box de Duchesse

L’arrivée au domaine.

Un bon coup de balai, de désinfectant, et le box serait comme neuf. Je pris une petite brosse pour frotter les planches de bois du box, puis je rinçais le tout à l’eau. Je nettoyais également la mangeoire et l’abreuvoir de fond en comble. Il fallait que ça brille ! Pendant que le box séché, j’allais m’occuper de retirer les crottins des paddocks, puis je revins finalement pour déposer un sac et demi de copeaux de lin dans le box. Cela faisait environ une heure que je m’appliquai à rendre impeccable de box qui serait occupé momentanément pour une jeune jument qu’on nous avait confié le temps du débourrage et du début de son apprentissage. Elle s’appelait Duchesse et… C’était à peu près tout ce que je savais d’elle.

C’était moi qui allait m’en occuper et j’espérais ne pas tomber sur une immense jument de sport ultra nerveuse… Moi j’aimais surtout les chevaux ibériques destinés au dressage, comme ma belle Avalanche ou mon jeune Lightning. J’avais essayé de soutirer des informations à Luniwüen, car c’était maintenant elle la directrice du domaine, et donc elle qui s’était occupé de négocier ce contrat, mais elle n’avait rien voulu me dire, prétextant qu’elle n’en savait pas plus. Pourtant, je la connaissais, ce n’était pas ma cousine pour rien, et je savais pertinemment qu’elle mentait. Son petit sourire en coin l’avait trahi. Je croisais les doigts, et j’étais si impatiente que les minutes me paraissaient des heures.

J’entendis alors enfin le camion qui venait nous livrer la jument entrer sur le parking. Je me précipitais vers le chauffeur, mais Luni m’avait devancée. Elle était déjà en train de régler les derniers détails administratifs, puis l’homme ouvrit finalement le porte du camion. Je pus alors apercevoir derrière les panneaux du camion une jument visiblement isabelle. J’entrai à l’intérieur pour m’approcher de la jument qui hennit bruyamment, tapant du pied contre les parois. Elle avait l’air très stressée alors je l’appelais pas son nom en lui disant des mots doux pour essayer de l’apaiser. Je décrochai les panneaux et je pus enfin observer la jument.

C’était clairement une ibérique, bien que plus petite qu’Avalanche, et elle était couverte de sueur. Elle avait dû beaucoup paniquer pendant le transport. Elle me fixa avec ses yeux tout écarquillés, tremblante de peur. Je détachai la longe, l’incitant à me suivre gentiment. Elle bondit hors du camion, m’emmenant avec elle mais elle s’arrêta dès que je lui demandai, faisant presque un demi-tour sur les épaules. Elle était toute redressée, ses oreilles tournaient dans tous les sens, ses naseaux étaient très dilatés. Elle respirait assez fort et regardait à droite, puis à gauche et sursautait au moindre bruit. Je la trouvais vraiment magnifique, mais il y avait bien plus important à faire que de la regarder. Je la caressais tendrement, toujours en lui parlant d’une voix douce, puis je la fis marcher tranquillement vers l’écurie.

Je lui fis entrer dans le bâtiment, puis je l’attachai à une aire de pansage pour que je puisse m’occuper d’elle afin qu’elle se détende. Je commençais par la caresser doucement sur tout le corps, vérifiant au passage qu’elle ne s’était pas blessée durant le transport. Elle avait juste une petite plaie au niveau d’un postérieur, mais rien de très grave. Duchesse se laissait caresser sans protester, au contraire, elle paraissait apprécier et se calmer un peu. J’allumais alors le jet de la douche, ce qui la fit sursauter. Je réglai la température sur de l’eau tiède puis je commençai à approcher le jet d’un de ses postérieurs. Elle le releva, un peu surprise, mais le reposa aussitôt, me laissant ainsi la doucher. Je nettoyai tout d’abord sa plaie puis je mouillais ses jambes, antérieurs y compris. Je remontais le long de son passage de sangle, puis je douchais ses épaules.

La jument n’avait pas cessé de regarder partout autour d’elle, mais se détendait peu à peu, alors je continuai en la félicitant. Je passai le jet d’eau sur son dos, puis sur la base de son encolure, histoire de rincer tous les endroits auxquels elle avait transpiré. Je fis de même de l’autre côté, y allant progressivement pour ne pas provoquer un choc thermique. Quand j’eus fini, je coupais la douche et pris un couteau de chaleur pour retirer l’excédent d’eau sur sa belle robe. « Alors, elle te plait ? » me demanda Luniwüen. Evidemment qu’elle me plaisait ! Je la remerciai de me l’avoir confiée puis je reportai toute mon attention sur Duchesse. Elle paraissait déjà plus calme, et avait retrouvé un rythme respiratoire plutôt normal. Je me permis alors de lui tendre quelques friandises qu’elle savoura doucement.

La jument, maintenant bien moins stressée, était plus douce dans ses mouvements, et me paraissait très délicate. Je la caressais encore, puis je pris une serviette pour sécher ses membres, puis je désinfectai sa petite plaie. Je curai ensuite ses pieds qu’elle me donna très sagement et je vis qu’elle avait les fourchettes pourries. Je cherchai parmi tous les produits de soin que nous avions pour prendre un petit flacon qui contenait du vinaigre de cidre ainsi que quelques gouttes d’huile essentielle de tea tree, un remède qui s’avérait très efficace. Je nettoyais parfaitement chacun de ses pieds pour qu’il ne reste aucune saleté puis je badigeonnai le remède sur ses fourchettes à l’aide d’un petit pinceau. Je félicitai une nouvelle fois Duchesse qui se montrait vraiment très sage.

Ses muscles n’étaient plus aussi tendus, et elle portait la tête plus basse, signe de relâchement. J’étais très fière d’elle, elle se comportait vraiment très bien. Je finis ce petite pansage par démêler ses beaux crins noirs puis je l’amenai marcher pour qu’elle découvre son nouvel environnement et cela lui permettrait de sécher rapidement vu le magnifique soleil qu’on avait. Pas des plus sereine, Duchesse me suivit tout de même avec beaucoup de respect. Je lui laissais le temps d’observer les lieux, de sentir les odeurs qui arrivaient jusqu’à elle. Je la fis marcher dans tout le domaine, jusqu’à ce qu’elle soit beaucoup plus à l’aise avec le monde qui l’entourait. Après un moment, je décidai de la ramener à son box pour qu’elle se familiarise également avec celui-ci.

Je revins la voir environ deux heures plus tard pour voir si tout allait bien. Elle sortit la tête en entendant le bruit de mes pas dans l’allée, les oreilles pointées dans ma direction. Elle avait un regard si doux. J’approchai doucement le paume de ma main vers elle pour ne pas l’effrayer. Elle la sentit et se laissa tendrement caresser. Elle mit le bout de son nez dans le creux de mon autre main et commença à me lécher. Je souris et lui fila un petit morceau de pomme. Je décidai de lui mettre à nouveau le licol et la fit sortir cette fois pour aller brouter. Elle écouta ce qui se passait autour d’elle, puis elle baissa la tête et se mit à tranquillement brouter l’herbe. Elle était devenue beaucoup plus calme et ne montrait désormais que très peu de signes de stress, ce qui était bon signe. Après quelques minutes, je la ramenai finalement au box. Je lui donnai sa ration du soir constitué de floconnés, ainsi qu’un peu de foin pour l’occuper cette nuit, puis je repartis en lui faisant une dernière caresse.

Débourrage.

Tant de choses s’étaient passées... un an s’était écoulé depuis le débourrage de Duchesse, et pourtant, je m’en souviens comme si c’était hier...

Comme tous les jours, j’allais lui rendre visite. Le plus souvent, elle était au paddock, profitant pleinement de sa vie de cheval. C’était le cas ce jour là. J’étais entrée, licol à la main,  venant chercher la belle qui s’était approchée avec douceur. Une fois à l’écurie, je lui avais fait un bon pansage, laissant découvrir sa magnifique robe dorée. J’avais hâte de pouvoir monter sur son dos, mais en même temps, une fois débourrée, sa propriétaire viendrait la rechercher, et notre histoire prendrait fin... Il ne fallait pas que j’y pense, je devais me concentrer sur la jument, et uniquement elle.

Une fois les pieds curés, la robe dépoussiérée et brillante et les crins démêlés, je pus lui mettre une paire de cloche ainsi qu’enrouler des bandes de travail autour de ses longs membres fins. J’avais choisi un ensemble bleu ciel aujourd’hui. Je lui posai délicatement le tapis rayé bleu et blanc aux liserés bleu et argent, puis je posai doucement la selle de dressage en cuir noir sur son dos. Patiente, Duchesse se laissa sangler sans broncher. Je fini par retirer le licol afin de lui mettre le filet, équipé d’un mors à aiguille en résine qu’elle prit sans difficulté. Je mis alors ma bombe et mes gants et j’amenai la belle ibérique dans le manège.


Quand nous fûmes de retour à l’écurie, je m’occupai d’elle avec beaucoup d’attention. Je la dessellai, puis retirai ses bandes pour doucher ses membres de bas en haut et passer une bon coup du bouchon sur sa merveilleuse robe. J’avais préparé un mash auquel j’avais ajouté de la compote ainsi que des morceaux de fruits. Je lui avais donné pendant que je finissais ses derniers soins, dont un massage sur le dos avec un gel à l’arnica qui lui permettrait de soulager son jeune dos, puis je l’avais ramené au paddock.

Comme prévue, sa propriétaire nous contacta peu de jours après son débourrage, quand elle eut acquis les bases de l’équitation. Cependant, elle décida de la mettre en vente. Je dus assister aux visites et essais, sans pouvoir faire quoi que ce soit, alors que tout ce dont je rêvais était que Duchesse reste près de moi pour toujours... l’annonce qu’elle avait trouver un acheteur me brisa le cœur, et pourtant... Sur les papiers de la vente, c’était mon nom qui était inscrit en tant que nouveau propriétaire, et Luniwüen affichait un immense sourire.

Depuis ce temps, j’avais savouré chaque instant avec elle, ayant conscience de l’immense chance que j’avais. Aujourd’hui, je n’avais plus de crainte la concernant, je savais qu’elle était à moi et que quoi qu’il arrive, je ferais toujours tout pour son bonheur, comme c’est le cas avec Avalanche et Ansem, surtout depuis la rencontre avec Parade. J’avais, grâce à elle, eut un déclic. Cette pauvre ponette avait été maltraitée, et je m’étais rendue compte que j’avais moi aussi participé à ce genre de traitement, malgré moi. Dans le haras où j’avais appris à monter, ils étaient loin d’être tendres avec les chevaux, mais en tant que débutante, je n’avais pas eu conscience de cela, et j’avais moi aussi eu recours à ces maltraitances, sans m’en rendre compte. Je m’étais alors promis que plus jamais je ne ferais de mal, bien au contraire, je ferais tout, absolument tout ce qui était en mon pouvoir pour n’apporter que de la douceur et de l’amour à mes chevaux, eux qui m le rendaient si bien.