Première partie, deuxième partie

Elles se sont arrêtées à l'écurie pour une dizaine de minute afin que Marie change le licol d'Everglade pour un filet à mors double brisure. Elle n'a pas sanglé la selle très serré, juste assez pour la tenir en place le temps qu'elles se rendent au rond de longe. Elles arrivent au rond de longe désert vers 10h du matin. Elle retire la selle et la place sur la barrière du rond de longe, préférant longer sans selle pour commencer. Everglade est toujours vaillante, volontaire, et Marie s'inquiète un peu de la faire travailler trop pour une journée. Elle se rassure en voyant l'enthousiasme avec lequel Everglade se déplace en piste une fois que Marie est installée au milieu.

Équipée d'une chambrière et de sa bombe, Marie se donne le temps de bien prendre la longe dans ses mains, et de s'installer, tandis que la jument marche d'un bon pas. Elle ajuste la longueur de ses propres pas pourêtre sur la même cadence qu'elle. Marie repasse dans sa tête les mouvements à faire pour changer de direction. Elle garde un oeil sur la jument, qui semble bien connaître ce qu'elle a à faire, et rassemble la longe dans une main. Elle passe la chambrière dans sa main maintenant libre, et mets une tension dans la longe en disant à Everglade de s'arrêter.

Marie avance d'un pas, puis recule en tournant légèrement le haut de son corps vers la direction opposée de celle où Everglade était avant. La jument hésite un instant, puis s'engage vers Marie, qui ouvre un corridor avec ses bras pour la remettre sur le cercle. Everglade prend son temps, mais reprends le pas avec un petit peu d'encouragement. Le sourire de Marie rayonne, elle est si fière d'elle-même; première transition réussie!

Pour garder l'attention d'Everglade, Marie raccourci la longe afin de lui faire rapetisser son cercle. Elle l'encourage de la voix à garder un pas actif, tout en s'assurant qu'elle ne se fatigue pas trop vite. La jument garde une oreille attentive vers elle, mais elle n'a pas l'air très émoustillée par ce travail au pas. Marie élargit son cercle encore, puis se prépare mentalement à la faire passer au trot. Everglade accélère son pas, mais refuse de trotter. Marie augmente la pression en pointant la chambrière vers son épaule. La jument relève la tête et prends un trot lent. La jument n'est ni essoufflée, ni déséquilibrée, mais simplement blasé semble-t-il, alors Marie met plus d'intonation dans sa voix en la ramenant au pas. Everglade retombe au pas, mais Marie ne la laisse pas ralentir, l'encourageant de la voix pour qu'elle garde une cadence rythmée.

Marie la fait changer de main encore, cette fois c'est plus fluide, et dès qu'Everglade est recentrée, elle lui demande le trot. La jument obtempère avec l'entrain que Marie lui connaît, et elle sourit. Elle la fait trotter seulement pour quelques instants, à peine un tour complet. Marie ne se sent pas assez à l'aise encore pour lui demander plus, surtout qu'elle est encore gauche dans ses directives à pied et ne veut surtout pas ruiner le travail fait par les autres en longe. Everglade mâchonne son mors sans grand effort, l'encolure allongée et les foulées relaxées. Marie l'arrête et laisse tomber la chambrière dans le sable, un grand sourire aux lèvres.

« Tu me fais passer pour meilleure que je suis, tu sais? » Marie lance-t-elle à la jument qui s'est arrêté face à elle. « Tu penses qu'on peut se faire une petite séance en selle? Mh? Ça te dit? »

Elle s'approche de la jument et lui caresse le chanfrein. Tout de suite, Everglade baisse le nez et se frotte contre elle, yeux fermés et oreilles molles. Marie lui prends la tête et lui gratte les joues en rigolant. Elle décide d'offrir à la ponette un moment de détente avant leur monte, et lui retire filet et mors avec délicatesse. Libre, la jument redresse la tête avec un air un peu incrédule, puis déguerpi au grand trot pour faire un cercle autour d'elle. Marie se replace au centre, et regarde la jument se dégourdir les jambes jusqu'à ce qu'elle trouve le meilleur endroit où se rouler. Elle soupire; au revoir la belle robe lustrée, bonjour le tapis de sable! Everglade se secoue et réussi à faire tomber le plus gros. Marie l'appelle vers elle, mais Everglade n'est pas dupe, et reste à bonne distance, ce qui la fait bien sourire. Elle l'appelle encore, et tapote ses jambes, comme si elle incitait un chiot à venir la voir. Ça fonctionne aussi sur les ponettes curieuses, car la jument s'approche en faisant aller sa tête de gauche à droite mollement. Marie fouille dans sa poche pour trouver un cube de sucre, et l'offre à Everglade.

« Bon, allez, si on tarde trop, je n'aurai pas le temps de te masser avant de partir! »

Marie remet le filet à Everglade, puis la selle, qu'elle sangle cette fois-ci. Les étriers sont raccourcis pour ne pas pendre et cogner contre les flancs de la ponette. Marie a enroulé la longe et la passe sur son épaule avant de raccrocher les rênes au mors puis de quitter le rond de longe.

Première partie

Elles arrivent au rond de longe avec des fourmis dans les orteils, toutes les deux excitées de finalement se remettre au travail. Everglade l’a même bousculée un peu pendant leur court trajet, tellement elle est heureuse de savoir qu’elle va travailler. Marie est un peu nerveuse parce qu’elle n’a pas longé depuis longtemps, et déjà, elle n’avait pas beaucoup d’expérience avec un cheval bienveillant, mais là, Everglade semble avoir du feu dans les veines. La ponette trépigne tandis que Marie ouvre la barrière, et elles entrent sur le sable fraîchement ratissé. La brise est fraîche et le soleil tape fort, mais Marie ne se concentre sur rien d’autre que sur Everglade. La jument reste près d’elle, mais il est facile de voir qu’elle a envie de se lancer en piste tout de suite.

Marie a utilisé la longe pour mener Everglade jusqu’ici, et elle laisse tomber la longueur en surplus au sol. Méticuleusement, Marie prépare la longe en l’enroulant de son coude à sa main ouverte, créant ainsi un cercle pas trop grand ni trop petit, facile à garder en main. Elle donne une bonne longueur à Everglade, qui s’engage sur la piste sans se faire prier, et Marie ajuste sa prise pour que la longe ne soit pas trop tendue, mais cesse de traîner au sol.

« On y va doucement, Everglade, pas de folies. » Marie l’avertit d’un ton amusé en voyant comment la jument marche; tête haute, queue presque en panache, naseaux dilatés et oreilles pointées vers l’avant.

Everglade lui répond en s’excitant, arquant l’encolure avant de lancer sa tête en l’air et de prendre le trot sans préavis. Marie est prise au dépourvu pendant quelques secondes, et la jument en profite pour allonger son trot, étirant l’encolure jusqu’à avoir le nez qui frôle le sable. Marie s’agrippe à la longe et demande le pas, à plusieurs reprises, et Everglade finit par briser son trot après avoir fait quelques tours de piste. Marie lui demande de s’arrêter pour que toutes deux puissent reprendre leur souffle. Son coeur bat la chamaille dans son torse, et Everglade a au moins la décence d’avoir l’air un peu essoufflée par cet excès de vitesse.

« Tu as 4 semaines de repos et ta première idée, c’est de piquer un sprint? » Marie lui dit en secouant la tête, souriant malgré tout.

Everglade se secoue et semble retrouver ses esprits posés, bienveillants, habituels. Marie la renvoie donc sur la piste, et garde un œil vigilant sur ses moindres petits tressaillements, au cas où la jolie grise se déciderait à repartir en coup de tête. La jument ne lui fait plus de surprise jusqu’au moment où Marie change de main au pain. Elle quitte Everglade des yeux quelques secondes pour changer la longe de main, et la jument utilise ce moment d’inattention pour revenir au centre, jusqu’à donner un petit coup de nez sur l’épaule de Marie. Everglade la regarde avec une espièglerie dans le regard à laquelle Marie ne peut résister. Sur un coup de tête, elle détache la longe du licol d’Everglade, et la laisse tomber au sol. Elle repousse le nez velouté de la jument, et, sans écouter la petite voix dans sa tête qui lui dit que c’est une mauvaise idée, Marie se sauve en courant vers la barrière du rond de longe.

Everglade lance la tête en l’air et s’élance derrière elle. Elle rejoint Marie, qui bifurque soudainement, et part dans une autre direction. La jument se prête au jeu avec un plaisir évident, et elles se pourchassent ainsi jusqu’à ce que Marie soit à bout de souffle, incapable de continuer. Elle s’écroule au sol, au centre du rond de longe, et Everglade lui renifle les cheveux, l’air de dire “déjà terminé?”, ce qui l'a fait rire.

« Je n’ai plus douze ans, moi, tu sais! »

Elle prend le nez de la jument à deux mains et plante un gros baiser bruyant entre les deux naseaux. La ponette redresse la tête en renâclant, mais replace son nez entre les mains ouvertes de Marie, qui refait la même chose. Everglade reste près d’elle le temps que Marie reprenne son souffle, et quand elle se relève, la jument la regarde avec anticipation.

« Tu penses que tu vas pouvoir longer, ou bien on joue aujourd’hui? » lui demande-t-elle comme si elle s’attendait à une réponse concrète.

Everglade lui répond clairement lorsqu’elle s’élance d’elle-même sur la piste dans un trot qui ne demande qu’à être observé. Marie décide de continuer leur séance selon les humeurs de la jument; elle le mérite bien après si longtemps confinée dans un box. Elle prétend avoir une longe la reliant à la jument, et pratique les gestes nécessaires pour garder le contrôle. Everglade semble plus encline à suivre des instructions verbales, et Marie teste cette théorie en demandant le galop. La ponette lève les antérieurs comme si elle voulait se cabrer, mais se précipite vers l’avant avec un plaisir indéniable. Marie rigole toute seule, et se surprend à avoir les larmes aux yeux. Everglade tourne dans le rond de longe en gardant un galop soutenu, lançant même quelques coups de fesses de temps à autre. Marie la regarde aller avec stupéfaction; sa petite ponette si docile et gentille ressemble à un tout autre cheval lorsqu’elle lâche son trop plein d’énergie.

La jument ralentit presque imperceptiblement, et Marie lui demande immédiatement de redescendre au trot. L’inquiétude lui mordille la lèvre inférieure alors qu’elle scanne Everglade scrupuleusement pour tout changement dans son allure. La jument respire profondément, et Marie réalise qu’elle devait simplement commencer à s'essouffler avec cet effort soutenu. Elle relâche son propre souffle qu’elle retenait inconsciemment, et continue de marcher avec Everglade, qui a cessé de trotter. Marie se repositionne afin d’être à nouveau à la hauteur des épaules de la jument, puis fait quelques pas vers l’avant. Everglade tourne une oreille vers elle, et Marie se sent flotter lorsqu’elle recule et que la jument se détourne de la piste pour venir vers elle.

La jument s’arrête une fois le nez pressé contre le ventre de Marie, qui la caresse avec enthousiasme. Elles restent ainsi au milieu du rond de longe jusqu’à ce qu’Everglade reprenne une respiration normale. Marie l’accompagne jusqu’à la piste et attend que la ponette soit repartie au pas pour reculer et reprendre position comme si elle tenait une longe. Beaucoup plus calme dans l’autre main désormais, Marie n’est pas certaine de pouvoir “longer” la jument avec autant d’aisance. Elle sent un petit pincement de culpabilité lorsqu’elle demande le trot avec sa voix, et qu’Everglade s’engage à bonne allure, gardant une oreille vers elle. Marie n’aurait pas dû douter de la bonne nature de sa ponette, et elle est impressionnée par le trot léger et concentré que lui offre Everglade. Un peu perdue dans ses pensées, à s’imaginer sur le dos de la grise, sur un carré de dressage, Marie n’entend pas Deandra l’interpeller.

Elle sursaute lorsqu’Everglade s’arrête à la barrière pour réclamer des câlins de l’entraîneure. Marie sent ses joues rougir d’embarras, et Deandra lui sourit gentiment avant de répéter

« Elle a l’air bien remise de sa tendinite. Vous pensez la monter aujourd’hui? »
« Je préfère faire un retour plus progressif, je pensais la longer pendant quelques jours, histoire de la laisser se remettre en rythme plus actif. Quatre semaines, ce n’est pas rien. »
« C’est très raisonnable de votre part. Je vois que vous en êtes déjà à longer en liberté, ce n’est pas rien! »

Marie rougit encore plus; elle n’avait pas voulu se donner des airs, mais elle n’a pu s’empêcher de se dire que ce n’est pas tout le monde qui peut se dire avoir longé en liberté. Elle hoche la tête, son grand sourire trahissant son plaisir.

« Disons que je n’étais même pas certaine qu’elle allait vouloir longer au début. Elle a lancé des ruades aussi, tout à l’heure, j’étais choquée! Je ne l’avais jamais vue aussi excitée! »

Deandra rit avec elle, puis prend congé. Alors qu’Everglade se reconcentre sur Marie, Deandra fais signe de la main à Marie. Celle-ci lui renvoit le geste, puis reprend le pas avec sa ponette. Elle reste rose de fierté même quand Everglade lui démontre qu’elle a terminé de travailler en s’arrêtant pour tenter d’atteindre l’herbe de l’autre côté de la barrière. Marie soupire, tant pis pour la symétrie, elle aura d’autres occasions de longer des deux côtés égaux. Everglade la laisse accrocher la longe à son licol à nouveau, et elles sortent du rond de longe pour aller brouter autour.