Pandora Hills - Manège

Lumi & Soledane

Lorsque Lumi arriva dans le manège, tout était déjà en place. Owen se tenait fièrement au milieu des obstacles, un grand sourire sur le visage. La jeune femme retint un rire en le voyant si heureux. Comme ça, il avait l'air d'un enfant à qui l'on venait d'annoncer qu'on l'emmenait à Disney. Avant qu'il ne se rende compte qu'elle l'observait, elle se tourna vers la jument qu'elle tenait à la main. Soledane était détendue mais attentive et Lumi avait presque l'impression que la jument calculait déjà le parcours qui se trouvait devant elle. La jeune femme lui caressa l'encolure et la baie posa sa tête contre son épaule. Que c'était agréable d'avoir une monture douce totalement à l'opposé de Silven !
Le palefrenier s'avança vers le duo d'un pas rapide.
«Prête ?, demanda-t-il à la cavalière.
Cette dernière acquiesça et il l'aida à se mettre en selle en lui faisant la courte échelle. Une fois installée et les étriers ajustés, Lumi ordonna à la jument d'avancer. Elle était plus grande et plus fine que Silven, et plus calme aussi. La jeune femme n'eut aucun mal à la guider. Avec elle, nul besoin de se montrer trop ferme. Soledane savait ce qu'on voulait d'elle et avait l'habitude de travailler. Sa cavalière l'emmena faire le tour du manège, tout d'abord au pas. Au bout de quelques minutes à cette allure, elle commença à se sentir plus à l'aise sur son dos. Owen, qui était reparti à son poste au milieu, les observait sans en rater une miette. Lumi se concentra sur la baie, gênée par le regard du palefrenier. Lorsqu'elle la sentit prête, elle poussa la jument à l'allure supérieure. La selle français prit un trot élégant et régulier. Ses pieds foulaient le sable avec prestance et elle faisait attention à chacun de ses mouvements. Les oreilles bien pointées vers l'avant, la tête haute, elle avançait avec sérieux, concentrée sur ce qu'on lui demandait. Lumi lui fit faire plusieurs tours à cette allure, lui demandant parfois d'allonger le trot ou de le rassembler pour lui faire travailler ses transitions. Chaque ordre qu'elle initiait était aussitôt respecté par la baie avec application. Lorsqu'elle passa au petit galop, la jument était complètement investie dans l'exercice. C'était la première fois que Lumi montait un cheval aussi motivé. Elle trouva son équilibre sur la selle pendant qu'elle dirigeait sa monture le long des murs du manège. Elle termina sa détente par quelques transitions du trot au galop ainsi que quelques changements de direction et de main. Puis, elle fit progressivement repasser Soledane au pas pour la mener au centre, se dirigeant vers Owen. Elle s'arrêta à son niveau, attendant qu'il lui explique ce qu'il avait préparé. Sous elle, la jument observait les environs avec envie, prête à se lancer sur le parcours.
-Bien. On va voir de quoi elle est capable., commença Owen. J'ai mis les barres à 65 cm, ça devrait être tranquille pour elle.
Lumi acquiesça lentement. Certes, la jument avait l'habitude de sauter, mais pas elle. Elle avait fait un peu de saut d'obstacle lorsqu'elle montait ici lors de son adolescence, mais depuis son retour ... disons que Silven ne lui avait pas vraiment permis de s'exercer dans cette discipline. Déjà fallait-il qu'elle tienne plus de quelques minutes sur le dos de l'étalon pour envisager de travailler quoi que ce soit avec lui.
-N'aie pas peur., lâcha Owen. Laisse Soledane gérer les sauts, et pour l'instant contente-toi de rester en selle. Le reste viendra tout seul.
La jeune femme lui lança un regard indigné.
-Je n'ai pas peur., rétorqua-t-elle.
Le palefrenier leva les mains en l'air, comme pour clamer son innocence.
-Je n'ai rien dit alors. On va commencer par les trois obstacles sur cette longueur là-bas. Ils sont assez éloignés donc tu devrais avoir le temps de retrouver ton équilibre entre chacun d'eux si jamais tu es trop secouée., expliqua-t-il tout en désignant la ligne du doigt.
Sans plus attendre, Lumi talonna la jument. Elle la mena au petit galop sur la courbe qui menait aux sauts, essayant de repousser l'appréhension qui menaçait de l'envahir. Lorsqu'elle fut sur la bonne trajectoire, la cavalière poussa sa monture au galop moyen, la guidant droit sur le premier obstacle. Puis elle suivit les conseils d'Owen. Elle sentait que Soledane savait exactement ce qu'elle faisait, alors elle lui laissa un peu plus de rênes tout en maintenant une bonne prise sur ceux-ci. La baie s'approcha de l'obstacle avec détermination. Ses foulées étaient régulières, tout comme sa respiration. Lumi compta. Encore trois foulées ... deux foulées ... une ... La jument prit ses appuis, puis s'élança. Sa cavalière se pencha sur son encolure et poussa sur les étriers pour se redresser, suivant le mouvement de sa monture tandis qu'elle quittait le sol. Le temps sembla se ralentir tandis que le duo survolait les barres avec aisance. Sans s'en rendre compte, Lumi souriait. Ce n'est que lorsque les antérieurs de la jument touchèrent le sol qu'elle sembla sortir de cette sorte de ralenti. La baie se réceptionna sans problème et sa cavalière fut un peu secouée par l'atterrissage, mais elle eut le temps de se repositionner et de reprendre son équilibre avant d'atteindre le second obstacle. Encore une fois, Soledane n'éprouva aucune difficulté à passer par-dessus et cette fois, Lumi parvint à mieux gérer la réception que pour le premier. Elle lança sa monture sur le dernier saut, beaucoup plus confiante désormais et toute appréhension ou peur ayant quitté son esprit. Elles franchirent le troisième avec succès et c'est seulement après avoir repassé la jument au trot que Lumi réalisa ce qu'elle venait d'accomplir. Ne cherchant plus à dissimuler sa joie, elle tapota l'encolure de la baie avec fierté, la flattant et la félicitant. Celle-ci semblait se délecter de cette attention et, fière d'avoir montré son talent, elle trottait la tête bien haute. Owen s'approcha d'elles presque en courant. Une fois à côté du duo, il applaudit.
-Je savais qu'elle était exceptionnelle !, s'exclama-t-il.
-La jument ou moi ?, le taquina Lumi.
Le palefrenier se mit à rire.
-Les deux bien sûr, mais je n'étais pas sûr que tu acceptes le compliment., avoua-t-il.
La jeune femme pouffa, et elle le bouscula d'un léger coup de pied.
-Je ne suis jamais contre un compliment. Mais merci !, dit-elle.
Owen secoua la tête en prenant un air faussement désespéré. Puis il caressa le nez de Soledane.
-Qu'est-ce que tu dirais de continuer un peu sur le reste des obstacles ?, proposa-t-il.
Sans avoir besoin de réponse, il reprit sa place tandis que Lumi remit Soledane en marche. Pendant une demi-heure, elle suivit les instructions d'Owen et guida la jument sur les différents sauts. Elles les franchirent tous sans difficulté. La baie semblait avoir des ailes et bientôt Lumi retrouva tous les réflexes qu'elle pensait avoir perdus. Leurs sauts se firent plus précis et calculés, et pendant toute la séance, dans l'esprit de la jeune femme, il n'y avait plus qu'elle, Soledane et la voix d'Owen qui les guidait. Lorsque la jument commença à montrer les premiers signes de fatigue, ils décidèrent de ne pas trop la pousser. Lumi la guida sur un dernier obstacle. Répétant les mêmes étapes que pour tous les précédents, elle suivit la jument dans son saut et une fois de nouveau au sol, la fit ralentir. Elle l'arrêta au bout de quelques mètres, avant de mettre pied à terre. Se rapprochant du palefrenier qui était déjà en train de retirer les barres pour les ranger, elle retira sa bombe de sa main libre.
-Alors, qu'est-ce que tu en penses ?, s'enquit Owen dès qu'elle fut à portée de voix.
Lumi se tourna vers Soledane, qui la regarda en retour. C'était une opportunité incroyable qui se présentait à elle. La selle français avait beaucoup de potentiel, n'importe qui pouvait s'en rendre compte. Mais serait-elle à la hauteur de ce potentiel ? Elle hésitait. Cependant, même si elle venait de la rencontrer, elle éprouvait déjà un pincement au cœur en songeant que la jument partirait probablement chez un autre propriétaire et qu'elle ne retrouverait jamais les sensations qu'elle avait eues lors de cette première séance si c'était le cas. Alors elle prit sa décision.
-J'en pense que c'est d'accord., soupira-t-elle.
Owen arrêta ce qu'il était en train de faire pour la regarder, bouché bée. Il semblait avoir du mal à croire ce qu'il venait d'entendre.
-Je vais l'acheter., annonça Lumi.
Puis elle tendit la main au palefrenier. Après une hésitation, celui-ci la serra.
-A notre partenariat !, lança la jeune femme.
-Aux futures championnes !», répondit-il, des étoiles dans les yeux.
Sur ces mots, Lumi prit le chemin des écuries, menant la jument. Elle avait bien mérité une bonne séance de pansage et de câlins après ce qu'elle venait d'accomplir. Jusqu'à ce qu'elle quitte le manège, la jeune femme sentit le regard d'Owen sur elle. Cependant, cette fois, elle n'en éprouva pas de gêne, mais une autre sensation qu'elle ne pouvait décrire. Une chose était sûre, elle allait passer beaucoup de temps avec le palefrenier à partir de maintenant.

Owen & Emeraude

Tandis qu'il menait la jument pie par les rênes, Owen ne pouvait s'empêcher de ressentir une certaine appréhension envers l'animal. Même si il savait qu'au fond d'elle, la croisée n'était pas agressive ni dangereuse à proprement parler, l'accident de Lumi ne cessait de lui revenir à l'esprit chaque fois qu'il voyait la pie. Des mois étaient passés depuis et sa compagne n'en gardait heureusement aucune séquelle, mais le brun s'était montré insistant sur le fait qu'elle ne devait plus prendre le moindre risque avec la jument jusqu'à ce qu'il règle son problème. Ainsi c'était lui uniquement qui montait la croisée, pour cette raison et une autre plus évidente.
Le soleil de juillet frappant avec puissance à l'extérieur, le cavalier avait préféré se réfugier dans le manège climatisé pour travailler ce jour-là. Il referma la porte derrière lui, empêchant l'air étouffant de s'engouffrer dans la vaste salle. Vérifiant une dernière fois les sangles de la selle et réajustant le tapis en dessous, il mit ensuite pied à l'étrier et se hissa sur le dos d'Emeraude. Docile, la jument ne broncha pas. Owen n'ayant ni le courage, ni l'énergie de travailler sur ses peurs pour l'instant, il se contenterait d'un simple entraînement en plat.
Il se mit au travail sans plus attendre, talonnant la pie pour la faire avancer. La croisée se mit en marche, avançant d'un pas régulier, ses sabots s'enfonçant dans le sable du manège. Owen raffermit sa prise sur les rênes et commença à diriger sa monture sur la piste, commençant par de simples tours de la zone, insistant sur la précision des directions de la pie dans ses virages. Il lui fit réaliser quelques demi-tours et changea de main à plusieurs reprises en la menant sur la diagonale du rectangle pour reprendre le cercle en sens inverse. Décidant de corser un peu l'exercice, il demanda à la jument d'allonger ce pas, ce qu'elle fit après quelques secondes d'hésitation suite à cette demande qu'elle n'avait pas l'habitude de recevoir. Après une diagonale à cette allure, Owen ordonna à sa monture de changer de nouveau d'attitude en exigeant d'elle un pas rassemblé. La pie s'emmêla les jambes quelques fois avant de parvenir à obtenir une allure suffisamment fluide et régulière.
Ce n'est qu'après un énième tour au pas que le cavalier décida de passer à l'allure supérieure. Pressant les flancs de sa monture à plusieurs reprises, il la fit passer au trot. Emeraude sembla satisfaite de passer à un ordre plus simple et elle se mit à trottiner gaiement dans le manège, sans pour autant perdre de sa concentration. Malgré les évènements récents, Owen ne pouvait nier que la jument était incroyable au travail. Obéissante, volontaire et motivée, elle avait toutes les qualités pour succéder dans la plupart des disciplines. Une fois ses craintes envolées, elle serait une monture parfaite. Et avec la constitution solide et la corpulence assez large de la croisée, Owen songea qu'elle pourrait même se découvrir un don pour l'attelage. L'homme avait de plus des vieux brancards destinés à cet usage qui traînaient au fond de la grange. Mais l'heure n'était pas à l'attelage.
Le brun se concentra de nouveau sur sa tâche et reprit la jument en main, celle-ci ayant légèrement dérivé de la piste suite à l'inattention de son cavalier, distrait par ses pensées. Reprenant les mêmes exercices qu'avec le pas, Owen fit tourner la jument à des angles précis, effectua des changements de main, demanda de rassembler puis allonger le trot. Cette fois Emeraude s'en sortit mieux qu'avant, sa concentration étant maximale et tout son esprit désormais concentré sur la séance et les aides de son cavalier. Ses oreilles étaient pointées vers l'avant et elle fixait sa trajectoire. Owen compléta la séquence de trot en y ajoutant des changements d'allure, alternant entre une largeur au pas, un tournant propre puis une diagonale au trot. Il fit plusieurs séquences identiques à la suite et, satisfait des attitudes de la jument, la poussa finalement au galop.
La pie ayant déjà bien travaillé durant les près de quarante-cinq minutes qu'avait déjà durée la séance, son cavalier lui offrit un dernier exercice plus simple. De plus, la chaleur contribuait à la fatigue du duo, la climatisation du manège ne suffisant pas à les protéger de manière totalement efficace contre les rayons puissants du soleil frappant sur le toit et éclairant l'endroit. Il demanda dons à sa monture de réaliser de simples tours au galop de travail et de faire des changements de direction précis, et arrêta la séance là-dessus.
Mettant pied à terre, le brun souffla, commençant à transpirer. Il tapota l'épaule d'Emeraude, qui colla sa tête contre lui en retour, démontrant son affection. L'homme lui rendit cette attention, grattouillant le chanfrein de la pie. Puis, il la mena hors du manège et se dirigea vers l'écurie pour la desseller.

Reprendre confiance

De toutes les années où elle était montée à cheval, jamais Lumi n'avait été nerveuse avant de se hisser sur une selle. D'un tempérament confiant et déterminé, elle n'avait jamais éprouvé la moindre crainte ou appréhension envers un équidé, pas même Silven lorsqu'il l'avait jetée au sol de la carrière du Haras de Pado, il y a plus de deux ans déjà, alors qu'elle n'avait plus l'habitude de monter. A chaque chute elle s'était redressée, plus motivée que jamais à remonter sur la selle. Elle avait chassé la poussière de ses vêtements et était allée récupérer sa monture pour reprendre là où ils s'étaient arrêtés. Jamais la jeune femme n'avait éprouvé la moindre nervosité. Et pourtant, alors qu'elle se tenait devant le box d'Emeraude, Lumi avait peur.
Il lui fallut une longue demi-heure pour sortir la jument et la seller, ses mains tremblant légèrement et l'empêchant de resserrer les sangles de manière efficace. Elle dût redoubler de concentration pour y parvenir et c'est la démarche raide qu'elle avait traversé la cour pour se rendre au manège. Pendant les quelques mètres qui séparaient les deux bâtiments, la jeune femme avait guetté, inquiète, le moindre bruit de véhicule pénétrant dans le domaine. Elle avait lorgné d'un regard plein d'appréhension sa propre voiture, ainsi que celle d'Owen, craignant qu'un quelconque coup du sort ne fasse vrombir l'un des moteurs à son passage. Menant la jument par la bride, elle avait surveillé ses plus infimes mouvements, s'attendant à ce qu'elle se jette en avant brusquement. Mais Emeraude n'avait pas bougé. Elle n'avait pas bondi tel un diable pour s'élancer au grand galop à travers la cour. Elle n'avait ni rué, ni cabré. Elle s'était contentée de suivre sa propriétaire avec cet air tranquille qui la caractérisait au quotidien, cet air qui jamais n'aurait fait deviner qu'elle pourrait se comporter autrement que comme la jument modèle.
Elles étaient entrées dans le manège et Lumi avait refermé la porte avant de lâcher un long soupir, se rendant compte qu'elle avait retenu sa respiration jusqu'à maintenant. La jeune femme avait essuyé les gouttelettes qui s'étaient écrasées sur son visage. Il pleuvait dehors, et le soleil ne tarderait pas à apporter une petite éclaircie avant l'averse suivante, continuant sur le même schéma que depuis ce matin pour toute la journée. C'était l'une des raisons pour laquelle Lumi avait choisi le manège ce jour-là. La seconde était qu'il s'agissait d'un lieu fermé et donc sécuritaire. Cependant, rien ne l'empêcherait de s'étaler dans le sable au moindre problème, mais en guise de consolation elle songea qu'il était moins dangereux de tomber dans un manège que sur une route. Prenant une grande inspiration sensée lui donner le courage nécessaire, Lumi avait mis un pied dans l'étrier et elle s'était hissée sur le dos de la pie, restée immobile jusque là. Jamais la jeune femme n'avait éprouvé la moindre crainte envers un équidé auparavant. Et pourtant, sur le dos de la selle français, elle avait peur.
Il lui fallut toute la détermination du monde pour serrer les jambes et compresser les flancs de la jument. Toute celle de l'univers pour ne pas descendre immédiatement lorsque sa monture se mit en marche d'un rythme pourtant lent. Sur les rênes, les mains de Lumi avaient cessé de trembler, mais elles étaient crispées, agrippées telles les serres d'un rapace sur sa proie, refusant de lâcher les lanières de cuir ou de les laisser lui échapper ne serait-ce que d'un millimètre. Sa posture était raide, son corps entier tendu sous les mouvements de la pie. Cette dernière continuait de marcher, les oreilles légèrement en arrière, confuse par le comportement étrange de sa cavalière. Elle prit elle-même l'initiative de tourner pour continuer le tour de la piste lorsque Lumi, absente, oublia de lui en donner l'ordre.
La jeune femme tenta de se ressaisir. Elle se redressa sur la selle et s'installa un peu plus confortablement, ses os craquant suite à son immobilité passagère. Elle cligna des yeux plusieurs fois pour se sortir de son état actuel et se racla la gorge. Elle eut l'impression de réaliser où elle se trouvait pour la première fois depuis qu'elle avait sorti Emeraude. Elle parvint au prix d'un grand effort à desserrer légèrement sa prise sur les rênes et à replacer ses mains correctement. Petit à petit, pas après pas, elle commença à se détendre. Sous elle, la jument continuait de marcher d'un air monotone, docile. Cette fois, Lumi la guida sur la longueur suivante et la pie sembla revigorée de savoir sa cavalière avec elle. La jeune femme sentit son appréhension diminuer, sa peur se calmer. Elle était en sécurité ici, elle n'avait pas à s'inquiéter. Aucun véhicule n'entrerait dans le manège, la jument resterait aussi calme qu'à cet instant et elles pourraient travailler sans le moindre accroc. Ces pensées rassuraient la cavalière, et bientôt ses mécanismes revinrent progressivement. Elle fit plusieurs tours du manège sur le dos de la pie, à un pas régulier et rassurant. Elle demanda aussi plusieurs changements de main à sa monture et l'engagea sur quelques diagonales. Le silence du manège, que seul perturbaient le crépitement des gouttes de pluie sur le toit et le claquement des sabots de la jument, avait un effet apaisant lui aussi. 
Au moment de passer au trot pour continuer la séance, Lumi eut une nouvelle vague de peur. Et si la jument l'embarquait de nouveau ? Et si elle la faisait chuter encore une fois ? Se réveillerait-elle encore à l'hôpital ? Avant que la panique ne la fige à nouveau, elle chassa ces idées noires de son esprit et observa sa monture. Emeraude avait été parfaite jusque là. Contrairement à sa cavalière, la jument ne semblait avoir gardé aucune séquelle psychologique de leur accident. Elle se contentait de suivre les ordres de Lumi, sans hésiter ou protester. Le pas enjoué et rapide, elle semblait même apprécier la séance et de pouvoir de nouveau travailler avec la jeune femme. Tout ce que voulait la pie, c'était une seule chose: la confiance de sa cavalière. Mais cette dernière parviendrait-elle à la lui donner à nouveau après ce qu'il s'était produit ? Arriverait-elle un jour à remonter sur le dos de la jument sans avoir cette boule dans le ventre, cette peur presque maladive qui l'envahissait à chaque fois ? C'est alors qu'elle comprit quelque chose. Emeraude lui avait toujours accordé sa confiance. Elle n'avait jamais cherché à lui faire le moindre mal ou à la blesser. Elle avait eu peur ce jour-là. Une peur tellement ancrée en elle que son instinct avait repris le dessus sur tout le reste et l'avait empêchée de prendre les bonnes décisions, au détriment de sa cavalière. Mais son but n'avait jamais été de la jeter au sol. Juste de fuir ce qui l'effrayait. Et le résultat, Lumi en avait fait la désagréable expérience. Et si elle aussi succombait à la peur, jamais elle ne parviendrait à faire progresser la pie. Il lui fallait aller de l'avant, combattre ses émotions pour espérer un jour aider sa monture à faire de même.
Lumi talonna Emeraude. Sans traîner, la jument se mit à trotter avec légèreté dans le manège. La jeune femme se concentra sur sa posture et ses mouvements, suivant l'allure de sa monture et maniant les rênes comme elle le faisait auparavant. Tout en douceur, le duo traversa le manège de part et d'autre, réalisant de grands cercles, puis des lignes droites, changeant de sens et de direction régulièrement. Lumi demanda à la jument de rassembler, puis allonger son trot sur certaines lignes, lui faisant travailler ses transitions. Plus les minutes passaient, plus la jeune femme se sentait de nouveau en communion avec la selle français. Pendant le temps d'une séance, elle oublia son passif avec la pie et toutes deux progressèrent comme un seul être, laissant des sillons dans le sable sur leurs nombreux passages. Après de nombreux exercices, Lumi poussa finalement sa monture au petit galop. Au bout d'un seul tour de manège, elle ordonna cependant à la jument de décélérer. Si elle avait passé certains caps aujourd'hui, elle ne se sentait pas tout à fait prête à galoper de nouveau sur le dos d'Emeraude. Il lui faudrait encore un peu de temps pour être de nouveau tout à fait à l'aise avec elle.
Tirant légèrement sur les rênes, Lumi fit ralentir la jument progressivement, jusqu'à l'arrêt total. Elle passa sa jambe par-dessus la selle et descendit. Lorsque ses pieds touchèrent le sol, ses jambes faillirent céder et elle s'agrippa à la pie pour ne pas tomber. Au bout de quelques secondes, elle se sentit de nouveau d'aplomb et put se tenir debout. Un léger tremblement agitait ses membres et sa bouche était pâteuse. La jeune femme se dirigea vers la tête d'Emeraude et tandis qu'elle posait son front contre le chanfrein de la jument, elle éclata en sanglots. Toutes les émotions qu'elle avait repoussées ces derniers mois, toutes ses peurs mais aussi son soulagement immédiat s'exprimèrent dans les larmes qui coulaient sur ses joues. Pendant de longues minutes elle caressa la pie, debout au milieu du manège, lui demandant ainsi son pardon. Emeraude ferma les yeux à moitié, appréciant ce câlin inattendu. Lorsque Lumi parvint enfin à se calmer, elle s'essuya les yeux du revers de sa manche et déposa un baiser sur le nez de la jument. Puis, elle commença à la ramener vers l'écurie. Si elle avait encore du chemin à faire, elle jura intérieurement de renouer ses liens avec Emeraude afin que toutes deux surmontent leurs peurs.

Exercices de base

En cette journée de mi-septembre, la chaleur estival commençait à laisser place à un temps plus automnal. Lumi avait échangé son t-shirt pour un pull léger en sortant ce matin. Le soleil brillait d'une lumière plus froide dans le ciel, et la jeune femme frissonna en se rendant aux écuries. Aujourd'hui, elle travaillerait dans le manège où les températures seraient plus agréables.
Lumi alla chercher Vatican dans son box, et après avoir sellé le selle français, elle le mena jusqu'au grand bâtiment. Refermant la large porte derrière elle, la jeune femme mit le pied à l'étrier et se hissa sur le dos de son cheval. Une fois en place, elle ajusta les rênes et s'installa confortablement, avant de presser les flancs du gris pour le faire avancer. Vatican se mit aussitôt à marcher. L'étalon aimait travailler et il ne fallait pas lui demander deux fois de faire quelque chose pour qu'il y mette tout son cœur. Posant un sabot après l'autre dans un rythme constant, le jeune cheval avait la tête haute et les oreilles bien dressées, heureux d'être monté. Sa cavalière le guida sur la piste, lui faisant faire le tour du manège au pas pour l'échauffer. Elle veillait à être précise dans ses demandes, sachant que Vatican était un cheval délicat, et tant qu'elle restait concentrée sur sa monture, cette dernière faisait de même. Après un second tour tranquille, la jeune femme demanda à Vatican de rassembler son pas, et après quelques essais infructueux où l'étalon s'emmêla les jambes, il parvint au résultat attendu et se cala sur cette nouvelle variation d'allure. Lumi le félicita d'une tape sur l'épaule, sans relâcher son attention. Elle le maintint à cette vitesse sur toute une longueur, avant de le laisser reprendre son allure précédente pour la largeur qui suivait, permettant au gris de souffler un peu. Puis, sur la seconde longueur de piste, elle demanda cette fois au selle français d'allonger ses foulées. Cet exercice étant plus simple pour l'équidé, il y parvint immédiatement et n'eut aucun mal à couvrir la distance demandée ainsi. La jeune femme, satisfaite des efforts que fournissait l'étalon, continua les exercices au pas en le guidant toujours sur la piste, tout en faisant parfois une diagonale afin de changer de sens ou de main. Vatican exécutait chaque transition avec brio, sa concentration étant au maximum. La jeune femme le fit tourner au pas pendant une vingtaine de minutes avant de passer à la séquence suivante.
Pressant de nouveau les flancs de sa monture, Lumi fit accélérer Vatican jusqu'à ce qu'il se mette à trotter. Une fois à la bonne allure, elle reprit le même schéma que précédemment. Elle lui fit d'abord faire deux tours complets de manège au même rythme, pour que l'étalon soit bien coordonné dans ses mouvements. Le trot de Vatican était léger et élégant. Nul doute que si Lumi s'y connaissait mieux dans cette discipline, elle pourrait en faire un très bon cheval de dressage. Peut-être songerait-elle à se former un jour pour exploiter tout le potentiel du gris ? En attendant, le selle français progressait donc avec entrain, ses sabots creusant le sable sur son passage. Rassembler le trot fut plus facile que le pas puisqu'il savait désormais mieux s'y prendre, et l'allonger permit au gris de dévoiler toute sa grâce à cette allure. Il tendait bien les jambes et levait ses antérieurs de manière remarquable, si bien qu'il aurait presque put partir dans un pas espagnol si il n'était pas à l'allure supérieure. Ses foulées étaient légères et Lumi n'avait que peu d'efforts à faire pour suivre ses mouvements tellement ils étaient fluides. Comme auparavant, elle alterna entre trot rassemblé et allongé sur les longueurs, se servant des largeurs comme phase de récupération à une allure normale. Elle y ajouta aussi des changements de main, et de direction en faisant tourner l'étalon sur les diagonales. Décidant de compliquer un peu la séance, la jeune femme lui ordonna à un moment de repasser au pas, tirant progressivement sur les rênes. Vatican s'exécuta sans rechigner et ralentit. Puis, au bout de quelques mètres seulement, Lumi le talonna pour repasser au trot. Elle recommença cet exercice à plusieurs reprises, travaillant sur la rapidité des transitions du gris et sa réactivité aux ordres. Essai après essai, le selle français s'exécuta de plus en plus vite et de manière précise.
Lorsqu'il s'engagea sur une autre longueur, Lumi talonna l'étalon, qui passa aussitôt du trot au galop de travail. Il mit quelques secondes à trouver son rythme sur cette allure, mais lorsqu'il y parvint, chaque foulée devint régulière et calculée. Sur son dos, sa cavalière bougeait en même temps que lui pour le suivre dans ses mouvements. Elle le guida à l'aide des rênes sur la piste. Cette fois, elle le fit galoper plus longtemps sans autre exercice, veillant à ce que sa monture soit bien échauffée à cette allure avant d'y ajouter des transitions ou autres changements. Puis elle reprit pour la troisième fois le même programme. Galop rassemblé, d'abord, puis allongé. Ce dernier posa quelques problèmes à Vatican, qui avait tendance à accélérer et passer au galop moyen plutôt que d'allonger ses foulées. Cependant, après plusieurs tours à réessayer sans abandonner, le cheval sembla avoir le déclic et parvint à faire une longueur correcte, bien qu'elle ne soit pas parfaite. Sa propriétaire décida de terminer cette session sur une note positive et ne lui redemanda pas d'allonger son galop pour le reste de la séance. A la place, elle lui fit faire plusieurs changements de main, que l'étalon réalisa avec une facilité déconcertante, puis finit par intégrer quelques passages au trot entre deux diagonales au galop pour retravailler les transitions. Vatican s'appliqua jusqu'à la dernière minute, concentré sur chaque demande, chaque aide de sa cavalière et déterminé à faire plaisir à celle-ci en réussissant les exercices qu'on lui donnait. C'était aussi simple que cela: plus Lumi était précise dans ses demandes, plus le gris était rapide dans leur exécution.
Après une bonne heure de travail, la jeune femme fit ralentir progressivement Vatican, dont les flancs se soulevaient au rythme de sa respiration. L'étalon repassa au pas pour un dernier tour de piste afin de se refroidir progressivement et éviter de brusquer les muscles en stoppant l'exercice d'un coup. Puis, lorsque sa cavalière vit qu'il était de nouveau au calme et que sa respiration était devenue plus posée, elle tira sur les rênes pour l'arrêter et mettre pied à terre. Une fois les pieds au sol, la jeune femme se plaça devant son cheval et lui caressa le chanfrein, posa sa tête contre le front de l'animal. Vatican ferma les yeux, profitant de ce contact. Le gris dépassait toutes les attentes de Lumi et elle commençait à former un véritable lien avec lui. Elle avait hâte de voir ce que l'avenir leur réservait. Pour l'instant, elle devait s'occuper du selle français après cette séance. Elle mena donc l'étalon vers l'écurie, où une séance de pansage et de grattouilles l'attendait.

Les bases du travail à pied

La pluie tombait en continu lorsque Lumi traversa la cour avec Break of Dawn. La jeune femme accéléra le pas, faisant trottiner la pouliche, avant de s'engouffrer au plus vite dans le manège, où elles seraient à l'abri des intempéries. Ce mois d'octobre s'annonçait froid et humide, ce qui n'était pas pour ravir Lumi. Juste en parcourant ces quelques mètres dehors, elle avait bataillé avec la jeune baie, qui n'avait pour but que d'aller se rouler dans les nombreuses flaques de boue. Cependant, à l'intérieur, elle ne serait pas tentée et pourrait se concentrer sur les exercices demandés. Le programme d'aujourd'hui était une séance de travail à pied. Rien de tel pour apprendre à un jeune cheval turbulent comme Break of Dawn à respecter son cavalier et écouter les ordres de base. De plus, la pouliche aurait bientôt l'âge d'être débourrée à la monte et sa propriétaire ne comptait certainement pas s'atteler à cette tâche avant qu'elle ne change un minimum de caractère, ou au moins apprenne à se maîtriser un peu. Lumi n'avait pas des connaissances incroyables sur le travail à pied, mais elle en avait appris les bases et savait comment gérer un équidé sur ce genre de séance. C'est donc pleine de détermination et de bonne volonté qu'elle prit une grande inspiration, avant de se mettre au travail.
Lumi commença par l'un des exercices fondamentaux: la mobilisation des hanches. La jeune femme se plaça face à la jument qui, aussitôt, s'avança vers elle pour lui mettre un coup de tête dans l'épaule. Lumi flancha mais repoussa tout de même la baie d'une main ferme en la tenant par le licol. Elle ne laisserait pas la selle français prendre le contrôle et faire n'importe quoi avant même d'avoir fait le moindre pas. Elle se remit donc en place et attendit quelques secondes que Break of Dawn s'immobilise avant de lâcher le licol. Puis, Lumi plaça sa main gauche sur le mousqueton de la longe, tenant cette dernière de la main droite, de même qu'un stick qui serait le prolongement de son bras. La pouliche baissa la tête, se contorsionnant dans son licol pour tenter d'attraper la main de Lumi qui tenait le mousqueton. La jeune femme leva la main gauche vers le haut, relevant le menton de la baie. Ce mouvement n'eut pour effet que de donner encore plus envie à Break of Dawn de se servir de ses dents.
«Arrête ça !, la gronda Lumi d'une voix ferme.
Les oreilles de la pouliche pivotèrent dans sa direction, et après une hésitation, elle décida de laisser sa main tranquille.
-Bien., la félicita sa propriétaire tout en sortant un petit morceau de carotte d'une pochette attachée à sa ceinture.
Break of Dawn se saisit de la friandise et cette récompense sembla obtenir son attention. Elle était désormais concentrée sur sa propriétaire, attentive à ses gestes. Un petit pas vers le progrès. Ayant désormais réuni les conditions nécessaires pour vraiment commencer, Lumi se remit en position et commença à avancer en arc de cercle autour de la pouliche, se dirigeant vers ses jarrets. La pouliche se contenta de suivre Lumi du regard, sans bouger. Cette dernière décida donc de l'aider en lui touchant les hanches avec le stick. La première réaction de la baie fut d'essayer d'avancer pour suivre la jeune femme, mais la main placée sur le mousqueton l'en empêcha et, après avoir secoué la tête, Break of Dawn esquissa un pas vers le côté et croisa les postérieurs, pivotant vers Lumi.
-Très bien ça !, s'exclama aussitôt celle-ci.
Un autre morceau de carotte vint récompenser la pouliche pour ce premier succès, puis Lumi lui fit répéter l'exercice. Elle se replaça face à la pouliche et refit un arc de cercle dans le même sens. Elle dut de nouveau s'aider du stick pour faire comprendre à Break of Dawn ce qu'elle attendait d'elle, et la baie s'exécuta, croisant de nouveau les postérieurs pour tourner sur elle-même sans bouger les antérieurs. Une fois encore, la jeune femme félicita immédiatement ce début de mouvement et donna une nouvelle friandise, avant de recommencer. Lumi réalisa une quinzaine d'essais, durant lesquels la pouliche était de plus en plus réactive à ses indications gestuelles. Sur les quatre derniers, elle put même retirer le toucher du stick et la jument pivota sans avoir besoin de cette aide supplémentaire. Sa propriétaire évitait de faire des pauses trop longues. Dès que Break of Dawn avait fini de mâcher un morceau de carotte, elle la remettait aussitôt dans l'exercice pour ne pas lui laisser le temps de songer à venir l'embêter ou la mordre. Et à la grande surprise de la jeune femme, la technique fonctionnait. La selle français était complètement concentrée sur les mouvements de ses hanches et n'avait même pas essayé d'attraper le stick une seule fois. Satisfaite de ce progrès et voyant que la jument avait compris le principe de l'exercice, Lumi changea de main et refit la même chose de l'autre côté. La pouliche ne bougea pas tout de suite, perturbée dans un premier temps par ce changement de direction. Lorsque la jeune femme posa le stick sur ses hanches pour lui indiquer qu'elle voulait le même mouvement dans l'autre sens, la baie tapa du postérieur, frustrée.
-Hé, du calme !, la corrigea Lumi.
Une fois la pouliche de nouveau détendue, elle reprit. Cette fois, le déclic se fit dans la tête de la jument, et elle pivota enfin dans l'autre sens. Une fois ce premier essai terminé, la jeune femme répéta l'exercice, réalisant une nouvelle série de quinze répétitions. Break of Dawn s'en sortit très bien. Ses mouvements se firent plus rapides et fluides, et elle semblait assimiler ce qu'on attendait d'elle de plus en plus. Pour s'assurer de sa compréhension totale, Lumi refit une nouvelle série de vingt pivots cette fois, dix de chaque côté, en alternant à chaque fois entre la gauche et la droite. La pouliche fit un sans faute et sa propriétaire parvint même à rajouter un peu d'amplitude à ses mouvements, la faisant réaliser deux croisements de membres postérieurs au lieu d'un seul, ce qui l'amenait presque à faire un quart de tour. Lorsque Lumi lui accorda enfin une pause, sa pochette à friandises était à moitié vide. La jeune femme s'avança pour flatter l'encolure de la pouliche tandis qu'elle mâchait son dernier morceau de carotte, et n'obtint en retour qu'un coup de tête dans le bras qui le repoussa. Lumi soupira. Il ne fallait pas non plus s'attendre à des miracles si tôt.
Après avoir laissé la pouliche souffler un peu, sa propriétaire décida de tenter un autre exercice de travail à pied relativement simple: le reculer. Elle récupéra l'attention de la selle français et se plaça de nouveau face à elle. Cette fois, elle laissa le stick derrière elle et décida de ne se servir que de ses mains. La longe dans la main droite, la tenant près de la boucle métallique, elle se servit de la gauche pour exercer une pression sur le poitrail de la baie. De l'autre main, elle tira légèrement la tête de Break of Dawn vers le bas, lui indiquant de reculer. Cette dernière ne le vit pas du même œil cependant, et d'un coup brusque, elle dirigea sa bouche vers l'épaule de Lumi. La jeune femme se déroba à la mâchoire de la pouliche de justesse, les dents se refermant sur son manteau. Aussitôt, elle attrapa le nez de Break of Dawn et lui retroussa les lèvres pour la faire lâcher.
-Stop, tu lâches !, lança-t-elle, élevant la voix pour être plus impressionnante.
Heureusement, la jument étant de bonne humeur depuis un moment ne tarda pas à obéir, et après un renâclement bruyant, elle se tint de nouveau tranquille. Lumi décida qu'il était trop risqué de s'y prendre de cette manière et ramassa de nouveau son stick. Elle refit un essai, se servant de l'outil pour exercer la pression sur le poitrail cette fois. Break of Dawn opposa une résistance mais, avec plusieurs répétitions, elle finit par céder et fit un seul pas en arrière. Lumi soupira et la félicita de vive voix, lui donnant cette fois deux morceaux de carotte au lieu d'un pour avoir fini par coopérer. Souhaitant aller un peu plus loin qu'un seul essai concluant, la jeune femme reprit son courage à deux mains et recommença. La pouliche semblait toujours imposer une phase de test où elle restait campée sur ses appuis, bien décidée à ne pas bouger, avant de finalement capituler et reculer d'un pas. Lumi dut donc faire preuve de patience, et en un quart d'heure elle ne parvint à répéter l'exercice que sept fois, et n'obtint qu'un seul pas en arrière de la part de la baie. Une amélioration, aussi petite soit-elle, restait un succès, alors la jeune femme se contenta du peu qu'elle arriva à obtenir sur cette séance. Si elle travaillait régulièrement avec Break of Dawn, nul doute qu'elle continuerait de progresser, autant au niveau du travail à pied que de sa relation avec la pouliche difficile.
-Toi et moi, on finira par se comprendre.», dit-elle en regardant Break of Dawn.
Lumi parvint à caresser furtivement le chanfrein de la baie avant de la mener vers la sortie du manège. Pas à pas, elle y arriverait, elle en était sûre.

Toujours plus haut

Lorsque Lumi entra dans le manège avec Sex Appeal, elle apprécia la douce chaleur qui y régnait. Le bâtiment était climatisé et cette fonctionnalité se révélait très agréable en cette fin d'automne où les températures chutaient. La jeune femme mit le pied à l'étrier et se hissa sur le dos de la jument. S'installant sur la selle, elle ajusta ses étriers, puis d'une pression des jambes sur les flancs de la monture, la fit avancer au pas.
Les obstacles avaient été installés en intérieur cette fois, pour éviter au duo de frissonner durant toute une séance dans la carrière. Owen les avait placés selon un parcours d'un concours de la saison sur lequel Lumi avait eu quelques difficultés, afin qu'elle travaille sur ses défauts. Elle avait choisi Sex Appeal pour cet entraînement. La jument avait commencé ses premiers concours et s'était révélée plutôt douée, comme l'avait prédit Lumi, ainsi que son ancien éleveur le lui avait indiqué. Cependant, les podiums n'avaient pas été si nombreux mais la jeune femme savait que ce n'était qu'une question de temps. Cela ne faisait même pas un an que la selle français lui appartenait, elles avaient encore du chemin à faire pour se comprendre parfaitement et être en harmonie lors d'un parcours.
Commençant par la détente comme avant chaque séance, Lumi fit tourner Sex Appeal dans la carrière au pas, puis au trot et au galop. Elle passa un bon quart d'heure sur cette étape, demandant aussi à la baie plusieurs changements d'allures et de main pour travailler ses transitions. Une fois sa monture bien assouplie, elle lui fit sauter un vertical relativement bas à plusieurs reprises. pour l'échauffer aussi sur ce mouvement. Puis, considérant la détente comme terminée, la jeune femme se mit en tête de commencer le fameux parcours. Elle fit passer la jument au galop de travail, puis réalisa un grand arc de cercle pour se mettre dans la trajectoire du premier obstacle. Elle laissa un peu de rênes à la baie, qui semblait bien déterminée à mener et accélérer. Sex Appeal aborda l'obstacle avec perfection et se propulsa par-dessus le vertical. Lorsqu'elle se réceptionna de l'autre côté, Lumi reprit les rênes plus en main et la jument renâcla, frustrée de ne pouvoir diriger le parcours. Sa cavalière ne lâcha pas cependant et malgré le mécontentement visible de la baie, elle la guida sur l'oxer suivant, ne lui donnant de l'ampleur qu'au moment du saut pour ne pas la gêner dans ses mouvements. Encore une fois, la selle français survola l'obstacle, Lumi en équilibre sur ses étriers, adoptant la bonne posture. Après celui-ci, un tournant relativement serré attendait le duo pour aborder un autre vertical. Tandis que Lumi tentait de le prendre de manière correcte sans trop perdre de temps, Sex Appeal lui arracha presque les rênes des mains et pivota brutalement, ce qui failli envoyer sa cavalière au sol. La jument, contente d'avoir pu faire ce qu'elle voulait, continua sur sa lancée et fit une petite accélération pour sauter le vertical. Ce n'est qu'après ce dernier que sa cavalière reprit le contrôle de sa monture, tirant sur les rênes et pestant contre son caractère discutable. Si la baie maîtrisait cette discipline, elle avait une confiance à toute épreuve qui pouvait s'avérer problématique, puisqu'elle ne se rendait pas compte qu'elle devait réaliser le parcours non pas toute seule, mais avec son cavalier. Et peut-être était-ce là l'origine de leur nombre réduit de podiums en concours. Il fallait que Lumi apprenne à la jument à la prendre un minimum en considération et à ne pas chercher à toujours ignorer ses indications.
Déterminée à ne plus se laisser faire par la baie, la jeune femme exerça un contrôle plus strict sur ses aides lorsqu'elle prit la direction d'un triple. Elle ne donna pas de rênes à Sex Appeal lorsqu'elle tenta de foncer sur le premier obstacle, et parvint à lui faire respecter le nombre de foulées souhaité. La jument passa le premier vertical avec aisance, enchaîna par le second, puis termina en poussant sur ses membres postérieurs avec puissance, franchissant le spa et donc le triple sans aucune faute. Cependant, une fois cet enchaînement terminé, elle exprima toute sa frustration en ruant, et Lumi dût s'accrocher encore une fois. Elle resta en selle et prit le temps de corriger la jument en ne lui laissant aucun répit et en réduisant ses possibilités de mouvement. Après quelques autres coups de postérieur, Sex Appeal sembla se calmer et elles purent reprendre le parcours. Aussi petite soit-elle, il s'agissait d'une victoire pour Lumi. Elle ne relâcha pas une seule seconde son attention malgré cela, et continua de diriger sa monture sur le parcours. Les deux verticaux suivants ne posèrent aucun problème, de même que l'oxer, que le duo franchit avec grâce et agilité. Plus elles avançaient sur le parcours, plus la jument se concentrait et acceptait d'écouter sa cavalière, qui la guidait sur chaque foulée. Lorsqu'un double se présenta au duo, Lumi parvint encore une fois à contrôler la baie et l'empêcher de se jeter sur l'obstacle. Sex Appeal bondit donc à une allure convenable par-dessus le premier, garda des foulées régulières avant de sauter le second, n'ayant toujours aucune faute au compteur sur ce parcours. Et cette fois, elle parvint à ne pas trop s'énerver contre Lumi. Elle fut même incroyablement docile sur la deuxième moitié du parcours. La baie semblait plus à l'écoute et moins sensible. Elle tournait comme Lumi le lui indiquait, cessant de faire ses dérapages ou pivots improbables, et gardait une allure constante à l'abord des obstacles, se retenant d'accélérer. Sa cavalière se rendit compte qu'il suffisait simplement de se faire respecter par la baie dès le départ pour obtenir ce qu'on voulait d'elle par la suite. Tout son potentiel était dissimulé derrière les mauvaises manières qu'elle avait développées, et maintenant qu'elle commençait à être en symbiose avec Lumi, il se pourrait que Sex Appeal parvienne enfin au niveau tant espéré.
C'est donc avec cette nouvelle vision et ce mode de travail qu'elles continuèrent la séance. La selle français bondissait, se propulsait par-dessus les obstacles comme si ils ne représentaient aucune difficulté pour elle, et la jeune femme sur son dos la suivait dans ses mouvements, l'aidant à chaque saut par sa posture et la guidant sur les trajectoires. La séance fut entrecoupée de petites pauses pour permettre à la baie de reprendre son souffle, mais en environ une heure, elles firent le parcours une dizaine de fois, chaque passage plus précis que le précédent, la motivation du duo étant grandissante. Lorsqu'elles s'arrêtèrent enfin et que Lumi mit pied à terre pour caresser la jument, la récompensant pour ses efforts et son obéissance, elle savait qu'elle venait de franchir une première étape avec la baie. Maintenant qu'elle parvenait à comprendre son fonctionnement et à trouver des compromis pour que la séance soit agréable pour tout le monde, elle ne pourrait qu'aller de l'avant avec Sex Appeal. Elle avait hâte de voir de quoi elles seraient capables ensemble aux prochaines compétitions.

Gérer son environnement

Owen n'avait pas l'habitude de ce genre de choses. L'entraîneur avait eu l'occasion de monter de nombreux équidés, et encore plus ceux de son domaine, mais jusqu'à ce jour, il n'avait jamais vécu une expérience comme celle-ci. Lumi avait inscrit Vatican à un concours de saut cet hiver, et sa compagne étant enceinte, Owen était donc obligé de la remplacer. Cependant, le haras organisant la compétition se trouvait bien plus loin que ne le pensait le brun, et c'est donc plein d'inquiétude, malgré les paroles rassurantes de Lumi, qu'il avait pris la route en plein milieu de la nuit, la laissant seule avec Ellie, pour se rendre sur place. Il était arrivé vers midi et après plusieurs heures de repos, s'était levé pour aller voir Vatican.
L'équidé avait été pris en charge par les palefreniers dès que le van avait été garé, et il se trouvait dans un box de l'écurie, visiblement un peu tendu. Le concours n'avait lieu que le lendemain, mais Owen songea qu'un petit entraînement ne pourrait pas lui faire de mal. Il n'était pas le cavalier attitré de Vatican et devait également s'habituer à cette nouvelle monture pour ne pas faire de résultats catastrophiques. C'est donc avec motivation que le jeune homme sella l'étalon et le mena jusqu'au manège, que le haras laissait en libre accès. Des obstacles s'y trouvaient déjà, le personnel ayant sans doute prévu que les participants voudraient s'échauffer avant le grand jour. Owen n'eut donc qu'à mettre le pied à l'étrier, puis à se hisser sur le dos du gris. Sous la selle, le selle français semblait mal à l'aise. Il lançait des regards aux alentours, inquiet par ce nouvel environnement après un trajet si long et plusieurs heures passées dans un box totalement inconnu. Son cavalier décida donc de le mettre au travail avant qu'il ne se fige complétement. Il pressa les flancs de l'étalon à l'aide de ses jambes, et après une hésitation, Vatican commença à avancer au pas. Bouger sembla le rassurer un peu, bien qu'il garde les oreilles en arrière et continue de scruter le manège. Mais Owen garda une main ferme sur les rênes et le guida sans se déconcentrer.
La détente fut assez rapide. Le trentenaire fit tourner sa monture au pas, puis au trot et enfin au galop, décrivant de grands cercles dans le manège, passant parfois près des obstacles pour que le cheval s'habitue à leur disposition et leur présence. Owen demanda aussi quelques transitions au gris, passant d'une allure à l'autre ou changeant de main. Dans l'ensemble, Vatican suivit toutes ses directives, s'appliquant sur ce qu'on lui demandait et s'exécutant de manière rapide et précise. Se mettre au travail eut un bon effet sur lui, et Owen sentit que l'étalon s'était un peu détendu. Il était moins crispé dans ses mouvements et ses foulées se firent aussi plus régulières. Le brun décida donc qu'il était prêt à passer aux sauts.
Il mena Vatican sur un large arc de cercle, préparant l'abord d'un premier obstacle. Le selle français avançait d'un galop de travail rythmé, concentré. Il arriva face au vertical avec un angle parfait et sauta par-dessus avec agilité, son cavalier suivant son mouvement et adoptant la bonne posture. Le duo atterrit de l'autre côté de l'obstacle sans accroc, et Owen fut soulagé de voir que tout se passait bien pour l'instant. Sans prendre de répit, il mena donc le gris sur l'obstacle suivant. Il n'avait pas de parcours précis en tête et se contentait de diriger sa monture sur l'obstacle dont l'abord lui paraissait le plus intéressant - pas trop simple, ni trop compliqué - afin d'improviser un itinéraire qui leur permettrait de s'exercer un peu. Le cheval suivait les ordres, se laissant guider vers l'oxer qu'Owen avait choisi. Le gris prit ses appuis et, d'un bond puissant, franchit les barres sans les toucher. Une fois de l'autre côté, son cavalier regarda dans tous les sens, ne sachant se décider sur quelle direction prendre. Et alors qu'il avait presque choisi, Owen faillit passer au-dessus de l'encolure d'un Vatican perdu qui venait de freiner des quatre fers. Le brun se redressa et replaça correctement sa bombe, qui avait un peu glissé en avant lors de l'à-coup. Puis, il tapota l'épaule de sa monture, qui s'agitait sur place. Il fallu près de trente secondes à Owen pour convaincre l'étalon de se remettre en route, à force de paroles rassurantes et d'insistance. Lorsque le selle français reprit enfin le galop, son cavalier avait retenu la leçon et donna des directives claires, suivant son instinct sans réfléchir à la suite. Il emmena ainsi son cheval sur les trois obstacles suivants: un spa, puis un double composé de deux verticaux. Le gris les franchit avec aisance, reprenant petit à petit confiance en lui. L'oxer qui servirait de cinquième obstacle passa plus difficilement, Owen manquant de précision dans ses gestes, ce qui manqua de peu de provoquer un autre arrêt brutal de la part de l'étalon. Il se reprit cependant de justesse sous les encouragements de son cavalier et passa par-dessus. Ses sabots frôlèrent un barre, mais celle-ci resta en place. La suite du parcours ressembla un peu plus à ce qu'Owen attendait de leur duo. Il veillait à rester clair dans ses demandes, et Vatican lui faisait confiance et cessait de laisser la confusion l'envahir au moindre doute. Le selle français enchaîna les obstacles, ses muscles en plein développement l'emmenant par-dessus les barres grâce à des foulées bien gérées et des sauts agiles et calculés. Son cavalier actuel songea que le gris avait énormément de potentiel, et si il parvenait à travailler de la sorte avec lui, nul doute que Lumi accomplirait des miracles lorsque le cheval serait un peu plus expérimenté et âgé.
C'est après environ une vingtaine de sauts, tous plus harmonieux au fil de la séance, qu'Owen fit ralentir Vatican. L'étalon commençait à haleter et le brun ne voulait pas trop le fatiguer pour le concours du lendemain. Il avait fait du très bon travail et son cavalier avait maintenant l'assurance qu'ils pourraient réaliser un beau parcours ensemble. Et, surtout, le selle français avait réussi à surmonter son appréhension et à travailler dans un cadre totalement inconnu pour lui. Cette séance improvisée se révélait donc bénéfique sur tous les aspects. Owen mit donc pied à terre et il caressa le chanfrein du gris pour le récompenser. Puis, il le mena hors du manège et vers l'écurie, où il refusa l'aide d'un jeune palefrenier pour panser lui-même l'étalon. Lorsqu'il eut terminé, Vatican était désormais plus calme et prêt, autant mentalement que physiquement, à affronter l'épreuve qui les attendait.

Prendre conscience de son corps

Lumi amena Break of Dawn dans le manège. Attachée avec une longe reliée à un simple licol, la jument était surexcitée. La séance s'annonçait déjà difficile et sa propriétaire dut prendre une grande inspiration pour se motiver. Au moins le défi la réchaufferait en cette froide journée d'hiver. Au programme aujourd'hui: proprioception. La jeune femme avait songé que se concentrer sur son propre corps aiderait la baie à être plus appliquée au travail. De plus, elle avait vu en travaillant à pied avec elle la dernière fois que Break of Dawn avait tendance à être moins pénible lorsqu'elle mettait toute son énergie dans la compréhension et la réalisation d'un nouvel exercice.
Lorsqu'elles entrèrent dans le bâtiment, le peu de matériel nécessaire était déjà en place. Quatre barres étaient posées au sol, formant un carré. C'était là tout ce dont Lumi avait besoin pour sa séance. Elle guida la jument vers les objets, avançant à un rythme soutenu pour ne pas lui laisser le loisir de tenter de lui attraper la veste ou la longe. Puis, une fois au niveau des barres, elle accorda à la selle français quelques minutes, pendant lesquelles elle renifla et examina longuement les barres. Lorsqu'elle commença à s'en désintéresser, Lumi se mit immédiatement au travail. Elle avait prévu un exercice reprenant les bases abordées en travail à pied. Break of Dawn ne maîtrisant pas encore assez le reculer, elles travailleraient avec les rotations des hanches, sur lesquelles elle se débrouillait déjà un peu mieux. Le but de l'exercice était de faire le tour du carré sans toucher les barres, et de réaliser chaque virage avec une transition demandant à la jument de tourner sur elle-même pour se remettre dans l'axe du côté suivant. La difficulté était que le cheval ne pouvait taper dans les barres durant cette manœuvre, ce qui serait délicat. Mais Lumi avait foi en Break of Dawn. Elle s'était bien débrouillée jusqu'à maintenant et elle savait qu'elle était sur la voie du progrès. Elle espérait cependant que Sasha aurait les compétences pour la remplacer lorsqu'elle ne pourrait plus travailler la jument elle-même dans quelques mois. Et que Break of Dawn ne lui ferait pas en voir de toutes les couleurs. De toute façon, Lumi n'aurait pas le choix.
Se concentrant de nouveau sur le présent, la jeune femme commença à faire marcher Break of Dawn autour du carré. Pour le moment, elle ne lui demanda pas de pivoter à chaque coin et se contenta d'attendre d'elle des virages serrés et précis pour qu'elle comprenne la base du travail. Break of Dawn suivit docilement pendant les deux premiers tours puis, vite ennuyée par cet exercice répétitif, elle tenta d'attraper la longe avec ses dents. Lumi, qui la surveillait toujours du coin de l'œil, la repéra et parvint à donner un coup sec sur la corde pour la mettre hors de portée de la bouche de la jument. Elle gronda cette dernière, qui plaqua les oreilles sur son crâne mais ne se rebella pas plus que cela. Elles purent reprendre après cette courte interruption. L'ennui de la jument se fit vite ressentir de nouveau lorsqu'elle commença à traîner volontairement le pas et à cesser de soigner ses mouvements lorsque Lumi la faisait tourner. Sa propriétaire prit cela pour un signe qu'elle devait aborder l'exercice complet avant de perdre totalement l'attention de la baie. Elle raccourcit la longe et se lança de nouveau dans un tour de carré. Une fois arrivée au premier coin, elle se plaça face à la jument et répèta les ordres et gestes qu'elle lui avait enseigné la dernière fois. Break of Dawn sembla confuse pendant une courte seconde, puis elle s'exécuta et commença à pivoter sur ses hanches tout en suivant l'axe du coin. Comme Lumi s'y attendait pour le premier essai, la selle français tapa dans la barre avec ses membres antérieurs. La jeune femme ne lui en tint pas rigueur et se contenta de faire demi-tour, pour amener de nouveau la jument face au même virage. Elle répéta ses ordres, redonna les mêmes indications, et la baie refit son erreur. Après un troisième, puis quatrième essai infructueux et sans aucune récompense pour Break of Dawn, cette dernière commença à s'agacer et se décida enfin à se concentrer et surtout à réfléchir à ce qu'on lui demandait. Elle s'appliqua dans ses pivots, procédant parfois plus lentement, avec précaution, et après quelques tentatives, parvint enfin à en réaliser un parfait. Elle se plaça exactement sur la trajectoire du côté suivant après sa rotation, et aucune barre ne bougea cette fois. Lumi félicita grandement la jument, la récompensant et la caressant, ne s'attardant pas trop sur cette dernière attention qui pouvait donner envie à la baie de mordiller la main qui se trouvait à sa portée.
Revigorée par ce premier succès de la séance, Lumi reprit ensuite l'exercice. Il fallut de nouveau plusieurs essais au coin suivant, mais Break of Dawn fut plus rapide et précise dans ses mouvements, ce qui lui permit de réussir plus rapidement cette fois. Une fois l'exercice bien compris et assimilé par la jument, la suite de la séance fut beaucoup plus tranquille. Lumi ne voulait pas travailler trop longtemps de peur de frustrer Break of Dawn. Elle se contenta donc de continuer ses tours de carré, guidant la baie sur le parcours et lui demandant le fameux pivot à chaque changement de direction. Elles enchaînèrent ainsi une bonne quinzaine de tours, jusqu'à ce que les mouvements de l'équidé soient fluides et qu'elle n'hésite plus avant de tourner. Malgré la monotonie de l'exercice, Break of Dawn semblait apprécier toutefois la nouveauté, et elle eut un comportement irréprochable jusqu'à ce que Lumi ne décide de s'arrêter. Récompensant une dernière fois la jument, elle la ramena sans trop tarder dans son box, satisfaite des progrès accomplis en ce jour. Il n'y avait presque pas eu de débordement de la part de la baie, et elle ne cessait de s'améliorer. Bientôt, elle pourrait envisager de commencer son débourrage monté. Ou plutôt de le confier à quelqu'un plus apte qu'elle, car elle ne souhaitait pas prendre trop de retard sur celui-ci en attendant d'être de nouveau capable de se mettre en selle.
Malgré son projet de débourrer la jument cette année, Lumi savait que tout dépendrait de ses progrès et de son acuité à la faire travailler et à corriger ses problèmes comportementaux. Et la jeune femme allait tout faire pour remplir cet objectif.

Le début des choses sérieuses

C'était pleine d'impatience que Sasha était arrivée à Pandora Hills ce matin. Elle allait enfin pouvoir monter l'un des chevaux de l'élevage. Elle n'avait pas perdu une minute à son arrivée. Elle était allée s'occuper des tâches du matin, puis, suivant les indications laissées par le couple de propriétaires qui étaient absents -à un rendez-vous médical si la jeune femme se souvenait bien- elle était allée chercher le beau Naughty Boy dans son box. Seller le bai avait été un jeu d'enfant, puis elle l'avait ensuite mené par les rênes jusqu'au manège. Le selle français de sept ans était visiblement de bonne humeur, suivant sa cavalière du jour d'un pas vif. Sasha était surexcitée à l'idée de cet entraînement. Bien sûr, ce n'était rien de bien compliqué et le couple ne lui avait pas confié de tâche trop importante, ce qu'elle comprenait. Elle ne travaillait ici que depuis quelques semaines seulement et elle devait encore prouver ses valeurs. En ce jour, elle se contenterait donc de suivre les ordres et de faire travailler l'étalon sur une séance de plat, pour le dépenser un peu. L'hiver pouvait être long sur le domaine, la plupart des équidés étant moins sollicités pendant cette période.
Pénétrant dans le manège, Sasha veilla à bien en refermer la porte, bloquant ainsi les bourrasques qui tentaient de s'engouffrer dans le bâtiment. Puis, elle revérifia les sangles de la selle et ajusta de nouveau les étriers. Quand elle fut satisfaite de ces dernières corrections, elle se hissa sur la selle. Naughty Boy n'était pas le plus grand cheval qu'elle ait pu monter. Il devait faire à peu près la taille de Démon, aussi être sur son dos ne l'impressionna pas. Elle s'installa confortablement, resserra la sangle de sa bombe en s'assurant qu'elle soit bien en place. Owen l'avait averti que le bai pouvait avoir quelques moments de folie, bien qu'il se soit apparemment bien calmé avec les années. Mais dans tous les cas, que ce soit pour son propre bien ou son image au domaine, Sasha ne tenait pas à chuter dès son premier entraînement. C'est donc après plusieurs minutes de préparation qu'elle décida enfin qu'elle était prête à commencer. Elle pressa les flancs de Naughty Boy à l'aide de ses jambes et celui-ci se mit aussitôt à avancer, légèrement agacé par la lenteur de cette mise au travail. Malgré son impatience visible, il resta cependant respectueux et garda le rythme imposé par sa cavalière, posant un pied après l'autre sur la piste, suivant la trajectoire donnée par les rênes. Il avait des mouvements fluides et agréables, et Sasha fut soulagée de le voir dans une bonne disposition dès les premières minutes. Elle continua de guider le selle français dans le manège, lui faisant réaliser plusieurs tours et figures diverses à travers l'espace qu'ils avaient. Elle le garda au pas pour le moment, prenant le temps qu'ils s'habituent l'un à l'autre. Naughty Boy était parfaitement à l'écoute et semblait réagir immédiatement à la moindre demande. Bien loin de ce dont Sasha avait l'habitude avec Démon, bien que l'étalon ait parfois des bons jours où il se montrait irréprochable pour une raison obscure. Mais Démon n'était pas celui dont elle devait se soucier en ce moment.
Sasha se reconcentra sur Naughty Boy, qui était toujours aussi docile. Elle lui demanda encore quelques minutes de pas, avant de décider de passer à l'allure supérieure. Talonnant le bai, elle parvint à obtenir un passage au trot dès le premier essai. Aussitôt, elle s'activa dans ses mouvements pour suivre ceux de sa monture, afin d'être en harmonie et en rythme avec le bai. Elle y parvint sans trop de mal et comme précédemment, le guida sur la piste dans diverses directions, travaillant sa réactivité et sa vitesse de changement de direction. Maintenant un peu plus à l'aise et ayant assimilé le fonctionnement et les mouvements du selle français, Sasha introduit aussi quelques changements de main à l'entraînement, qui passèrent sans trop de difficulté. Naughty Boy était vraiment une monture agréable, et la séance se déroulait pour l'instant sans le moindre accroc. Sasha remarqua d'ailleurs que le trot de l'étalon possédait une certaine élégance. Cependant, elle avait cru comprendre que les chevaux du domaine n'étaient pas entraînés en dressage plus que cela. L'élevage se concentrait sur le saut d'obstacle, ou le cross à certaines occasions. La jeune femme trouvait cela dommage en voyant les allures du bai et elle songea qu'elle pourrait peut-être essayer d'initier les équidés du domaine à cette discipline lorsqu'elle en aurait l'occasion. En tout cas, avec sa grâce naturelle, Naughty Boy avait une bonne prestance actuellement. Sasha continua donc de le faire tourner au trot, lui faisant réaliser des petits cercles de temps en temps pour tester la souplesse de ses membres. Nul doute qu'il avait du potentiel. Passant à un exercice totalement différent, elle lui demanda plusieurs transitions d'allures. Elle lui fit d'abord allonger le trot, puis le fit ralentir jusqu'à un retour au pas, avant de le refaire accélérer de nouveau pour revenir à l'allure précédente. Naughty Boy parvint à garder le rythme, réagissant presque instantanément, réalisant des transitions nettes et jolies.
Alternant entre les différents exercices, Sasha ne vit pas le temps passer. Lorsqu'elle décida finalement d'inclure le galop de travail dans la séance, cela faisait déjà quarante minutes qu'ils s'exerçaient. Cependant, ni elle ni Naughty Boy ne semblait lassé ou fatigué, alors elle décida de prolonger la séance encore un peu. Le galop du bai se révéla, tout comme ses autres allures, régulier et fluide. Il ne secouait pas sa cavalière et suivre ses mouvements était aisé. Sasha était de plus en plus conquise par l'étalon, qui était sans doute la monture la plus agréable qu'elle ait pu avoir. Si tous les chevaux du domaine possédaient la même obéissance, elle allait vraiment pouvoir s'amuser cette année en les entraînant. La cavalière guida de nouveau le cheval sur différentes directions et figures très simples au galop, consistant en beaucoup de courbes et de changements de main. Elle demanda aussi à Naughty Boy quelques passages du galop au trot, et inversement. Une heure était passée désormais et le duo continuait de progresser dans le manège, le sable se soulevant légèrement sur leur passage. Ce n'est que lorsque le bruit d'une voiture se garant dans la cour résonna dans le manège que Sasha fit repasser le selle français au pas et regarda finalement sa montre. Cela faisait presque une heure et quart que la jeune femme montait le bai. Il était plus que temps de le ramener à l'écurie pour le panser avant de le laisser se reposer.
Mettant pied à terre, elle félicita avec énergie Naughty Boy pour cette séance, lui tapotant l'épaule et flattant son encolure. Puis, elle commença à se diriger vers la sortie du manège, guidant l'étalon. Lorsqu'elle sortit, elle aperçut le couple qui entrait dans leur maison. Owen se retourna, l'aperçut et lui fit un signe de la main, qu'elle lui rendit. Elle savait qu'il viendrait probablement s'enquérir du déroulé de l'entraînement dès que sa femme et sa fille seraient confortablement installées. En attendant, elle ramena sa monture à l'écurie et, après l'avoir débarrassé de son équipement, entrepris de le panser. Les choses sérieuses commençaient seulement pour Sasha, et elle était impatiente de voir les prochains chevaux qu'on lui confierait.

Un début à tout

La journée pluvieuse de ce début du mois de septembre avait obligé Sasha à opter pour le manège plutôt que la carrière pour cette séance de travail. Ce changement n'était pas pour déplaire à la brune, qui préférait la sécurité d'un endroit fermé pour le programme de ce jour. Menant son cheval par la bride, elle pénétra donc dans le bâtiment, les vêtements déjà humides d'avoir seulement traversé la cour. Elle se tourna vers l'équidé qu'elle tenait. Démon était d'apparence calme pour une fois, ce qui pouvait être un très bon signe comme un très mauvais. Elle ne savait jamais à quoi s'attendre avec l'étalon. De toute façon, elle s'en rendrait vite compte une fois sur la selle. Mais dans tous les cas, elle priait intérieurement pour que le selle français soit dans un bon jour, car elle allait le tester en saut. Il était plus que temps qu'elle s'adonne à la discipline de prédilection de Pandora Hills avec Démon, et ce jour était arrivé. La jeune femme avait demandé à Owen si il pouvait lui installer un parcours d'initiation et le propriétaire des lieux avait gentiment accepté. Désormais sur place, Sasha observait le parcours en question. Un enchaînement de cavalettis avait été placé au fond du manège pour les premiers pas dans la discipline, et le reste était composé de simples verticaux relativement bas. Rien de compliqué pour Sasha, mais cela restait à voir pour Démon.
Prenant appui sur un tabouret, Sasha mit le pied à l'étrier et se hissa sur le dos de son cheval. L'étalon resta immobile, toujours aussi calme depuis qu'elle était allé le chercher dans son box. Une fois les derniers ajustements faits et bien installée sur sa selle, la cavalière talonna prudemment le noir et ce dernier se mit à avancer au pas, docile pour le moment. Rassurée par son obéissance et son tempérament en ce jour, Sasha se détendit un peu et ses mains furent moins crispées sur les rênes. Tandis qu'elle guidait sa monture sur la piste, elle était déjà un peu plus confiante. Elle commença la séance comme toutes les autres, par quelques minutes de détente. Elle mena Démon à travers tout le manège aux trois allures, le faisant alterner régulièrement entre elles et réalisant des figures basiques destinées à assouplir les membres de l'étalon avant de commencer le vrai travail. Durant toute cette séquence, le selle français suivi les ordres sans protester, concentré sur ses mouvements. Quand elle sentit le noir suffisamment échauffé, Sasha décida de passer aux choses sérieuses.
Elle commença par les cavalettis. La brune mena sa monture au trot sur l'enchaînement, et Démon s'avança avec détermination. Il passa les barres avec quelques difficultés, tapant dans plusieurs d'entre elles et s'emmêlant dans ses mouvements. Sasha le félicita tout de même d'une petite tape sur l'épaule pour l'effort fourni, afin que le noir ne se frustre pas. N'abandonnant pas sur ce petit échec, le duo recommença l'exercice. Il fallut une dizaine d'essais pour que le selle français parvienne enfin à coordonner ses mouvements et à franchir tous les cavalettis. Sa cavalière le félicita grandement avant de recommencer à nouveau. Maintenant que l'exercice était compris, Démon enchaîna les passages sans faute, de plus en plus à l'aise à chaque fois. Au bout d'un quart d'heure passé sur les cavalettis, Sasha était assez confiante pour mener Démon vers les verticaux. Elle n'avait encore jamais sauté avec le selle français et elle ressentait un mélange d'excitation et de peur à cette idée. Se concentrant tout de même, elle fit passer le noir au galop de travail. Elle l'amena lentement vers le premier vertical, lui faisant d'abord réaliser un grand tour de piste au galop pour qu'il prenne une foulée régulière. Puis, elle le mena vers l'obstacle avec une courbe calculée. Démon ne ralentit pas, ne montra pas la moindre hésitation à l'abord du vertical. Il prit appui sur ses membres postérieurs et d'une poussée un peu trop important pour la hauteur de l'obstacle, il se propulsa par-dessus les barres. Son saut n'avait rien d'élégant, mais il avait le mérite de l'amener de l'autre côté sans toucher les barres. Mais le saut étant très grossier et beaucoup trop puissant pour un si petit obstacle, la réception fut tout aussi brutale. Démon secoua littéralement sa cavalière en atterrissant de l'autre côté, et celle-ci dut s'accrocher pour ne pas passer au-dessus de l'encolure du noir. Elle se repositionna rapidement sur sa selle avant de reprendre les commandes. Sasha continua à mener sa monture sur les différents verticaux. Le selle français manquait clairement de pratique, tout débutant qu'il était, mais l'envie et la motivation étaient bien présentes et il donnait tout ce qu'il avait à chaque saut. Au bout d'un moment, il sembla comprendre l'importance de s'économiser tout de même et commença à réguler la puissance de ses bonds par rapport à la hauteur des barres. Même si ce n'était pas parfait, il commençait à s'appliquer et Sasha était heureuse de voir la séance se dérouler de la sorte. A son grand soulagement, elle constatait aussi qu'elle avait choisi un bon jour pour initier le selle français. Effectivement, il était d'une humeur incroyable, à l'opposé d'autres journées où il se révélait exécrable.
Après une bonne heure entrecoupée de petites pauses, Sasha avait une bonne idée des capacités de Démon. Il serait un très bon cheval de CSO avec l'entraînement nécessaire. Il n'avait fait tomber que quelques barres durant cette première initiation et avait beaucoup de volonté sur le parcours. C'est sur un dernier tour de piste qu'elle termina la séance, flattant l'encolure du noir. Elle mit pied à terre avec un grand sourire. Décidément, la chance lui souriait sur tous les fronts ces derniers temps. Heureuse, elle s'occupa de ramener Démon et de ranger le parcours avec une énergie nouvelle.

Obstacle à cru

Lumi avait été prise d'une folie soudaine en cet après-midi de septembre lorsque, en allant chercher Vatican pour travailler, elle décida de ne mettre ni tapis, ni selle. La jeune femme avait déjà monté à cru, mais c'était il y a fort longtemps, et jamais pour du saut. Mais elle pensait que cette idée pourrait lui permettre d'améliorer son équilibre et sa tenue sur le dos de son partenaire équin. Il s'agirait d'une première pour Vatican cependant, et elle avait hâte de voir comme il se débrouillerait. Menant le gris jusqu'au manège, elle lui tapota l'encolure avant de se mettre en selle avec quelques difficultés, se hissant uniquement à la force des bras. Elle parvint quand même à son objectif et une fois sur le dos du selle français, elle observa quelques instants ses réactions. Perturbé, Vatican ne cessait de lui jeter des regards inquiets, les oreilles pliées vers l'arrière mais pas encore plaquées sur son crâne. Il semblait incertain du comportement à adopter. Chatouilleux sur les bords, des petits spasmes le parcouraient à chaque micro-mouvement de sa cavalière, la selle n'étant pas là pour leur faire barrière. Mais Vatican était un cheval bien élevé et il faisait tout son possible pour garder une attitude calme et digne. Lorsque sa monture sembla s'être un peu plus habituée à ce changement, Lumi la talonna doucement pour la faire avancer. L'étalon fit un pas, hésita un court instant, puis se mit finalement à marcher d'un pas régulier. Sur son dos, Lumi serrait les jambes pour rester en place et essayait d'atténuer au maximum le ballotement causé par la démarche du gris. Elle n'eut pas trop de mal à retrouver ses vieux réflexes et elle fut bientôt en harmonie avec les mouvements de sa monture. Une fois tous les deux à l'aise, la jeune femme poussa l'étalon à l'allure supérieure. Vatican se mit aussitôt à trotter et sa cavalière serra davantage les jambes tandis qu'elle bondissait en rythme sur le dos du gris à chacune de ses foulées. Ce mouvement perturba Vatican qui, au bout d'à peine quelques mètres, s'arrêta brutalement. Lumi partit vers l'avant et se cogna le menton dans l'encolure du gris, mais resta en place. Elle se repositionna correctement tout en rassurant l'étalon, puis le remit au trot. Cette fois Vatican parvint à maintenir son allure sans se laisser dépasser par le côté inhabituel de la séance. Le duo put être plus à l'aise lorsqu'ils passèrent au galop et que Lumi accompagna davantage le gris dans ses mouvements.
Après quelques tours à cette allure et une fois Vatican prêt, Lumi commença à lui faire réaliser un grand cercle pour aborder le premier obstacle du parcours qu'elle avait installé au préalable. Comme elle montait à cru, elle n'avait mis que des verticaux relativement bas et abordables. Elle se dirigea vers l'un d'eux, sa monture progressant au petit galop. Ils arrivèrent face à l'obstacle et Lumi y crut jusqu'à la dernière foulée. Mais, au moment de sauter, Vatican freina des quatre fers. Il resta devant la barre tandis que sa cavalière passait l'obstacle la tête la première, allant s'étaler dans le sable de l'autre côté. Elle se redressa aussitôt et épousseta ses vêtements, avant d'aller rassurer Vatican qui trépignait. Puis, elle remonta sur son dos et, persévérante, retenta le coup. Le gris fit un deuxième refus mais cette fois, sa cavalière étant préparée à cette éventualité, elle parvint à rester sur le selle français. Et elle recommença. Encore et encore, enchaînant les refus, les écarts de l'étalon qui refusait catégoriquement de sauter lorsqu'il était monté à cru. Lumi était patiente, mais elle avait aussi ses limites. Au bout de ce qu'elle pensait être le dixième échec, elle talonna un peu le gris à l'approche de l'obstacle, le poussant à accélérer et à sauter cette fois. Et sa tentative fonctionna. Vatican bondit avec une puissance jamais vue, se jetant littéralement par-dessus la barre. Rien dans son saut n'était gracieux, et la posture de Lumi dont les jambes avaient manqué de force au point culminant annonçait un atterrissage tout aussi élégant. Tel un boulet, Vatican se réceptionna avec lourdeur de l'autre côté, bien plus loin que nécessaire pour une barre aussi basse. Lumi rebondit sur son dos et, tandis que le gris repartait au galop derrière, elle n'eut aucune bouée de secours. Elle chuta pour la seconde fois de la séance, en arrière cette fois, et son dos vint heurter le sol tandis qu'un nuage de poussière s'élevait autour d'elle. La jeune femme se redressa sur ses coudes et regarda son cheval qui se trouvait à l'autre bout du manège désormais. Elle soupira, se releva et alla le récupérer. Puis, fatiguée de cette séance catastrophique à cause de son idée stupide, elle alla rentrer le selle français sans même ranger les obstacles.