire de gants et d'un licol, se dépêchant de récupérer leur monture aux paddocks. Il est amusant de voir comme c'est souvent dans les situations où l'homme est le plus pressé que l'animal décide de n'en faire qu'à sa tête.
Owen, au chaud dans son studio avec une tasse de café surfe sur son portable. Depuis qu'il est levé, il recherche activement les horaires de chasse dans la région mais c'est à ne rien y comprendre. On trouve de tout et n'importe quoi. Il ferme finalement le laptop d'un geste agacé, décidant d'aller vérifier par lui-même, après tout, les chemins aux alentours du domaine sont sans aucun doute privés et donc un risque faible voire nul de chasse. Enfilant son blouson, Owen ne tarde pas à rejoindre les écuries, ayant hâte de retrouver son Ozaro.
Arrivé aux écuries, Owen rejoint immédiatement le beau bai qui semble déjà impatient de sortir, accueillant notre franco-américain par un bref hennissement. Une petite gratouille sur le chanfrein en guise de bonjour puis Owen décida d'entrer pour faire le tour de l'étalon après avoir enlevé sa polaire, s'assurant qu'il ne s'était pas blessé pendant la nuit, un accident peut tellement vite arriver... Pas de bobo à l'horizon. Rassuré qu'Ozaro n'est rien, Owen ôta son sac à dos dans lequel il avait regroupé de quoi faire un minimum de pansage ainsi qu'une bouteille d'eau et un sachet de chips de pommes séchées.
Owen attrapa l'étrille qu'il passa rapidement sur les parties charnues du bai avant de passer un coup de bouchon sur l'ensemble du corps et de l'encolure. Pas besoin d'un pansage digne d'un Grand Prix mais un petit coup de brosse ne fait jamais de mal ! Et puis ça ne pouvait que renforcer ses liens avec le beau bai. Tandis qu'Owen lui curer maintenant les sabots, Ozaro, fidèle à lui-même, posa son attention sur le sac à dos qui trônait devant sa porte. Il mâchouilla dans un premier temps les bretelles avant de fouiller à l'intérieur, il en tira le sachet de pommes séchées, malheureusement pour lui bien fermé. Il continua alors ses recherches, tombant sur un vieux gant. Il l'attrapa entre ses deux et se mit à secouer sa tête de haut en bas, visiblement très fier de sa trouvaille. Owen souffla en reposant le quatrième pied de l'étalon, se demandant ce qui pouvait autant l'exciter.
- Oh... ça fait des mois que je le cherche...
Mi-gêné mi-amusé, il récupéra son gant qu'il rangea dans sa poche. Owen réajusta la polaire sur le dos d'Ozaro avant de lui enfiler un licol.
- On peut y aller.
Sur les quelques centaines de mètres qui séparent les écuries des premiers chemins de balades, Ozaro s'est comporté de manière exemplaire : respectueux de son meneur malgré sa curiosité grandissante à l'approche des chemins de balades. Owen le félicita chaleureusement avant de s'arrêter à un croisement de chemins, observant les panneaux d'indication. Il opta pour le sentier bleu, le plus court, un peu plus d'une heure à pied. Il savait qu'Ozaro pouvait se montrer un peu sur l'œil en extérieur donc autant ne pas tenter le diable surtout pour une première sortie.
Le couple pris donc la direction du sentier bleu, s'enfonçant maintenant dans la partie ouest de la forêt voisine. Les températures sont fraîches mais agréables, les rayons du soleil passent à travers les branches des arbres, tous ayant perdus la quasi-totalité de leurs feuillages qui ornent maintenant le sol. Owen esquisse un sourire en observant l'attitude d'Ozaro, curieux du bruit des craquements des feuilles sous ses pieds. L'étalon décida de s'arrêter, grattant d'abord le sol timidement avec l'un de ses sabots avant d'y mettre plus d'énergie. Il attrape finalement une feuille, la mâchouille longuement avant de relever son regard vers Owen, la feuille dépassant à moitié de sa bouche ce qui fit sourire Owen.
Le couple arpenta la forêt durant une bonne demi-heure, s'arrêtant régulièrement afin de satisfaire la curiosité de l'étalon ou les pieds de son meneur. Trouvant un point d'eau, Owen laissa l'étalon étancher sa soif tout en observant autour de lui : les bois étaient vraiment magnifiques, presque pas de traces de passages humains, quel plaisir de voir un endroit épargné par la pollution sauvage des hommes. Des sentiers bien tracés, aucune chance de se perdre, même pour les moins débrouillards. Et une nature sauvegardée.
Sur l'avant dernière grande boucle du sentier, Owen s'autorisa à relâcher un peu de longe à Ozaro qui pris plaisir à étendre son dos et son encolure, s'étirant souplement en marchant quand tout à coup, un bruit le fit se raidir instantanément, créant une tension dans la longe. Owen s'arrêta, n'ayant rien entendu mais au vu du comportement de l'étalon, il comprit que quelque chose n'allait pas. Il posa une main sur l'encolure du Selle Français, on pouvait sentir sa respiration saccadée et son pouls s'accélérer. Il devenait nerveux, commençant à hocher la tête de droite à gauche.
- Ça va aller mon grand, doucement...
Owen rassura l'étalon avec un timbre de voix calme et doux avant de tourner la tête vers le bout de chemin devant eux : une biche sortie de derrière un groupe d'arbustes, prudemment suivi par un jeune faon de quelques mois. Les brins d'herbes se faisaient rares à cette saison, ils cherchaient sûrement des baies ou restants de feuillages à grignoter. Les deux cervidés grattèrent doucement le bord du sentier à la recherche de nourriture. Cet instant dura une poignée de secondes mais quel instant magnifique. La mère et son petit prirent peur en entendant un puissant ronflement d'Ozaro qui lui ne semblait guère rassuré. Owen sorti quelques chips de pommes de sa poche et les tandis à Ozaro afin de l'apaiser un peu. L'étalon accepta les gourmandises mais poussa un énième ronflement avant d'accepter de reprendre la route.
Bientôt, la fin du sentier approcha et le couple reprit la route du domaine. Cette petite balade en main fût plutôt agréable. Owen apprécié grandement le respect qu'avait Ozaro pour son meneur malgré sa taille impressionnante. Certes, il l'avait bousculé deux-trois fois car une touffe d'herbe dodue ou une feuille morte gigantesque sont plus intéressantes que d'écouter Owen mais dans l'ensemble, ce cheval était une crème. Cela allait vraiment être un plaisir de travailler avec lui.
En ultime récompense, Owen décida de s'arrêter près d'un paddock vide, s'adossant à la lice en bois afin de laisser brouter Ozaro. Le beau bai arracha avec énergie les quelques brins d'herbes se trouvant sur son passage tandis qu'Owen s'imaginer déjà leur future séance. Sûrement une séance montée ou alors en carrière mais en liberté, il ne savait pas encore. Il mourrait d'envie de tenter un cross mais il ne connaissait pas encore le caractère monté de l'étalon pour s'aventurer sur un terrain de complet. Il opta donc pour une séance de plat en tant que prochaine séance, il lui tardait de voir les capacités de ce splendide cheval monté.
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