Box de Dreamer

11 mots bonus utilisés. Abysses, gargantuesque, chandelle, folklore, morbide, superfétatoire, hypocondriaque, potion, bave, pestiféré, panda-roux.

Il s'était de nouveau levé aux aurores, si l'on admettait le fait qu'il eu réussi à dormir tout court. Les abysses du sommeil n'étaient pas parvenues à le prendre malgré sa fatigue, son cerveau tournant en boucle tout au long de la nuit. La charge de travail gargantuesque qui l'attendait encore à l'approche de l'arrivée de Louison semblait l'écraser sous son poids. Logan n'avait absolument rien pour accueillir l'adolescente au sein de son foyer et les préparatifs couplés à ses tâches quotidiennes paraissaient interminables. Il ne lui restait plus que quelques jours et il avait l'impression de stagner, marchant sur place voir même à reculons à certains moments. S'engageant dans la sellerie afin d'y récupérer les affaires de Dreamer, il remarqua que l'ampoule avait décidé de le lâcher elle aussi, éclairant à peine plus qu'une chandelle à la flamme vacillante. Un soupire lui échappa tandis que l'idée d'un quelconque esprit farceur traversait sa pensée. Il se trouva stupide, maudissant tout ce folklore entourant la période d'Halloween, alors que l'éclairage faiblissant lui donnait un teint cadavérique, quasi morbide. Les cernes dues à la fatigue accumulée n'aidant absolument en rien à le faire paraitre plus en forme. Cela faisait bien longtemps qu'il ne prêtait plus tant d'attention à l'image qu'il renvoyait. Il chargea son chariot de l'équipement de sa jument, ne s'encombrant pas de matériel superfétatoire avant de finalement prendre la direction du box dans lequel elle l'attendait. Passer du temps avec la jolie paint lui ferait le plus grand bien.

Lui passant un licol en cuir havane, il la mena hors de sa stalle afin de l'attacher dans l'allée. Un palefrenier toussota plus loin, attirant pendant quelques secondes l'attention de la jument tandis que Logan se félicitait intérieurement de n'avoir aucune tendance hypocondriaque. En cette période, c'était une bénédiction et un fardeau de moins à porter sur ses épaules. Il brossa longuement Dreamer, prenant soin à frotter toute tâche disgracieuse sur sa robe immaculée avant de s'attaquer à lui curer les sabots puis lui peigner les crins. Comme à sa tendance habituelle, la jument demeura sage, profitant des gratouilles et bonbons à la pomme offerts par Logan ça et là. Le cow-boy s'absenta quelques minutes pour se passer de l'eau froide sur le visage afin de se réveiller un peu, maudissant qu'il n'existe pas une potion énergisante plus efficace que son remède accoutumé : le café noir. De retour aux côtés de Dreamer, il l'équipa en vérifiant par deux fois que tout était bien ajusté afin de ne pas la blesser. Le fait d'avoir un être vivant sous sa responsabilité l'éveilla quelque peu et il s'empara des rênes avant de se diriger vers le manège.

Séance au manège
Sa petite séance avec Dreamer l'avait reboosté, du moins mentalement à défaut d'avoir effacé ses cernes. Il la mena de nouveau à l'attache avant de lui ôter l'ensemble de son équipement pour lui offrir un pansage en bonne et due forme bien mérité. Sa tâche achevée, il s'éclipsa afin de ranger son matériel, prenant à soin à ne pas oublier de nettoyer la bave et les saletés accumulées sur le mors en cuivre. Ceci fait, il mena sa jument jusqu'au paddock afin de l'y lâcher pour le reste de la journée. S'octroyant quelques minutes supplémentaires pour lui-même, il observa la paint brouter tandis que ses pensées se remirent à divaguer. Bientôt, il lui faudrait affronter le regard de sa fille adolescente qu'il n'avait vue pendant des années que par le biais d'un écran. Louison, que sa mère avait éloignée de lui comme s'il avait été un pestiféré. Ce souvenir lui était longtemps resté insupportable. Il aurait pu faire quelque chose. Il aurait sûrement du faire quelque chose. Mais il était demeuré cloitré dans sa solitude, n'ayant plus que pour compagnie une chambre d'enfant vide et un doudou en forme de panda-roux qui avait gardé la même place sur son canapé depuis leur départ. Tout cela, sa routine et ce semblant de vie qu'il s'était efforcé de construire autour, allait bientôt être complètement chamboulé. Et il avait à la fois tout aussi hâte que peur.

Levé aux aurores comme à son habitude, Logan s’était dirigé avec un certain automatisme vers ses écuries une fois son petit déjeuner avalé. Lou s’était réveillée tandis qu’il franchissait le seuil de la porte de la maison, s’installant dans la cuisine ses cours à la main. Elle n’avait été que peu ravie quand son père lui avait demandé de rester dans la demeure pour étudier, la jeune fille ayant quelque peu délaissé ses cours à son arrivée ici, mais elle lui avait finalement donné raison. Cela ne l’empêcherait pas d’aller voir Cabriole une fois ses révisions achevées. Aidé par les palefreniers, Logan débuta donc sa routine matinale. Il déplaça les chevaux au box pour la nuit dans leurs paddocks avant de distribuer foin et granulés à tout ce petit monde. Dreamer, affectée à sa stalle pour le moment le regarda passer en grattant du pied dans les copeaux. Le cow-boy la gratta entre les oreilles lorsqu’il lui ramena sa ration, lui parlant doucement. Il avait décelé une légère boiterie à un antérieur quelques jours plus tôt et la visite du maréchal la veille avait permis de poser un diagnostic qu’il n’appréciait guère : abcès. Les soins étaient relativement aisés, cependant il ne pouvait pas s’empêcher d’avoir le coeur serré en songeant à Dreamer qui ne pourrait pas sortir des écuries pendant un petit moment. Il la laissa manger tranquillement, s’attaquant au nettoyage en profondeur des boxs, s’arrêtant plusieurs fois afin de passer quelques petites minutes avec elle pour calmer son impatience. Lorsque sa tâche fût finalement terminée, il attrapa le licol suspendu à la porte de Dreamer puis lui enfila avant de la sortir. La paint horse se laissa mener jusqu’à l’aire de douche intérieure puis Logan l’attacha grâce aux deux grandes longes fixées de part et d’autre. Se dirigeant vers l’antérieur blessé, une paire de ciseaux à la main, Dreamer anticipa la demande de son propriétaire et le leva d’elle-même, lui permettant de couper avec une grande précaution le bandage de fortune autour du sabot. Il vérifia que le trou ne s’était pas plus infecté pendant la nuit puis prépara un seau d’eau auquel il ajouta du bicarbonate de soude avant d’y tremper le pied de la jument. Dreamer ne broncha pas, la solution devant certainement lui faire le plus grand bien. Attrapant une étrille, il s’attaqua au pansage de la belle le temps du trempage. Il brossa énergiquement toutes les parties charnues afin d’en faire sortir la poussière puis passa au bouchon, s’attardant sur les membres. À l’aide d’une brosse douce à poils longs, il épousseta toutes les saletés sur le corps majoritairement blanc, Dreamer baissant la tête pour l’aider quand il arriva à cette partie. Logan la récompensa d’un bonbon, démêlant ensuite les crins avec soin. Il prit plus de précaution pour le curage des sabots, reposant régulièrement l’antérieur opposé à celui blessé pour ne pas lui faire trop mal. Dreamer ne broncha pas d’une oreille, regardant avec attention Logan qui préparait de quoi réaliser un pansement propre à quelques pas de là. À l’aide d’un linge propre, il sécha le sabot au maximum pour éviter l’humidité et y appliqua une compresse imbibée de Vétadine directement sur la blessure. Il enferma le tout dans un sac plastique pour l’étanchéité avant de sécuriser à l’aide de gros scotch en prenant garde à ne pas trop serrer pour éviter de couper la circulation sanguine. Le pansement ainsi refait, il récompensa de nouveau Dreamer pour son calme olympien avant de la détacher. Si la jument était cloîtré au box, elle avait tout de même le droit à dix minutes de marche quotidienne et, pour son bien être, Logan n’allait certainement pas passer outre. Le couple sortit des écuries, le cow-boy dirigeant sa monture dans les allées des paddocks, lui octroyant des arrêts réguliers afin qu’elle puisse dire bonjour à ses copains ou brouter un peu à sa guise. La paint horse marqua l’immobilité devant son pré habituel, Cabriole, avec qui elle passait ses journées depuis l’arrivée de la Fjord, s’élança dans un galop effréné pour venir à sa rencontre, Dreamer hennissant pour l’accueillir. Les juments se chamaillèrent gentiment à travers la clôture, visiblement ravies de pouvoir passer un peu de temps ensemble, elles qui avaient l’habitude d’être vingt-quatre heures sur vingt-quatre ensemble. Cela arracha un sourire un peu triste à Logan. Malgré ses airs de cow-boy autoritaire, il avait du mal à voir sa jument séparée des autres et être enfermée au box alors qu’elle avait l’habitude de vivre en extérieur à l’année. Il caressa l’encolure de la jument qui avait remis le nez dans l’herbe, aussi proche que possible de Cabriole de l’autre côté de la barrière. N’ayant pas le coeur de les séparer immédiatement, il les laissa encore un moment profiter de la présence de l’autre. Après quelques minutes, il fit une légère pression sur la longe afin de remettre Dreamer dans le mouvement, celle-ci s’exécutant néanmoins à contre-coeur. Il lui promis qu’ils feraient la même chose le lendemain, reprenant la marche autour des paddocks mais en se dirigeant cette fois vers les écuries. De retour dans son box, il caressa longuement sa jument, en profitant pour passer encore un peu de temps avec elle et comblant un minimum sa solitude. Deux semaines. C’était à la fois court et interminable, surtout pour Dreamer, mais cependant nécessaire à sa santé. S’il suivait à la lettre le protocole laissé par les professionnels, la tovero serait de retour dehors bien plus vite qu’il n’y paraissait pour le moment.