Pandora Hills - Chemins de balade

Les pieds dans l'eau

C'était la première fois que Lumi allait emmener Sex Appeal en balade. Le mois d'août touchait à sa fin et les températures étaient toujours aussi hautes. Un soleil brûlant illuminait le domaine d'une lumière dure et l'air était lourd. Pas la moindre brise pour offrir de répit. Par cette journée estivale, la propriétaire des lieux avait estimé qu'il serait préférable de faire une activité calme et à l'ombre surtout, et c'est ainsi qu'elle en était venue à mettre Sex Appeal dans le van, rouler jusqu'au lac, avant de la sortir, la menant par la bride. Le lac voisin était un endroit que Lumi avait toujours voulu explorer à cheval après s'être installée ici, et il ne se trouvait qu'à une vingtaine de minutes en voiture. Après avoir sellé sa monture, la jeune femme avait mis le pied à l'étrier et s'était hissée sur la selle, avant de presser les flancs de la jument pour la faire avancer. La baie s'était mise en marche sans trop de conviction, sans doute rendue plus molle par la chaleur. Sur les dix premières minutes de la balade, pendant lesquelles Lumi l'avait guidée sur le sentier s'enfonçant dans la forêt, la selle français avait traîné les pieds, visiblement peu encline à faire le moindre effort supplémentaire ce jour-là. Cependant, sa cavalière comprit que la baie avait simplement besoin de temps pour se motiver, puisqu'elle finit par avancer avec plus d'entrain et par redresser la tête et les oreilles.
Contente de voir que la jument semblait enfin apprécier cette sortie, la jeune femme continua de la mener sur le sentier choisi. Avec une telle chaleur, le pas resterait la seule allure de la balade pour ne pas épuiser Sex Appeal ou risquer de la rendre malade. Le duo se contenta donc de progresser nonchalamment, profitant de ce beau temps et de l'ombre qui offrait un refuge bienvenu face aux rayons du soleil. Autour d'elles, les oiseaux gazouillaient bruyamment sur leur passage. Bientôt, Lumi aperçut le scintillement d'une grande surface d'eau à travers les arbres. Elles arriveraient bientôt au lac. La jeune femme guida la jument sur la droite, frôlant les troncs, pour laisser passer un groupe de randonneurs. Elle était étonnée de ne pas avoir croisé plus de monde pendant cette journée de grandes vacances, mais songea que les touristes étaient probablement agglutinés au bord de l'eau en ce milieu d'après-midi.
Lorsque le sentier bifurqua, s'enfonçant dans une forêt plus dense d'un côté et se dirigeant vers les arbres plus épars de l'autre, Lumi tira les rênes vers la seconde direction et Sex Appeal pivota sur ses appuis pour suivre son ordre. En quelques minutes, la jument descendit la pente douce qui menait au lac. Lorsqu'elles quittèrent le couvert des arbres, Lumi dut se cacher les yeux avec la main pour ne pas être éblouie. Autour de l'étendue d'eau, les arbres se faisaient plus rares, remplacés par des grandes zones d'herbes hautes ou de pierre sur lesquelles de nombreuses personnes étaient allongées. Des enfants et quelques adultes s'éclaboussaient aux endroits où l'eau était peu profonde, et Lumi crut voir un groupe faire du paddle près de la rive opposée. La jeune femme laissa sa jument à l'arrêt quelques secondes, le temps qu'elle assimile tout ce qui venait de se révéler à ses yeux et qu'elle hume les différentes odeurs. Puis, sa cavalière la talonna de nouveau et la baie se remit en marche.
Le duo longea le lac d'un pas prudent. Sex Appeal était attentive à où elle mettait les pieds, veillant à ne pas déraper sur un gros caillou. Plusieurs chiens vinrent leur aboyer dessus ou juste satisfaire leur curiosité, mais à chaque fois la baie resta calme, habituée à la présence de Rose au domaine. Après un bon quart d'heure de marche, Lumi remarqua qu'elles avaient dépassé la zone la plus fréquentée. Seuls les vacanciers les plus motivés étaient allés aussi loin par cette chaleur, et la jument fut soulagée d'être plus tranquille. Lorsqu'elles arrivèrent à une petite plage de sable menant au lac, Lumi engagea la jument dans la pente. Sex Appeal sembla d'abord réticente à marcher dans le sable humide, la baie étant assez regardante sur sa propreté. Puis, avec un peu d'encouragements, elle finit par se résigner et avança jusqu'à la zone d'eau, avant de s'arrêter net devant la surface réfléchissant le soleil.
Lumi mit pied à terre et, tenant les rênes d'une main, flatta l'encolure de la baie de l'autre, avant de s'avancer dans l'eau.
«Allez viens, ça va te faire du bien !, encouragea-t-elle sa jument.
Sex Appeal renâcla, ne croyant pas un mot de ce que disait sa propriétaire. Mais cette dernière n'abandonna pas. Elle avança aussi loin qu'elle le pouvait sans lâcher les rênes et sortit de sa poche l'une des petites friandises qu'elle transportait partout. Elle tendit la nourriture à la jument, la main bien à plat pour lui montrer. La selle français tendit le cou mais se rendit compte qu'elle était trop loin pour l'atteindre. Elle renâcla de nouveau et poussa un petit hennissement de frustration. Puis, hésitante, elle baissa la tête vers l'eau et la renifla. Elle but ensuite de longues gorgées et se désaltéra tandis que Lumi attendait. Finalement, d'un pas timide, Sex Appeal posa un pied dans l'eau, puis un autre. Sa propriétaire la félicita et continua à encourager la jument, qui termina les quatre jambes dans l'eau. Lumi ne parvint pas à la faire avancer trop loin, mais elle se contenta de cette petite victoire et marcha un moment dans l'eau avec la baie.
Puis, au bout d'un quart d'heure pendant lequel Sex Appeal était de plus en plus à l'aise, la jeune femme la guida hors de l'eau et se remit en selle. Elles avaient encore un long chemin à parcourir pour terminer le tour du lac.
-Allez, en route !», lança la jeune femme en talonnant sa monture.
Sex Appeal se remit en marche et accepta même de trotter doucement, visiblement revigorée par cette petite pause dans l'eau. Elles finirent la balade à leur rythme et reprirent ensuite la route, fatiguées mais heureuses après cette petite randonnée.

S'ouvrir aux autres

Owen ne savait pas si son idée allait fonctionner, mais il n'y avait qu'une façon de le découvrir: essayer. Loverboy avait beaucoup de mal à se détendre, même après plusieurs mois au domaine. L'étalon était tout simplement trop réservé. Sa timidité presque maladive s'était calmée avec Lumi et Owen, mais il restait un domaine dans lequel il semblait complètement désemparé: l'entente avec les autres équidés de l'élevage. Loverboy les fuyait tout simplement, ou quand il ne pouvait plus fuir, il se contentait de se figer dans un coin et d'y rester. Le mettre au pré était une solution qui avait été écartée immédiatement, de peur que le noir ne se sauve ou que la tension tourne en combat. Cependant, Owen n'avait pas abandonné et, plus que jamais, il pensait qu'il était temps de faire sortir le selle français de sa coquille.
Le temps était gris et une fine pluie était tombée toute la matinée, mais l'après-midi devait être sec selon les prévisions, bien que les nuages recouvrent toujours le ciel. Le mois de septembre était bel et bien arrivé et avec lui les prémices de l'automne, bien que les températures soient encore estivales à cette époque de l'année. Le jeune homme était allé chercher son cheval, et tout en sellant Orléans, l'idée qu'il allait mettre à exécution lui était venue. C'est ainsi qu'avant de sortir l'alezan de l'écurie, le brun était allé enfiler un licol à Loverboy et l'avait mené près du géant. Comme il s'y attendait, le noir avait d'abord refusé de s'approcher d'Orléans, freinant des quatre fers et renâclant à cette idée. Owen avait donc procédé autrement et, après plus d'un quart d'heure à attendre que les deux étalons s'habituent à la présence de l'un et de l'autre tout en leur donnant des petits morceaux de pomme et des caresses, Loverboy sembla accepter de se tenir près de l'alezan sans trop faire d'histoires. Owen prit cela pour un signe et décida enfin de sortir de l'écurie. Il se hissa sur le dos d'Orléans et, les rênes dans une main et la longe de Loverboy dans l'autre, guida les deux chevaux hors du bâtiment. Puis, une fois dehors, le cavalier mena sa monture sur le sentier s'enfonçant dans les bois.
Owen avait prévu une balade plutôt courte, ne souhaitant pas imposer cet exercice trop longtemps à Loverboy pour lui éviter un trop grand stress. Cependant, le noir semblait plus à l'aise en marchant aux côtés de l'alezan. Avançant un peu en retrait, il laissait Orléans mener la cadence et le fait que ce dernier ne lui prête pas plus d'attention que cela semblait rassurer Loverboy, ou au moins le rendre moins méfiant. C'était pour cela qu'Owen avait choisi son cheval. Orléans était une véritable force tranquille, et le selle français était sans doute l'animal le plus doux et sympathique du domaine. Son propriétaire lui accordait une totale confiance pour ce genre d'exercice et savait très bien que l'alezan ne ferait jamais le moindre mouvement brusque envers un autre équidé. Si la balade se déroulait sans accroc, peut-être Owen songerait-il à laisser ces deux-là ensemble dans le pré de temps en temps, ou les déplacer dans des boxes adjacents. Après tout, accorder sa confiance à l'alezan et devenir son "ami" aiderait peut-être Loverboy à surpasser sa timidité avec les autres également et à prendre plus confiance en lui ? En attendant, le noir continuait de marcher calmement, suivant Orléans en lui jetant parfois un regard inquiet, mais sans montrer d'autre signe de stress. Attentif et aux aguets, le jeune étalon avait les oreilles qui pivotaient à chaque bruit, tandis que l'alezan restait fidèle à son caractère, se promenant d'un pas régulier et tranquille, appréciant tout simplement la balade et pas du tout perturbé par le fait qu'il soit suivi par un autre équidé. Owen le dirigeait d'une seule main, maniant habilement les rênes tandis que sa monture, docile, suivait ses directions et continuait à progresser sur le sentier. Malgré la lenteur de leur marche, la boue commençait déjà à recouvrir les jambes des étalons et Owen songea qu'un bon nettoyage des sabots les attendrait à l'arrivée. Rose avait voulu les accompagner en partant, mais le brun se félicita de l'avoir fait rentrer dans la maison à la place car nul doute que la chienne serait déjà couverte de boue actuellement, et faire prendre un bain à la golden retriever était une vraie épreuve malgré le fait qu'elle adore pourtant se jeter à l'eau.
Se concentrant de nouveau sur le chemin, Owen tira sur les rênes pour faire bifurquer Orléans vers la gauche, prenant la boucle la plus courte. Derrière lui, Loverboy semblait à présent déjà bien plus détendu, et alors qu'il se tenait le plus loin possible, en bout de longe, au départ de la balade, le noir avait réduit la distance entre lui et l'alezan et semblait même parfois se détourner du géant et baisser sa garde pour observer son environnement. Owen sourit, content de constater que son idée n'était pas aussi bête qu'il le pensait au départ. Les résultats dépassaient même ses attentes, lui qui s'attendait à devoir traîner un Loverboy réticent et terrorisé du début à la fin. Cela lui prouva aussi qu'avec les bons individus et des efforts, le noir pouvait surmonter cette difficulté. En tout cas, c'était la première fois depuis son arrivée ici que Loverboy semblait profiter de quelque chose sans toujours avoir cet air craintif à la vue d'un inconnu, humain comme équidé. Owen fit donc ralentir un peu Orléans, qui prit un pas plus traînant, afin de rallonger la balade et de permettre à l'autre étalon d'aller à son propre rythme. Le trio fit donc la boucle à cette allure tranquille, l'alezan toujours aussi calme et obéissant à la perfection aux indications de son cavalier, tandis que le noir baissait ses barrières et prenait goût à la compagnie du premier. Lorsque des gouttes vinrent s'écraser sur l'encolure de sa monture, Owen lui pressa légèrement les flancs de ses jambes pour qu'ils se pressent sur les dernières minutes de la balade, ne souhaitant pas se prendre une averse et avoir deux chevaux complètement détrempés à panser.
Ils parvinrent à l'écurie juste avant que la pluie ne commence à tomber plus fort, et Owen attendit de s'être engouffré dans le couloir de l'écurie pour mettre pied à terre. Il mena les deux chevaux à l'aire de pansage et les attacha non loin l'un de l'autre. Puis, il alla chercher son matériel et s'attela à leurs soins, heureux de voir que Loverboy appréciait cette attention sans aucun stress en présence d'Orléans. Leur amitié de faisait que commencer.

Balade à pied

L'hiver approchait, Lumi le sentait. Depuis plusieurs nuits déjà, le gel s'installait et les températures avaient chuté drastiquement. Lorsque la jeune femme sortit en ce matin de novembre, la météo n'avait pas fait d'exception. Une fine couche de givre recouvrait l'herbe et le soleil qui se levait péniblement à l'horizon ne dispensait aucune chaleur, se contentant de diffuser sa lumière pâle sur la végétation, la faisant étinceler. La propriétaire du domaine avait enfilé un épais manteau et s'était également équipée d'une écharpe, d'un bonnet et de gants bien chauds. Cependant, ces précautions ne l'empêchèrent pas de frissonner en traversant la cour en direction des écuries. Elle s'y engouffra et, savourant la chaleur qui l'accueillit une fois à l'intérieur, referma la porte derrière elle. Puis, elle se dirigea vers le box d'Emeraude et, après une caresse à la jument, lui enfila un licol et la fit sortir. Lumi était bien décidée à continuer de travailler avec la pie, mais si elle voulait l'aider il fallait qu'elle prenne soin de leur relation, et quoi de mieux pour cela qu'une petite balade en tête à tête ?
C'est en menant la jument, qui n'était équipée que de son licol et de sa longe cette fois, que sa propriétaire quitta l'abri des écuries. Puis, elle avança vers le sentier qui menait dans la partie plus sauvage du domaine, traversant les bois, la selle français derrière elle. Emeraude avançait d'un pas lent et régulier, s'adaptant au rythme de marche de Lumi, qui n'avait que deux jambes. La jeune femme tentait cependant de presser le pas, à la fois pour se réchauffer et pour permettre à la pie d'adopter une foulée plus large et confortable. Le temps froid et sec annonçait déjà un hiver rigoureux, et Lumi songea qu'elle devrait probablement se contenter d'entraîner les chevaux dans le manège durant les prochains mois. Alors elle devrait profiter de cette balade qui serait certainement l'une des dernières de l'année. Elle se mit à la hauteur de sa jument et lui flatta l'encolure. La pie était calme et détendue, mais ses oreilles dressées et sa tête haute montraient qu'elle restait attentive à son environnement. Mais Lumi n'avait rien à craindre sur ce sentier. Tout le bois était propriété privée de Pandora Hills et aucun véhicule à part le sien et celui d'Owen ne pouvait s'y promener. Toute rencontre ou situation problématique était donc écartée et la selle français n'avait rien à craindre, de même que sa propriétaire n'avait pas à s'inquiéter d'un nouvel accès de panique de la jument. C'est donc le pas léger qu'elles continuèrent de progresser, s'enfonçant de plus en plus dans la forêt. Lumi regretta que Rose ne soit pas venue avec elle. La golden aurait pu profiter d'une balade plus agréable à suivre que lorsque sa maîtresse était à cheval, mais elle s'était contentée de remuer la queue et de se recoucher dans son panier devant la cheminée quand Lumi l'avait appelée. C'était donc uniquement avec Emeraude que la jeune femme était allée se promener.
Arrivant à un croisement sur le chemin, Lumi s'arrêta, bientôt suivie par la jument, puis hésita quelques instants. Au final, elle prit le chemin de gauche, qui menait à un sentier étroit et qui constituait un itinéraire d'environ trois quart-d'heure à pied. La balade ne serait ni trop longue, ni trop courte de cette façon et ainsi Emeraude pourrait se dépenser un minimum tout en évitant à Lumi d'attraper froid. Cette dernière se remit donc en marche et incita la pie à faire de même d'un claquement de langue. Lorsqu'elles traversèrent une zone plus herbeuse, les sabots d'Emeraude firent crisser le givre sur le passage de la jument, et l'humidité recouvrit ses pieds, de même que le bout des bottes rembourrées de sa propriétaire. La selle français voulu s'arrêter un instant pour brouter et Lumi lui accorda cette pause, qui fut très rapide lorsque, à la deuxième bouchée, la pie se rendit compte que l'herbe gelée n'avait pas très bon goût, ni la texture idéale. C'est donc sans rechigner qu'elle suivit de nouveau la jeune femme et reprit la promenade. Marcher à un rythme soutenu permit à Lumi de se réchauffer, et elle sentait que la jument aussi appréciait cette balade un peu différente des autres. Elle avait le pas plus sûr, la démarche plus souple, comme si elle profitait davantage de ce genre d'activité que du reste. Tout en continuant de suivre le sentier, Lumi réfléchissait à son avenir avec la pie. Sa peur des bruits de moteur et son passif avec la jeune femme à cause de leur accident avaient beaucoup ralenti la progression de la jument. Alors que la plupart des chevaux du domaine avaient déjà commencé à concourir et à faire leurs preuves, emmener Emeraude dans le van était un véritable calvaire qui n'était agréable ni pour elle, ni pour sa cavalière, et toutes deux arrivaient donc en concours dans un état de stress qui les avait empêchées de gagner la moindre compétition jusqu'à aujourd'hui. Et tout en se baladant, la pie à la main pour renforcer leur confiance mutuelle et passer de bons moments avec elle, Lumi ne pouvait s'empêcher de penser que la place d'Emeraude était peut-être autre part. La vie du domaine ne semblait pas faite pour elle et pourtant ... pourtant Lumi gardait espoir. Elle était bien déterminée à aider la jument à vaincre ses peurs et même si elle avait eu du mal à s'en approcher après sa chute, elle ne pouvait cacher qu'elle était attachée à la selle français. Et rien que la pensée de s'en séparer la rebutait. Mais elle devait songer au bien-être de la pie avant tout.
Perdue dans ses pensées, Lumi trébucha sur une racine et se rattrapa de justesse, tirant sur le longe. Emeraude s'arrêta et redressa la tête, comme pour la soutenir. Une fois de nouveau en équilibre sur ses jambes, la jeune femme caressa le chanfrein de la jument tout en lui murmurant un remerciement. Emeraude s'appuya contre elle durant ce bref échange, visiblement heureuse de cette attention et exprimant son affection pour sa propriétaire. Ce geste ému Lumi qui, faisant plus attention à ses pieds cette fois, replongea dans la réflexion tout en se remettant en marche. Les quarante cinq minutes de balade en firent finalement cinquante, pendant lesquelles le duo avança à un rythme constant, profitant du calme et de ce moment partagé. Lorsqu'elles virent enfin les écuries se dessiner à l'horizon, Lumi transpirait presque dans son gros manteau et Emeraude avançait toujours avec le même entrain. La jeune femme ramena la pie dans son box après une séance de pansage, et lorsqu'elle quitta de nouveau le bâtiment, seule cette fois, elle n'avait pas trouvé de réponse à ses interrogations mais avait un nouvel objectif: passer plus de temps avec Emeraude et prendre la grande décision à la fin de l'année prochaine en fonction de son évolution. Ainsi elle ne faisait pas d'erreur et n'aurait pas de regret en se disant qu'elle avait donné son maximum pour la pie. Et c'est soulagée de cette solution temporaire et les jambes engourdies qu'elle rentra chez elle.

Givre et lueurs du matin

L'air glacial annonçait l'arrivée prochaine des premiers flocons de neige tandis que Lumi mettait le pied à l'étrier. Enveloppée dans deux couches de vêtements, la jeune femme frissonnait tandis qu'elle s'installait sur la selle dont le cuir était froid. Sous l'équipement, Loverboy s'ébroua, chassant l'humidité qui s'accumulait sur sa robe d'ébène. Le selle français attendit patiemment que sa cavalière s'occupe des derniers ajustements et, lorsqu'elle lui pressa doucement les flancs, il avança aussitôt, docile. Lumi aimait le calme de l'étalon. Il était d'une douceur incroyable dans ses mouvements, mais aussi dans son comportement lorsqu'il s'ouvrait un peu au monde. Il lui avait fallu du temps pour s'habituer à ses nouveaux propriétaires et révéler sa face cachée, mais Lumi avait été ravie de découvrir celle-ci ces derniers mois. Même si l'année à venir allait s'annoncer compliquée pour elle à cause de son interdiction imminente de monter à cheval, elle avait tout de même hâte de suivre les progrès du noir, même de plus loin. Mais tant qu'elle le pouvait, elle préférait s'occuper elle-même de ses protégés.
La jeune femme avait donc décidé d'emmener Loverboy en balade par cette matinée brumeuse. Le givre recouvrait le sol et la végétation, craquant sous les sabots de l'étalon tandis qu'il avançait d'un pas sûr. Avec l'humidité omniprésente, Lumi choisit pour une fois de ne pas s'engager dans la forêt, peu désireuse de recevoir des gouttes glacées dans le cou en passant sous les branches presque entièrement dénudées des arbres. Elle guida donc sa monture sur le chemin longeant la clôture du domaine et donc les champs voisins. Il était encore tôt et le monde semblait endormi autour du duo. Loverboy, revigoré par les températures et la perspective d'une sortie, avait la tête haute et les oreilles bien droites, pivotant parfois sur son crâne pour écouter un bruit lointain. Le froid ne semblait pas le déranger plus que cela, et avait l'air, au contraire, de lui donner plus d'énergie. Lumi ne l'avait jamais vu si réactif sous la selle. Cependant elle faisait confiance au selle français pour ne pas l'embarquer soudainement, le noir ayant un très bon contrôle de ses réactions et émotions. Seul un parcours de saut d'obstacle semblait le faire sortir parfois de son comportement irréprochable, l'étalon ayant tendance à trop accélérer. Mais pour une simple balade, sa cavalière pouvait presque monter les yeux fermés. Se retenant tout de même d'en arriver à cet extrême, elle réajusta sa prise sur les rênes et fit tourner le noir, le menant sur le sentier de balade. Assez large, le chemin de terre offrait une vue imprenable sur l'horizon, bien qu'en ce jour le brouillard épais n'empêche la cavalière de voir à plus de dix mètres devant elle. Elle se contenta donc du peu que la nature lui offrait tandis que Loverboy continuait de marcher d'un pas régulier.
Par endroits, ils croisèrent des plaques de verglas et Lumi fit ralentir l'étalon au moment de les traverser. Le selle français passait alors dessus d'un pas prudent, tâtonnant presque la surface du bout du pied avant de s'y engager. A chaque fois, la flaque se fissurait avec des craquements qui résonnaient sous le poids du cheval, mais Loverboy ne sursauta pas une seule fois et, surtout, parvint à ne pas déraper au passage. Après avoir traversé l'une de ces zones, le noir reprenait son allure précédente, content de pouvoir retrouver un rythme plus dynamique. Lumi aurait aimé le faire trotter un peu, mais désormais enceinte de deux mois, elle préférait ne prendre aucun risque, même si elle avait encore les pleins pouvoirs sur sa mobilité pour le moment. Même si elle ne savait pas à l'époque qu'elle était enceinte, sa chute lorsqu'elle attendait Ellie avait été un vrai traumatisme pour la jeune femme, et réitérer l'expérience alors qu'elle portait son deuxième enfant en toute conscience était un évènement qu'elle voulait à tout prix éviter. Et Owen la tuerait probablement si cela arrivait de toute manière. Elle avait déjà dû négocier pendant une heure complète hier soir pour qu'il lui accorde cette balade sans qu'il ne vienne pour mener sa monture, Ellie en écharpe dans le froid glacial. Finalement, ils avaient pour accord qu'elle envoie un message toutes les quinze minutes pour lui dire que tout allait bien.
Ce fut d'ailleurs bientôt le moment de remplir cette obligation, puisqu'ils avaient déjà bien avancé sur leur balade. Lumi tira sur les rênes et Loverboy se stoppa sans hésiter. Elle retira momentanément ses gants et pianota sur le téléphone, puis une fois le message envoyé, remit ses mains à l'abri du gel et reprit les rênes. De nouveau, elle exerça une pression sur les flancs de l'étalon avec ses jambes, et sa monture se remit en marche. Ils continuèrent de suivre le sentier, longeant la barrière de bois, ce qui permit également à Lumi d'en contrôler le bon état même si Owen s'en était déjà chargé le mois dernier. Bientôt le soleil parvint enfin à percer la brume et ses rayons sans chaleur se déversèrent sur le paysage, donnant des lueurs magnifiques à l'endroit. Le givre scintillait sous la lumière, éblouissant quiconque regardait de trop près les feuillages. Le pelage d'ébène de Loverboy semblait parsemé de mille petits éclats brillants, tandis que des fines gouttes commençaient à couler le long de son encolure. Lumi dut plisser les yeux face à ce changement brutal de luminosité. Mais, enfin, le sentier se révélait davantage à son regard. La jeune femme relâcha un peu plus les rênes, laissant à l'étalon le loisir d'adaptée sa foulée comme il le souhaitait, veillant cependant à ce qu'il ne passe pas au trot. Loverboy allongea son pas, visiblement heureux de cette petite liberté. Il resta toutefois respectueux et à l'écoute de sa cavalière, obéissant à la moindre petite indication.
Au bout d'une demi-heure de balade et après un second message pour Owen, le duo fut obligé de s'arrêter lorsqu'un obstacle se présenta à eux. Un arbre était tombé sur le chemin, probablement durant la tempête de la semaine dernière, et bloquait désormais l'accès. Lumi soupira, puis elle descendit de son cheval et l'attacha rapidement à un poteau de la clôture pour aller examiner l'arbre de plus près. Par chance, ce dernier n'était pas trop lourd et s'était donc contenté de tomber sur le haut de la barrière de bois sans la casser. Cependant, il finirait par la fissurer à force de rester là, et Lumi prit donc soin de prendre l'endroit en photo afin de montrer cet incident à son compagnon pour qu'il s'en charge dès qu'il en aurait le temps. Mais pour elle et Loverboy, la balade s'arrêtait donc ici. Ils n'avaient d'autre choix que de faire demi-tour et remonter le chemin jusqu'aux écuries au lieu de faire la boucle. C'est donc à contrecœur que Lumi retourna auprès du selle français, qui ne l'avait pas quitté des yeux, attendant la suite. La jeune femme le détacha et, s'aidant de la barrière, se hissa de nouveau sur le dos du noir. Puis, tirant sur les rênes pour le faire tourner, elle le talonna dans la direction inverse, revenant sur leurs pas. Loverboy sembla d'abord confus de cet itinéraire, puis il se remit à avancer normalement, son pas plus dynamique pour réchauffer ses membres après cette pause de quelques minutes. Le chemin du retour étant identique, le reste de la balade fut plutôt monotone. De plus, le soleil était désormais dans le dos du duo, et bien que ses rayons éclairent tout l'horizon, Lumi se désolé de ne plus voir autant les reflets qu'il donnait à la végétation givrée. Elle ne s'attarda donc pas trop sur le reste de la balade, bien qu'elle en profita, sachant qu'il s'agissait de l'une des dernières avant un long moment. Lorsqu'ils arrivèrent finalement à l'écurie, Loverboy était détrempé et le manteau de Lumi lui paraissait plus lourd également, probablement gorgé d'eau. Elle ne perdit donc pas plus de temps pour aller pansez l'étalon et ensuite rentrer à la maison pour se changer.   

Dans la neige

Les règles étaient faites pour être enfreintes, et c'était exactement ce que faisait Lumi ce matin-là. Ne plus monter à cheval alors que sa grossesse était encore à peine visible était une torture pour elle, et c'est ainsi qu'elle avait décidé d'aller chercher Soledane dès l'aube pour une petite balade. Elle s'était éclipsée de la maison avec toute la discrétion dont elle était capable et s'était rendue dans les écuries. Elle avait sorti la jument de son box, Higher than Hope derrière elle, et l'avait sellée. Puis, une fois hors du bâtiment, elle avait mis le pied à l'étrier et s'était hissée sur le dos de la baie, avant de lui presser les flancs à l'aide de ses jambes, signalant leur départ.
Lumi guida sa monture sur le sentier de la forêt. Bien sûr, le froid matinal et le fait qu'elle se trouve sur un cheval alors qu'on le lui avait interdit limitait ses possibilités, aussi avait-elle choisi un itinéraire plutôt court. Juste de quoi profiter un peu de sa jument. Celle-ci aussi semblait ravie d'être montée de nouveau. Personne ne l'avait montée depuis qu'elle avait pouliné, pour qu'elle s'occupe paisiblement de son petit. Mais maintenant que le poulain allait sur son premier anniversaire, Soledane pouvait être de nouveau sollicitée. Malgré tout, Higher than Hope avait toujours besoin de sa présence, ainsi le petit bai suivait-il Soledane et Lumi en liberté, s'arrêtant parfois en se demandant pourquoi ils s'éloignaient de la zone sécuritaire de l'écurie et des prairies. Puis, il rattrapait bien vite son retard, craignant la disparition soudaine de la jument. Lumi était totalement détendue dans ce cadre. Les mouvements de sa monture qui avançait d'un pas régulier la berçaient, de même que le craquèlement de la neige sous ses sabots sonnait comme une musique agréable à ses oreilles. Le froid lui paraissait revigorant plutôt que glaçant, et elle s'amusait de voir le poulain explorer ce tout nouvel environnement avec curiosité, mais prudence également. La jeune femme n'avait presque pas besoin de guider sa monture. Soledane connaissait ce sentier et s'y dirigeait avec automatisme. Les rênes étaient donc lâches, les bras de Lumi reposant sur le pommeau de la selle. La selle français posait un pied après l'autre, la démarche sûre, s'enfonçant dans la neige à chaque pas et y laissant une piste bien nette de son passage, qu'Higher than Hope venait parfois brouiller en la traversant de part en part. Le trio semblait être la seule trace de vie dans cet univers immaculé. Pas un bruit ne venait faire concurrence au rythme de leur marche, pas un mouvement ne se détachait des arbres alentours. C'était reposant, et Lumi ne pouvait imaginer mieux comme balade. Elle reprit un peu les rênes en main et dirigea Soledane vers la gauche lorsqu'ils arrivèrent à un croisement. La jument obéit avec docilité, tournant immédiatement dans la direction demandée et suivant ce nouveau sentier. Son petit se pressa derrière elle, la bousculant involontairement au passage, et la baie renâcla faiblement avant de se concentrer de nouveau sur sa progression, ce qui arracha un sourire à Lumi. Soledane avait été une mère très patiente et douce, mais elle avait aussi ses limites et ne tenait visiblement pas à être dérangée pendant ce moment qui lui était destiné. Heureusement pour elle, Higher than Hope était un poulain plutôt tranquille et sage, et il prit donc ses distances pour éviter que l'incident ne se reproduise.
La promenade continua sur le même modèle. Soledane marchait à un bon rythme, attentive aux ordres de sa cavalière. Lumi la guidait seulement quand c'était nécessaire, laissant aussi la baie prendre des initiatives et réguler son pas comme elle le souhaitait. Quand à Higher than Hope, il suivait quelques mètres derrière, s'arrêtant parfois pour renifler quelque chose, avant de trottiner pour réduire la distance qu'il avait créée. Tous trois semblaient trouver leur compte dans cette sortie improvisée, tandis que le soleil progressait lentement mais sûrement dans le ciel, illuminant le tapis neigeux de ses rayons et aveuglant parfois Lumi. Le sol et la végétation se mit à scintiller, donnant presque un aspect féérique à la forêt. Soledane ne sembla pas perturbée par ces reflets et elle se contenta uniquement de plisser les paupières sans ralentir une seconde. Lumi aurait aimé lui accorder un petit départ au trot, mais si elle savait qu'Owen comprendrait qu'elle brave les recommandations et interdictions du médecin pour aller marcher avec sa jument, elle savait qu'il serait moins enclin à accepter qu'elle se soit lancée à une allure plus rapide dans la neige. Elle-même ne tenait pas à pousser sa chance et se refusait à prendre le moindre risque pour son bébé. La jument fut donc limitée au pas, et si sa cavalière sentait qu'elle voulait aller plus vite, la baie n'en montrait pourtant pas le moindre signe, bien trop respectueuse de sa propriétaire pour la secouer ou s'agiter sous la selle. C'est donc sans le moindre accroc que le trio aperçut enfin, après presque une heure de marche, l'écurie au loin. Le poulain sembla rassuré de cette vision et, alors qu'il avait passé toute la balade derrière sa mère, il prit cette fois les devants sur le reste du sentier. Il ne leur fallut pas plus de quelques minutes supplémentaires pour atteindre la cour. Une fois arrivée devant l'écurie, Lumi mit pied à terre et, comme à chaque fois qu'elle descendait de cheval, elle flatta l'encolure de sa jument. Elle lui déposa aussi un baiser sur la joue, geste uniquement réservé à la baie, puis la guida vers le bâtiment. C'est une Lumi souriante et heureuse de sa petite escapade qui referma la porte une fois le poulain à l'intérieur aussi, avant de se diriger vers l'aire de pansage.

Baignade

Le temps était radieux aujourd'hui et tout appelait à sortir prendre le soleil. Les températures, bien qu'estivales, restaient supportables grâce à un petit vent frais des plus agréables. Sasha n'avait pas hésité un instant avant de se décider sur l'activité du jour. Et pour cela elle avait choisi l'un de ses équidés favoris du domaine: Naughty Boy. La brune était allée seller le bai en début d'après-midi, puis s'était mise en selle dès la sortie de l'écurie. Naughty Boy trépignait sur place à l'idée de partir en balade et sa cavalière ne l'avait pas fait attendre plus longtemps avant de le talonner pour marquer le départ. Ils s'étaient dirigés d'un pas décidé vers la forêt et s'étaient engouffrés sous le couvert des arbres en suivant l'un des nombreux sentiers la traversant.
La fraîcheur apportée par la canopée revigora le duo, qui progressait d'une allure plutôt soutenue au départ. Puis, progressivement, Naughty Boy se calma un peu et marcha d'un pas plus calculé, profitant pleinement de sa balade. Autour du duo, les oiseaux gazouillaient constamment, les différentes espèces mêlant leurs mélodies pour créer un ensemble élégant. Les oreilles du selle français ne cessaient de pivoter sur son crâne, à l'écoute des divers bruits de la forêt. Elles tendaient cependant à pointer vers le nord-est, d'où provenait le faible clapotis de la rivière qui était réduite à un simple ruisseau sur ce passage. Sasha remarqua cet intérêt et profita d'un croisement pour s'engager sur un autre sentier se dirigeant là-bas. Naughty Boy suivit sa demande et bifurqua, visiblement ravi de se rapprocher du point d'eau. Sur son dos, la jeune femme profitait elle aussi de cette promenade des plus agréables. Elle se laissait porter par le cheval, maintenant une posture correcte mais ne cherchant pas la perfection, observant les alentours et flattant parfois l'encolure du bai. L'étalon avait quelque chose en plus qui faisait de lui un cheval unique aux yeux de Sasha, et elle adorait passer des moments avec le selle français. Il lui semblait que chaque minute passée à ses côtés renforçait leur lien, surtout lors de sorties comme celles-ci où le seul but était de se détendre. Même au travail, l'étalon était volontaire et aimait faire plaisir à son cavalier. Il était tellement agréable comparé à Démon, et sur tous les points. Mais ce n'était pas son cheval, bien qu'elle s'en occupe. Sasha avait du mal à s'imaginer le jour où elle devrait lui dire au revoir, bien qu'elle ne compte pas pour l'instant quitter son poste à peine obtenu.
Chassant ces soucis encore bien lointains de son esprit, la brune continua de guider le bai sur le sentier. Elle le laissa ramasser quelques touffes d'herbe sur le côté mais ne fit pas d'arrêt prolongé pour le moment. Cela semblait convenir à Naughty Boy, qui marchait toujours au même rythme. Au bout d'un certain temps, Sasha le talonna pour le faire accélérer et le bai prit son trot si élégant. Sa cavalière suivit ses mouvements, contente elle aussi d'accélérer un peu la cadence. Ils continuèrent à la même allure jusqu'à parvenir au ruisseau. Là, Sasha tira doucement sur les rênes jusqu'à ce que Naughty Boy repasse au pas, puis s'arrête totalement. Le bai secoua la tête et regarda en direction du ruisseau avec envie. Sa cavalière le poussa de nouveau en avant et l'étalon obtempéra sans la moindre appréhension. Arrivé sur la rive, il ralentit quelque peu, puis avança un anterieur dans l'eau, puis le deuxième, et finalement les quatre membres. Finalement, le bai s'avança puis, une fois l'eau presque jusqu'aux genoux, il commença à gratter le fond avec son antérieur, envoyant de grandes gerbes d'eau derrière lui ... et sur Sasha. La jeune femme se couvrit le visage avec son bras et commença à rire. Naughty Boy continuait de s'amuser, se rafraichissant, lui et sa cavalière. Au bout de cinq bonnes minutes passées à jouer, Sasha décida finalement de pousser le bai de l'avant pour le faire définitivement traverser le ruisseau. Naughty Boy semblait satisfait de sa petite baignade et ressortit sans protester. Une fois de nouveau sur la terre ferme, il s'ébroua et Sasha dut s'agripper à son encolure pour ne pas basculer sur le côté. Elle aussi était trempée, son t-shirt dégoulinait et son pantalon lui collait à la peau. Elle essora rapidement le premier et se dit que le second sécherait sous le soleil lorsqu'ils passeraient dans une zone plus dégagée.
La jeune femme tapota l'épaule de sa monture et lorsque tout deux furent prêts à repartir, ils reprirent leur chemin. L'étalon avançait d'un pas vigoureux, ayant retrouvé toute son énergie après cette petite pause. Sa foulée était large et il regardait droit devant lui, concentré sur le sentier qu'il suivait. Sasha lui fit décrire un grand cercle dans les bois, puis ils en sortirent enfin pour longer la clôture du domaine, ce qui leur permit de bien sécher et de se réchauffer un peu. Ils continuèrent sur cette ligne droite jusqu'à apercevoir les bâtiments de Pandora Hills. Une fois devant l'écurie, Sasha mit pied à terre, puis guida Naughty Boy vers l'aire de soins. Un bon pansage l'attendait avant que la jeune femme ne le laisse aller brouter dans le pré. En tout cas, cette balade les avait rapprochés et tout deux semblaient bien fatigués - mais heureux - de leurs aventures de la journée.

Prendre l'air

Aucune journée n'était pareille à la précédente lorsque l'on travaillait avec Not My Fault. L'étalon en avait fait voir de toutes les couleurs à Owen et celui-ci était sûr qu'il avait encore plus d'un tour dans son sac. Pourtant, lentement mais sûrement, le duo apprenait à se connaître. L'étalon semblait respecter de plus en plus son cavalier, et ce dernier comprenait les signaux du bai et parvenait à s'adapter à son caractère. Et ils progressaient indéniablement dans cet état d'esprit. Leur dernière séance de saut avait été presque parfaite, sans aucune chute ou saute d'humeur de la part du selle français, et Owen avait donc décidé de le récompenser en l'emmenant pour une balade en lieu inconnu. Quitter le cadre de Pandora Hills pour se détendre un peu ne pouvait que leur faire du bien, à l'un comme à l'autre. Le brun avait donc mis Not My Fault dans le van et avait pris la route, non sans ressentir un stress immense à l'idée de laisser Lumi, dont l'accouchement était prévu dans les deux prochaines semaines, seule à la maison avec Ellie. Mais sa compagne l'avait rassuré en disant que Sasha était sur le domaine si elle avait besoin de quoi que ce soit. Il fallut tout de même un long moment à Owen pour qu'il ait l'esprit plus tranquille.
Lorsqu'ils arrivèrent à destination, Owen gara le van le long de la route et descendit du véhicule. Il s'étira puis alla s'occuper de Not My Fault. Faisant sortir l'étalon, il l'attacha à l'arrière et le sella. Le bai s'amusa à taper du pied pendant tout le processus, mais Owen savait qu'il essayait juste de l'impressionner et ignora donc son comportement. Une fois l'étalon équipé, le brun verrouilla le véhicule, enfila sa bombe, puis il se mit en selle. Ils étaient à l'entrée d'un petit bois qu'ils ne connaissaient pas du tout. Une connaissance d'Owen le lui avait conseillé en lui donnant un itinéraire, lui promettant une balade sympathique bien qu'elle soit assez courte. Le brun talonna donc sa monture, qui se mit à avancer avec motivation, d'un pas presque précipité. Son cavalier eut bien du mal à le maintenir au pas. Ils s'engouffrèrent sous les arbres. Plutôt clairsemés, ils n'offraient pas de véritables zones d'ombre, mais le soleil était dissimulé par quelques nuages et n'était donc pas trop violent en ce jour.
Le duo progressa en suivant un large chemin traversant le bois. Sous la selle, Not My Fault trépignait de frustration, rendant la balade pénible et peu agréable. Owen soupira. Le bai avait constamment besoin de bouger et ce n'était pas une balade tranquille qui comblerait ce besoin. Il lui fallait quelque chose de plus sportif. Le brun corrigea sa posture et se prépara à une accélération soudaine. Puis il talonna sa monture. Not My Fault passa du pas au galop sans même tenir compte de l'allure intermédiaire. Son cavalier parvint toutefois à contrôler ce départ et à maintenir l'étalon à un galop raisonnable. Ce changement sembla être immédiatement effectif sur l'humeur du selle français. La tête haute, les oreilles pointées vers l'avant, le cheval était concentré sur le chemin devant lui et avait cessé de s'agiter inutilement. Owen parvint rapidement à se caler sur le rythme de sa monture. Les foulées de Not My Fault étaient larges et régulières, et son galop en devenait donc bien fluide. Les sabots du bai martelaient le chemin de terre tandis qu'ils traversaient le bois, les arbres défilant autour d'eux. Le vent venait rafraîchir le duo, faisant voler les crins du selle français. Son cavalier se tenait bien, les mains serrées sur les rênes, et les jambes faisant de même sur la selle. Galoper ainsi dans la nature lui faisait un bien fou. Même si il restait toujours attentif aux réactions de l'imprévisible Not My Fault, il relâchait également toute la pression accumulée ces dernières semaines. En ce moment précis il n'y avait plus que lui et son cheval, le bruit des sabots et le sifflement du vent. Ils effrayèrent un écureuil, qui alla se percher dans un arbre en protestant à petits cris aigus.
La balade fut encore plus courte que prévu à cause de leur vitesse, mais lorsqu'ils virent le véhicule, ce qui signifiait la fin de la boucle, ils étaient tout deux haletants. Les flancs de Not My Fault se soulevaient à un rythme rapide et une fine couche de transpiration recouvrait la robe du bai. Owen aussi était en sueur. Mais cette séance de galloping leur avait fait le plus grand bien. L'un comme l'autre en avait visiblement besoin et ils avaient été en accord durant toute la balade, sans le moindre petit problème. C'est donc satisfait de ce moment sportif partagé que le brun s'occupa de déseller son cheval et de le faire monter dans le van, avant de reprendre la route de la maison.

Profiter du bon temps

On était en plein mois d'août et, même si il n'était pas caniculaire, ce dernier se révélait bien chaud. En plein cœur de l'été, Lumi avait du mal à trouver des occupations ne demandant pas trop d'efforts aux chevaux, et encore plus quand ceux-ci étaient jeunes et dynamiques. Heureusement pour elle, Higher than Hope ne faisait pas partie de cette catégorie. Enfin, pas entièrement. Certes il était jeune, mais le dynamisme n'était clairement pas quelque chose qui le représentait. Toujours calme, il semblait avoir son propre rythme. Le poulain de bientôt un an et demi grandissait à vue d’œil. Sa propriétaire avait du mal à croire que c'était le même petit être qu'elle avait accueilli en mars de l'année précédente. Si il passait en ce moment par une période où son développement physique ne l'avantageait pas, Lumi ne doutait pas qu'il serait un étalon magnifique une fois adulte. En tout cas, il aurait un caractère incroyable. La jeune femme avait continué à travailler le bai pendant presque toute sa grossesse. Le licol et les brosses étaient devenus des objets de son quotidien qu'il ne regardait même plus, et Lumi avait aussi veillé à le manipuler régulièrement. Elle pouvait désormais toucher le poulain à peu près partout sans qu'il ne réagisse ou ne se débatte et était fière d'avoir terminé ce long processus. Tout ce qu'il lui restait à faire désormais, c'était continuer à développer la confiance du petit bai et renforcer leur relation. C'était dans cette optique qu'elle avait sorti Hope ce matin, en licol et longe, pour une balade en main.
Le poulain l'avait suivie sans hésiter, impatient de découvrir le programme de la journée. Lumi l'avait guidé jusqu'à l'orée de la forêt et ils s'étaient enfoncés sous le couvert des arbres, qui les protégeraient de la chaleur. La jeune femme avançait d'un pas relativement rapide, suivie de près par Hope qui, docile, marchait à un rythme constant sans dépasser sa propriétaire. Des muscles en plein développement roulaient sous la peau du bai, promettant un étalon puissant. Régulièrement, Lumi se retournait vers lui et ils échangeaient un regard, Hope l'observant de ses grands yeux interrogateurs, comme si il lui demandait silencieusement "Tu attends quelque chose de moi ?". La jeune femme flattait alors l'encolure du poulain et ils reprenaient leur balade. La terre des sentiers était sèche et la végétation jaunissante, attendant avec impatience les prochaines pluies pour se revigorer. Les sabots du selle français résonnaient en cadence avec son pas tandis qu'ils traversaient le bois. Lumi ne partit pas trop loin. Elle bifurqua à plusieurs endroits, réalisant des petits cercles ou revenant parfois sur ses pas. Elle ne voulait pas se retrouver avec un jeune cheval épuisé qu'elle devrait traîner jusqu'à l'écurie sur le retour et gardait donc une zone de proximité pour ne jamais en être très loin. Elle était fière de voir que le poulain la suivait presque comme son ombre, signe de la grande confiance qu'il lui accordait. Il était tellement malléable et volontaire qu'il était très tentant de l'initier à toutes sortes de disciplines, mais son âge le limitait pour le moment. En tout cas, Lumi pouvait se féliciter d'avoir complétement réussi le pré-débourrage du premier poulain né au domaine. Après son échec avec Break of Dawn, voir Higher than Hope se transformer sous ses yeux en monture idéale était d'un grand soulagement pour la jeune femme. Il ne lui restait plus qu'à espérer qu'elle continue de la sorte avec son débourrage à la monte lorsqu'il serait adulte. Mais elle était confiante.
Lumi se recentra sur le moment présent, menant toujours le bai parmi les arbres tandis que les oiseaux chantaient. Elle devait profiter de chaque seconde, de chaque instant. Plus vite qu'elle ne le pensait, le temps les rattraperait et il serait un étalon et plus un jeune poulain. Même si elle avait hâte de le voir grandir, elle était un peu triste de voir les années s'écouler à une telle vitesse. Déjà nostalgique d'avance pour ses chevaux, elle préférait ne pas penser à l'anniversaire des deux ans d'Ellie qui aurait déjà lieu en novembre. Comme si il avait senti ses émotions, Hope donna un petit coup de nez dans l'épaule de sa propriétaire, la sortant ainsi de ses pensées. Elle se retourna, surprise, et caressa le chanfrein de l'animal, qui ferma les yeux à ce contact. Oui, il serait un cheval parfait. Elle n'avait cessé de nourrir le lien qui les reliait et il lui semblait qu'à cet instant précis, il était plus fort que jamais. Lorsque le bai rouvrit les yeux pour l'observer, elle y vit une certaine sagesse nouvellement accrue. Higher than Hope n'était plus un poulain. Pas mentalement en tout cas. Souriant au bai, Lumi l'incita à la suivre et prit le chemin du retour après une promenade des plus agréables qui avait duré presque une heure. Mais pour la jeune femme, il lui semblait avoir marché le temps d'un claquement de doigts.

Balade de groupe

Une pluie fine était tombée toute la matinée, annonçant les prémices de l'automne avec ses températures plus fraîches. En début d'après-midi cependant, le soleil avait percé parmi les nuages et des éclaircies avaient rendu la météo plus agréable. C'était le signe qu'attendant Sasha pour se lancer dans sa première balade avec Callie. Mais lorsqu'elle était allée chercher la jument, cette dernière s'était révélée nerveuse et elle avait eu beaucoup de mal à la maintenir en place pour la seller. Au final, Lumi avait proposé son aide en allant chercher Soledane. Les deux juments sellées, les deux femmes les avaient menées dehors et s'étaient mises en selle pour partir en balade de groupe. La sortie se ferait intégralement au pas pour ménager la jument gestante, mais Sasha n'avait de toute façon pas prévu d'aller aux allures supérieures. Elle ne connaissait pas encore les réactions de Callie en dehors des installations destinées au travail et la pluie avait de plus rendu les sentiers boueux et donc glissants. C'est donc côte à côte, d'un pas plutôt lent, que les deux montures s'avancèrent vers le bois.
Soledane menait la marche, la tête haute, visiblement heureuse de sortir un peu. Callie la suivait de très près, sa tête arrivant au niveau de l'épaule du selle français, se collant presque contre elle. Elle observait son environnement d'un œil vif, à l'affut de la moindre menace, pressant le pas pour rester près de son amie. Les deux cavalières menaient leurs montures sans trop d'effort, la doyenne suivant automatiquement le chemin et l'autre ne la lâchant pas d'une semelle. Sous les sabots des juments, des empreintes ovales se formaient dans la boue, traçant une piste sur leur passage. Le quatuor progressait paisiblement parmi les arbres dans un silence agréable que seul perturbait le souffle des chevaux. L'itinéraire choisi par Sasha était relativement court, mais la vitesse imposée par Soledane ferait durer un peu la balade. Sasha se demanda si c'était l'attitude protectrice de la baie ou ses hormones maternelles qui rassuraient tant Callie. Dans tous les cas, elle espérait que la BWP serait amicale avec le poulain de Soledane et qu'elles pourraient ainsi continuer à partager la même prairie au printemps. Pour l'instant en tout cas, le lien qui unissait les deux juments était toujours aussi fort et étonnant. Cependant, la brune s'inquiétait du fait que Callie devienne dépendante de Soledane. Elle allait devoir lui apprendre à travailler seule. Tout d'abord parce que la selle français ne serait pas toujours disponible pour l'accompagner, mais aussi parce que la BWP ne vaincrait jamais ses peurs si elle ne les affrontait pas. Si cette balade était agréable, elle remettait aussi en question la méthode adoptée par la jeune femme pour régler les problèmes de sa monture. Elle se promit donc d'y réfléchir dès le soir-même pour trouver une nouvelle approche. Mais en attendant, elle profitait du moment présent.
Le soleil perçait à travers les feuilles, ayant enfin repris le dessus sur la grisaille du début de journée. Une impression de chaleur s'en dégageait, qui revigora autant les cavalières que les juments. Soledane accéléra même le pas, motivée. Sasha retint Callie, qui allait presque rentrer dans le flanc de la baie, et la fit s'éloigner un peu de l'autre duo. La BWP prit un air paniqué en voyant la selle français s'éloigner d'elle, mais la brune tint bon et ne céda pas à la pitié. Lorsqu'elle se rendit compte qu'être quelques mètres plus loin de Soledane ne causait pas une catastrophe surnaturelle, Callie reprit un air plus détendu. Son allure n'en resta pas moins saccadée, la jument tentant régulièrement une nouvelle approche, mais sa cavalière était vigilante et gardait le contrôle. Au bout d'une dizaine de minutes, la BWP avait compris qu'il ne servait à rien d'insister et s'était résignée. Mieux encore, elle était tout aussi détendue un peu plus en arrière que lorsqu'elle collait son amie, preuve qu'elle était tout à fait capable d'être plus indépendante avec des efforts et de la persévérance. Satisfaite de ce progrès, même minime, Sasha décida de la laisser tranquille et ne rallongea pas la distance entre les deux juments. Le groupe termina la balade sur le même schéma, et lorsqu'elles virent les écuries après avoir terminé leur boucle dans les bois, Soledane commençait à montrer des signes de fatigue. Les deux femmes mirent pied à terre et allèrent décrasser les juments, dont les jambes présentaient de nombreuses traces de boue. Tout en s'exécutant, elles discutèrent de tout et de rien. La balade leur avait fait du bien à toutes les quatre.

En attendant le printemps

L'hiver était plus proche que jamais. Déjà les premiers flocons étaient tombés durant cette dernière semaine de novembre, se déposant sur le sol pour y créer un fin manteau immaculé. Les températures avaient chuté, et les chevaux comme les humains du domaine sortaient bien couverts. Menant Sex Appeal, Lumi engageait la jument sur un sentier s'enfonçant dans les bois. La baie était équipée d'une couverture légère et d'un licol auquel était attachée une longe. Son ventre s'était bien arrondi ces derniers mois, ne laissant aucun doute sur sa gestation. Lumi était plus qu'impatiente d'être au printemps. Sex Appeal serait la deuxième jument de l'élevage à mettre bas au domaine, Soledane étant la première, et elle avait hâte de rencontrer le poulain issu de sa saillie avec Orléans. En tout cas, la poulinière était de plus en plus affectueuse en cette période, et Lumi profitait de moments exclusifs avec elle. C'était pour que la baie puisse voir autre chose que son box que sa propriétaire l'avait donc emmenée en balade à pied ce matin. Un soleil ne diffusant aucune chaleur trônait dans un ciel bleu, faisant scintiller le givre qui recouvrait la végétation dormante. A chaque pas de la jument, la fine couche de neige craquait sous ses sabots, un bruit que la jeune femme trouvait relaxant. Elle-même emmitouflée dans un gros manteau, elle profitait de cette promenade sans pression, observant les alentours, les arbres dénués de feuilles aux branches humides, les fougères dans leur protection gelée qui attendaient la fin des saisons froides pour en émerger, les minuscules empreintes de petits oiseaux en tout genre venus se poser au sol pour ramasser quelque chose ou chercher de la nourriture. Chaque chose était à sa place dans cette nature qui se reposait. Sa jument et elle étaient les seuls éléments perturbateurs dans ce silence et cette immobilité générale.
Lumi tapota l'encolure de la baie. Sex Appeal secoua la tête et accéléra un peu l'allure, revigorée par le froid et heureuse de pouvoir se dépenser. Lorsqu'elle arriva face à une zone un peu plus boueuse, elle rechigna à avancer et Lumi dût la guider par un autre chemin avant qu'elle ne se frustre. La jument avait toujours détesté la saleté, et elle se demanda si il s'agissait d'un trait qu'elle transmettrait à sa descendance. La jeune femme aimait s'imaginer quel caractère elle obtiendrait de tel ou tel mariage. Si Sex Appeal était vive et parfois capricieuse, Orléans était une crème, doux et docile. Leur poulain pourrait donc ressembler à l'un ou l'autre, ou même être un mixte de ses parents. En tout cas, l'éleveuse espérait bien accueillir une pouliche cette fois, le dernier né étant Higher than Hope. Mais cela, seul le temps lui dirait. Et même si il s'agissait d'un autre petit mâle, elle serait au comble de la joie du moment que la mise bas se déroulait sans accroc et que la mère et le petit se portaient bien. C'était tout ce qui lui importait réellement. Voir son élevage se développer au cours des années était vraiment satisfaisant. Mais comme dans tout élevage, elle devrait se résoudre à produire des poulains destinés à la vente un jour ou l'autre. Cependant, elle préférait d'abord voir le produit de ses couples une première fois avant de vendre leurs saillies. Même si tous les tests de santé étaient bien sûr réalisés, on ne pouvait être à l'abri d'une mauvaise surprise. Et puis, au fond d'elle, Lumi savait qu'elle aurait du mal à se séparer de poulains qu'elle avait vu naître et élevés elle-même. Non, elle n'était pas encore prête à affronter cet aspect du métier.
Se concentrant de nouveau sur le moment présent, Lumi se rendit compte qu'elles avaient déjà parcouru les trois quart de la petite boucle sur laquelle elles s'étaient engagées. Sex Appeal la suivait toujours, docile, avançant à son propre rythme, basé sur la vitesse maximale que sa forme physique actuelle lui permettait. La jument était attentive à son environnement, ses oreilles pivotant sur son crâne. Lumi sourit et elles finirent la balade en profitant de cette matinée agréable, l'esprit léger, songeant au printemps à venir.

Nouvelle année

Le mois de janvier venait de commencer, et ce matin en arrivant à Pandora Hills, Sasha se sentait prête comme jamais à attaquer cette nouvelle année. C'était comme employée du domaine qu'elle en avait passé le portail ce matin, ayant encore du mal à réaliser qu'il s'agissait désormais de son travail à plein temps. Tellement d'opportunités s'offraient à elle avec ce contrat. La jeune femme avait des projets plein la tête, et elle comptait bien en apprendre un maximum sur l'élevage d'équidés auprès de ses employeurs. Mais pour le moment, elle se contenterait d'être la palefrenière des écuries en attendant de mettre les fonds nécessaires de côté. Après avoir réalisé ses tâches du matin à une vitesse record, ce qui lui avait permis de se réchauffer un peu en ces températures glaciales, Sasha était allée seller son cheval pour l'emmener en balade. Le vent soufflait moins que les dernières semaines et la neige ne tombait qu'en légers flocons, ce qui rendrait la sortie beaucoup plus agréable. De plus, Démon semblait de bonne humeur et sa propriétaire avait ainsi la chance de passer un bon moment avec lui. Elle avait donc équipé l'étalon et l'avait sorti de l'écurie, se mettant en selle dès qu'elle referma la porte derrière elle. Le selle français n'avait pas bronché, observant les environs immaculés avec calme tandis que sa cavalière s'installait. Puis, la brune enfonça sa bombe sur sa tête et talonna doucement sa monture.
Démon se mit en marche et la balade commença. Sasha le guida vers le portail, désirant s'aventurer hors du domaine, sur un chemin de campagne de l'autre côté de la route. Elle fit avancer son cheval d'un pas lent et régulier, profitant ainsi du paysage et du calme ambiant. Docile cette fois, le bai progressait sans protester, ses sabots laissant des traces nettes dans la poudreuse sur son passage. Il s'arrêta avec précision avant de traverser la route, le temps que sa propriétaire s'assure de leur sécurité, puis s'y engagea dès qu'il en reçut l'ordre. Une fois de l'autre côté, le duo descendit dans un sentier qui s'enfonçait en contrebas et sinuait à travers les champs dont les plants étaient ensevelis sous la neige, en dormance. Même si il était évidemment dans un bon jour, Sasha savait que Démon progressait. Il était moins lunatique et ses petits débordements se faisaient moins dangereux et plus faciles à contrôler. Elle avait beaucoup travaillé avec l'étalon sur ce souci et avait pu bénéficier de l'aide d'Owen également. Bien sûr, le bai était loin d'être totalement fiable sous la selle mais c'était un bon début. Il y a un an, jamais sa propriétaire n'aurait pensé pouvoir partir ainsi en balade sans stresser et craindre un accident. En ce moment précis, elle était confiante. Elle savait déchiffrer les humeurs de l'étalon et réagir en conséquence, et le fait de lui accorder sa confiance semblait aussi faire plaisir à l'équidé, qui était donc moins enclin à s'emballer. Et tandis qu'il progressait dans la neige, il n'émanait de lui qu'un sentiment de quiétude. Après une demi-heure à avancer sur le même sentier, Sasha fit bifurquer sa monture sur un chemin plus large, servant de route aux tracteurs quand le temps le permettait. En cette saison, il était désert et parfait pour accélérer un peu l'allure. La jeune femme pressa donc les flancs de Démon jusqu'à obtenir un départ au trot. Le bai secoua la tête une seule fois, puis reprit son attitude détendue et trotta d'un rythme régulier et avec légèreté. Sa cavalière suivait ses mouvements, l'accompagnant à chaque pas, savourant le bruit étrangement satisfaisant de la neige crissant continuellement sous les fers du cheval. Tandis qu'ils parcouraient le large chemin, entourés d'une immensité blanche, la brune songea à l'année à venir. Elle allait avoir beaucoup de responsabilités entre son travail, Démon et les deux juments. Callie était encore bien craintive et elle ne devait pas relâcher ses efforts sur sa désensibilisation. Quand à Esperanza, elle devait faire de son mieux pour prouver au Rescue Me qu'elle pourrait s'occuper d'elle physiquement et mentalement. Pour le côté financier, elle s'en inquiéterait plus tard. Après tout, elle allait avoir un véritable salaire et pourrait mettre de côté en sacrifiant un peu ses autres occupations et sa vie sociale, bien que cette dernière ne soit déjà pas très active. Malgré les difficultés qui l'attendaient, la jeune femme savait qu'elle s'en sortirait. Elle l'espérait de tout cœur.
Démon trébucha sur une congère et Sasha sursauta. L'étalon se rattrapa sans chuter, bien que sa cavalière, n'étant pas préparée, fut un peu secouée et se cogna à l'encolure du bai. Il renâcla, comme pour exprimer son mécontentement face au ridicule de sa cavalière, puis reprit son trot comme si il ne s'était rien passé. Sasha s'agita sur la selle pour se remettre dans une position confortable. Puis, sachant qu'ils parviendraient bientôt au bout du chemin pour reprendre sur un sentier étroit, elle profita des dernières minutes sur celui-ci pour faire galoper un peu le selle français. C'est avec plaisir que l'étalon prit de la vitesse et passa au petit galop. D'une foulée régulière, il avala le kilomètre qu'il restait en à peine deux minutes, tandis que le vent glacial fouettait le visage de sa cavalière à cause de la vitesse. Sasha profita cependant de cette petite accélération, savourant la sensation de liberté qu'un galop en pleine nature lui procurait. Elle fit ensuite ralentir progressivement Démon quand ils s'engagèrent sur le sentier qui les ramènerait au domaine. Le bai reprit une allure modérée, d'abord au trot, puis au pas. Il souffla et agita la tête et la queue quelques instants, frustré de devoir se limiter à cette vitesse, mais finit par se calmer. Le chemin du retour se déroula dans un silence troublé uniquement par le pas de l'étalon, tandis que les flocons se faisaient plus gros et s'écrasaient sur sa robe avant de fondre sous sa chaleur corporelle. Ils passèrent bientôt le portail du domaine après avoir retraversé la route toujours aussi déserte, puis marchèrent jusqu'à l'écurie, où Sasha mit finalement pied à terre avant d'y entrer, menant son cheval par la bride jusqu'à la zone de pansage.

Dans la forêt

Le ciel était bleu, le soleil brillait, et Lumi avait décidé d'aller se balader. Pas seule bien sûr. Elle avait sellé le beau Loverboy, qui n'avait fait que s'améliorer au niveau de sa timidité ces derniers temps. L'étalon noir semblait développer un véritable lien avec sa cavalière désormais, dévoilant son côté affectueux et câlin, ouvrant finalement son cœur à sa propriétaire. Il lui avait fallu du temps pour être tout à fait à l'aise, mais Lumi était heureuse de voir qu'il y était parvenu. Elle aimait passer de longs moments à choyer le selle français, et les balades faisaient partie de leurs activités favorites. Et en ce jour, c'était vers la forêt que le duo s'était dirigé, une fois Lumi en selle. Les oreilles bien droites et pointées vers l'avant, la tête haute et l'air fier, Loverboy avait avancé sous la demande de sa cavalière, se mettant à marcher avec entrain. Ils arrivèrent bientôt sous la canopée, suivant un sentier de terre qui sinuait parmi les fougères récemment sorties de leur état d'hivernation. Ça et là, des fleurs commençaient à s'épanouir, et des tiges d'un vert vif redonnaient de la couleur à la végétation. Quelques arbres présentaient déjà des bourgeons qui ne tarderaient pas à s'ouvrir, tandis que leurs feuilles étaient de plus en plus nombreuses. Si Lumi adorait l'automne et ses couleurs, elle devait avouer que le printemps avait son charme aussi. Menant Loverboy d'une main douce, maniant les rênes sans difficulté, elle le guidait sur le chemin, le faisant parfois bifurquer sur un autre itinéraire au gré de ses humeurs. C'était une fabuleuse journée et une balade qui démarrait bien, et Lumi s'accorda un peu de répit.
Relâchant un peu les rênes et s'installant confortablement sur la selle, elle prêta l'oreille aux bruits de la nature tout en rêvassant. Loverboy était docile et peu enclin à l'embarquer ou à s'emballer, elle pouvait donc lui faire confiance tandis qu'il continuait de fouler le sentier d'un pas régulier. Lumi s'autorisa donc à plonger dans la réflexion. Elle songea à l'avenir proche, aux promesse du printemps. Soledane aurait bientôt son second poulain et la jeune femme était impatiente de le rencontrer, même si une pointe d'inquiétude planait depuis la naissance problématique d'Another Sun, malgré son dénouement heureux. L'arrivée d'une nouvelle jument, la promise de l'étalon qu'elle montait actuellement d'ailleurs, se rapprochait aussi à grands pas, et l'éleveuse avait hâte d'accueillir la belle Oloxanthine à Pandora Hills. La jument, une pie alezane aux longues jambes, avait séduit Lumi par la douceur de son caractère lors de son essai. Elle avait senti qu'elle pourrait développer une relation forte avec la pie, et n'avait pas pu se détourner d'elle sans l'acquérir. Sur une autre note, avec le retour des températures plus clémentes, Lumi allait pouvoir continuer de travailler avec Break of Dawn sans qu'elle ne soit frustrée d'être toujours dans le manège. Sans oublier Devil's Lullaby, dont le débourrage serait bien plus agréable en plein air. Mais même si tout cela lui paraissait loin pour le moment, Lumi savait déjà que les évènements finiraient par s'enchaîner à une vitesse folle et qu'en un clin d’œil, l'été serait à la porte. C'était pour cela qu'elle aimait profiter du moment présent.
Se reconcentrant d'ailleurs sur celui-ci, la jeune femme reprit les rênes bien en main pour emmener Loverboy sur une petite boucle supplémentaire. Elle le talonna gentiment et l'étalon se mit aussitôt à trotter, pour son plus grand bonheur. D'un trot élégant mais dynamique, le selle français parcourait la distance à la vitesse supérieure, sa crinière voletant au vent tandis que sa cavalière suivait son mouvement sur la selle. Trotter faisait visiblement beaucoup de bien au noir, qui avait besoin de se dépenser en ce moment, sa fréquence d'entraînement ayant quelque peu diminuée. Lumi jonglait entre le poulain, Lullaby et tous les autres chevaux comme elle le pouvait, mais ne parvenait pas à satisfaire entièrement tout le monde pour le moment. Mais Loverboy était loin d'être rancunier, et une bonne séance de pansage ou de grattouilles suffisait généralement à obtenir le pardon de l'étalon. Cependant, le voir si heureux était toujours un pur bonheur pour Lumi, et elle tapota l'encolure de l'étalon tandis qu'il continuait de trotter joyeusement en avant. Ils restèrent à cette allure jusqu'à sortir de la partie dense de la forêt, se rapprochant des zones plus dégagées. Là, Lumi fit ralentir sa monture pour la remettre au pas. Le noir avait légèrement transpiré mais semblait toujours aussi vif. C'est donc d'un pas rapide qu'il continua la balade, jusqu'au domaine où il semblait finalement atteint d'une bonne fatigue, et surtout comblé de sa sortie.