Terrain de Venom

Se retrouvant de nouveau en selle sur Dreamer, Bailey ne pouvait s'empêcher de songer à l'idée qui avait germé dans sa tête hier soir avant de le triturer toute la nuit. Entre sa colocation avec Jazz et le retour à un boulot stable, devenir propriétaire de son propre cheval lui semblait finalement possible. La paint était appliquée et sa première impression de la veille au milieu des cattles s'était avérée plus que correcte. Rênes complètement détendues, ils rejoignirent les terrains. Si, avec de l'entrainement, la jument pourrait devenir un excellent cheval de ranch, ce n'était pas tout ce que recherchais Bailey dans son futur compagnon. Le parcours de trail, installé là plusieurs jours auparavant pour un concours amical, lui permettrait sans aucun doute de se faire une idée plus globale de Dreamer et de leur entente sous la selle. Attitude basse, il lui fit prendre le jog d'un claquement de langue. Elle releva légèrement la tête, d'abord un peu surprise, puis reprit sa position initiale en se mettant à trottiner, ses sabots foulant l'herbe. Son cavalier lui fit faire plusieurs changement de direction, effleurant simplement l'encolure de ses rênes, d'un côté et de l'autre, appréciant la réactivité de sa monture. Il ne faisait aucun doute qu'elle était née pour la monte western. Bloquant le mouvement de son bassin avec un léger oh de la voix, elle s'arrêta aussitôt, gagnant une longue caresse sur l'encolure. Bailey réitéra ce petit échauffement à l'autre main, faisant appui avec sa rêne droite tout en mettant un peu de jambe droite et en décalant la gauche du flanc. Dreamer, bien campée sur ses postérieurs, compris immédiatement la demande du roll-back et elle éleva les antérieurs avec puissance pour faire demi-tour. Dans un premier temps surpris par la force déployée, le cow-boy laissa échapper un petit rire amusé. Il lui faudrait encore affiner ses aides et aider la jument à se canaliser et à décomposer ses mouvements. Leur séance de trail serait une excellente entrée en la matière. Après lui avoir demandé quelques foulées de lope, il la repassa tranquillement au pas, jaugeant les différents exercices composant le parcours. Il décida de ne pas s'attarder sur un atelier en particulier, son objectif du jour étant principalement de se faire une idée générale des capacités de la jument et de leur faculté à s'entendre sur un travail un peu plus poussé.

Il la guida sur le premier exercice, un rectangle fait en barres surélevées. Peu impressionnée, Dreamer se montra respectueuse en levant haut les membres pour ne rien toucher. Ils tournèrent à gauche afin d'en sortir sur l'un des grands côtés, faisant ainsi face à un petit pont de bois. La jument renâcla avant de s'arrêter pour observer l'obstacle. Bailey la laissa prendre son temps puis lui intima de reprendre la marche en serrant doucement les mollets. Elle hésita à nouveau, recula lorsqu'un premier antérieur se posa dessus puis, incitée par les demandes de son cavalier, le passa en trottinant pour s'en débarrasser le plus rapidement possible. Le cow-boy nota dans un coin de son esprit que ce serait l'une des premières choses à travailler plus en profondeur. Il la fit stopper, la laissant faire redescendre la pression à son rythme avant de l'emmener vers la porte, la positionnant parallèlement bien qu'un peu trop en avant par rapport à l'atelier. Prenant ses rênes dans la main gauche, il prit le portique de la droite et lui demanda de reculer droit sur deux foulées. Averti, il prit le temps de placer et doser ses aides afin qu'elle ne s'exécute pas avec une trop grande rapidité. La félicitant de la voix, Bailey lui demanda de passer dans l'ouverture, lui faisant ensuite décaler les postérieurs à l'aide de sa jambe droite puis reculer encore sur quelques pas. À nouveau, il décomposa ses aides avec une certaine lenteur puis caressa longuement l'encolure de sa monture en guise de félicitations lorsque la porte fût refermée. Reprenant le jog, ils passèrent au dessus de trois barres au sol, Dreamer trébuchant légèrement sur celle du milieu, avant d'aborder un simple slalom composé de trois plots. Il prirent le premier sur la gauche, Bailey prenant garde à bien les traverser au milieu, mettant un point d'honneur sur la précision du tracé. Après une dernière courbe, il imita le bruit d'un bisous et Dreamer se mit dans un lope cadencé. Ils effectuèrent un cercle de quinze mètres de diamètre, le cow-boy rectifiant l'équilibre de sa monture à plusieurs reprises, celle-ci ayant tendance à s'affaler quelque peu sur son épaule intérieure. Il répéta l'exercice une fois supplémentaire, s'accordant quelques secondes de plus pour travailler sur ce soucis puis la dirigea entre deux barres parallèles, lui demandant un arrêt net juste avant qu'ils en sortent. La paint démontra une fois de plus son aptitude à effectuer des transitions fluides puis s'exécuta lorsque son cavalier lui demanda de reculer jusqu'à leur point d'entrée. La demande fût réalisée trop vite et, ne contrôlant pas assez bien les postérieurs de sa monture, la jument se décala légèrement sur la gauche, sortant un membre de l'atelier. Poser et décomposer. Bailey se répéta maintes fois les mots qu'il avait déjà oublié entre cet exercice et celui de la porte, s'en voulant pour cette faute qui aurait facilement pu être évitée. Il passa sans les faire les deux exercices suivant, déjà abordés un peu plus tôt : un nouveau cercle au galop et un passage de barres au sol, choisissant de terminer par l'obstacle le plus technique, un tour à 360 degrés dans un carré. L'arrêtant au milieu du dispositif avec une précision quasi déconcertante, il décida de travailler à gauche. Cette jambe au contact, il décala la droite du flanc, faisant déporter légèrement sa monture avant de lui redemander aussitôt l'immobilité. Jugeant de la distance, il la fit reculer d'un pas avant de réitérer ses aides tout en alternant foulées en avant et foulées en arrière pour ne pas franchir les délimitations matérialisées par les barres. La jument les toucha plusieurs fois sans pour autant en sortir et, une fois de retour à leur position initiale, Bailey la félicita longuement, ravi qu'elle ait fait preuve d'autant de concentration.

Ils marchèrent autour du terrain, s'éloignant du parcours, le cow-boy l'autorisant à brouter par moments. Son idée était toute faite dans sa tête à présent, même s'il devait bien avouer que c'était déjà le cas depuis hier. Reprenant le chemin des écuries d'un pas tranquille, Bailey rejoua le film de leur séance, notant plusieurs points qu'il devrait aborder plus en détail mais enjoué par le caractère de Dreamer. Consciencieuse et à l'écoute, elle était tout ce que recherchais un cavalier de western chez sa monture, Bailey y compris.

Une fois arrivés au terrain, Bailey vérifia que le licol de sa jument était bien en place. Poser et décomposer. Ces mots avaient tourné dans son crâne toute la soirée d’hier, recherchant le meilleur moyen de travailler les points qu’il avait noté lors de leur séance de la veille. Travail à pied. C’est Jazz qui lui avait donné l’idée et, même s’il n’était pas forcément familier avec l’exercice du trail in hand, il trouvait que cela valait la peine d’essayer. Très réactive aux aides, presque sensible à la moindre pression, il aurait, en main, un contrôle différent sur les mouvements de Dreamer qui pourrait s’avérer plus que positif s’il faisait les choses correctement. Le parcours qu’ils avaient franchi la veille était intact à l’exception de quelques barres légèrement de travers qu’il n’avait pas pris la peine de remettre en place hier. La paint le suivant docilement au bout de la longe, il les déplaça afin de les repositionner puis improvisa un petit pattern de trail in hand sans avoir à bouger les dispositifs et les adaptant pour une séance à pied.

Il commença par marcher autour du terrain, demandant régulièrement des arrêts en des points précis qu'il se fixait mentalement. Il répéta la même chose maintes fois, changeant régulièrement de main et félicitant la jument de la voix lorsqu'il parvenait à obtenir des arrêts au carré. Une fois la jument de nouveau immobile sur sa demande, il se tourna afin de se retrouver face à elle, légèrement sur sa gauche, et lui demanda de reculer sur quelques foulées en faisant pression sur le licol et en lui demandant back. Lorsque Dreamer s'exécuta, il retira la pression du licol, suivant son mouvement vers l'arrière et la fit s'arrêter avant qu'elle ne prenne l'initiative d'elle-même. Il corrigerait la rectitude plus tard. Il lui caressa le chanfrein avant de retourner à sa place, à mi-hauteur d'encolure pour la remettre au pas et passa un des dispositifs de trois barres au sol avant de le refaire au jog. Dans une attitude détendue, la paint les passa plusieurs fois sans difficulté, la tête basse, prenant garde à ne pas trébucher dessus comme ce fût le cas la veille. Sans rompre l'allure, ils entrèrent dans un couloir de barre, effectuant un arrêt fluide et net avant d'en sortir totalement. Bailey reprit place face à la jument et redemanda le back, foulée par foulée afin de mieux contrôler la direction de l'équidé. Il lui mit la tête un peu plus à gauche lorsque les postérieurs dévièrent dans cette direction afin de la remettre droite puis la positionna de nouveau bien au centre du couloir. Rectifiant ainsi plusieurs fois, ils finirent par passer le dispositif sans qu'un seul membre n'en sorte. Il la félicita longuement, puis se mit perpendiculaire à l'encolure, lui demandant de pivoter à 180° sur le postérieur afin qu'ils se retrouvent dos à l'exercice précédent. Il prit soin de contenir les épaules sans pour autant les bloquer, empêchant le mouvement en avant sans coincer la trajectoire latérale. Comme pour ses autres demandes, il lui fit exécuter foulée par foulée, lui intimant l'immobilité à plusieurs reprises afin qu'elle prenne son temps. Son attention entièrement portée sur le cow-boy, Dreamer s'appliqua une fois de plus, comprenant exactement et avec rapidité ce que l'on attendait d'elle. Ces ordres là parfaitement acquis, le pivot à 360° dans le carré fût une formalité.

Ayant bien travaillé sur la décomposition des mouvements, la jument appliquée, Bailey décida de terminer par l’exercice du pont. À son approche, la jolie paint se décala, le regard fixé dessus mais sans pour autant s’immobiliser. Il la laissa ralentir et observer puis l’arrêta devant l’obstacle. Elle souffla légèrement dessus, puis y posa les antérieurs avant d’en descendre sur le côté, peu tentée à l’idée de le traverser à nouveau. L’homme lui fit faire un arc de cercle avant de revenir dessus, lui imposant cette fois un rythme cadencé et l’empêchant de le briser. Dreamer monta entièrement sur le pont sans plus se poser de question et se stoppa en son milieu sur la demande du cow-boy. Cependant impatiente à l’idée de vite en redescendre, elle tenta de s’échapper sur le côté droit, vite arrêtée par Bailey ayant anticipé le mouvement. Il lui imposa quelques secondes d’arrêt, et la fit descendre droit aussitôt qu’elle montra un signe de décontraction, sans pour autant la laisser trottiner. Il l’éloigna tranquillement du pont, la laissant brouter un peu plus loin en guise de récompense, content du déroulement de leur séance et toujours plus ravi par le tempérament de sa jument. Sa jument. Cette pensée le fit sourire, le rendant euphorique comme un enfant à l’approche de Noël. Il était finalement propriétaire de son propre cheval et rien ne semblait lui paraitre insurmontable.