Chez les cavaliers d'Eréthia

 
La panique se faisait ressentir dans le manoir d'Eréthia, la jeune femme courrait à travers la cuisine. Ouvrant tous les placards les uns après les autres, fouillant chaque recoin. Une véritable cacophonie résonnait dans la pièce.

Ce n'était pas possible, elle était dans un cauchemar, cauchemars ou elle n'avait plus de thé. Elle n'avait plus rien, pas même du simple thé. Elle avait tout liquidé sans faire attention, elle avait besoin de thé. Il lui fallait du thé. Rapidement.

Elle enfila ses chaussures en trombe et sortit de la maison comme une furie. Elle prit sa voiture et fila au magasin le plus proche. Elle rentra à l'intérieur comme une personne civilisée, pourtant la jeune femme avait juste envie de courir comme une folle vers le rayon thé.

Lyna dévalisa le dit rayon thé, prenant limite deux boites de chaque, se moquant de passer pour une droguée. Puisqu'elle était une droguée. Elle passa à la caisse non sans oublier de prendre du sucre en plus. Car oui, elle ne pouvait boire de thé sans une grosse dose de sucre.

Elle retourna chez elle en quatrième vitesse et se fit un thé sous les yeux moqueur de sa jeune sœur, elle ne put s'empêcher de lui tirer la langue avant de regarder son précieux thé. Le micro-onde sonna, elle prit délicatement sa tasse harry potter et souffla dessus. Refroidissant lentement le doux breuvage.

La brune sentit le breuvage traverser son corps et elle laissa un soupir de bien-être s'échapper de ses lèvres tandis qu'elle s'installer confortablement dans son fauteuil.

- Espèce de drogué !
- Je t'emmerde petite sœur !


 
 

- Aller vient, c'est par là !

- Tu es sûr Anna ?

- Mais oui aller ! On doit rattraper notre retard.

Son cheval avança prudemment sur le bord de la falaise, sa partenaire était quelques mètres derrière elle. Soudain, elle sentit le sol se dérober sous sa monture, elle poussa un cri de terreur tandis qu'elle sentit son corps basculer.

Son corps percuta avec violence le sol, sa jambe était coincée sous son cheval et ils dévalèrent la pente en glissant. Elle poussa un hurlement de douleur, sa vision se fit flou, sa tête bourdonnait. Tous ses sens étaient détraqués.

Elle se redressa soudainement, le souffle erratique. Son corps était parcouru de spams incontrôlable, la sueur collait à sa peau. Une douleur comprima son cœur tandis qu'elle se laissait aller aux larmes, les larmes amères dévalèrent ses joues.

Encore un cauchemar, toutes les nuits, c'était le même refrain. Toujours cette scène, toujours. Elle revivait son pire cauchemar encore et encore. Fatiguée, elle se releva, sa jambe de métal rencontrant le carrelage.

Les médecins avaient dépassé les limites de la science. Sa jambe était totalement robotisée et contrôlée par son cerveau. Sa mère avait payé une fortune pour réaliser ce miracle dans l'espoir que sa fille reprenne la compétition.

Elle sortit prendre l'air sur son balcon, le froid lui prit les tripes et elle inspira longuement avant de poser son regard sur la ville en dessous d'elle. Le trafic était impressionnant même à cette avancée de la nuit.

Elle se détourna des lumières de la ville pour rentrer dans les ténèbres de son appartement. Il était inutile de retourner se coucher, elle ne retrouverait pas le sommeil. Elle se fit un bon café et s'installa sur son canapé.

Elle regarda la télé sans grande conviction, elle zappait les chaînes les unes après les autres sans s'attarder. Elle s'arrêta quelques secondes de trop sur la chaîne équitation, son cœur se serra douloureusement dans sa poitrine.
 
Le contact avec les chevaux lui manquaient plus qu'elle voulait ne l'avouer, mais elle ne se sentait pas encore prête à se pardonner.



   

Dire qu'elle était mal à l'aise était un euphémisme, elle ne se sentait pas du tout à sa place. Elle marchait, la tête visé au sol, ignorant les regards curieux sur sa personne. Elle voulait littéralement disparaître loin de ce monde qui n'était plus le sien.

Pourtant, son ancienne coéquipière l'avait contacté quelques semaines plutôt. Elles n'avaient d'abord parlé que de chose futile avant qu'elle lui demande ce qu'elle voulait véritablement. Anna n'était pas idiote, son amie ne l'avait pas recontacté depuis sa sortie du coma, un an auparavant.

Et elle n'avait pas tort, la jeune cavalière avait un souci avec son nouveau cheval. Et elle voulait des conseils, Anna avait refusé en premier lieu. Trop de souvenirs lui revenaient en mémoire, c'était encore trop tôt pour elle, mais son ancienne partenaire avait fait du forcing et elle avait jeté l'éponge.

Elle s'était promis qu'une fois le problème réglé, elle ne remettrait plus les pieds dans une écurie. Elle devait tirer un trait sur son ancienne vie. Ses pieds foulaient le sol sableux tandis qu'elle attendait la cavalière.

Celle-ci ne tardait pas à faire son entrée dans la carrière. Elle chevauché un entier aussi sombre que la nuit. Le selle français piaffait d'énergie, le pauvre avait la bouche ouverte à cause du mors trop serré. Il transpirait et ses yeux indiquait sa peur, son ancienne coéquipière avait bien changé en une seule année.

- Arrête de lui arracher la gueule Camille.

- Si j'arrête, il va m'embarquer.

Anna poussa un soupir et croisa les bras en signe de mécontentement. Elle fixa la cavalière d'un mauvais œil.

- Tu m'écoutes où je me casse.

Sa voix était cassante, elle n'avait pas envie d'être là et elle le faisait clairement comprendre. Ses doigts tapotèrent son avant-bras, montrant qu'elle attendait.

- Ton cheval en a marre de se faire arracher la gueule à chaque instant, j'imagine que tu ne fais que le monter et qu'il passe ses journées enfermé entre quatre murs. Pas étonnant que tu arrives à rien avec. Donc, maintenant, tu vas gentiment détendre tes rênes et le laisser souffler.

La cavalière obéit de mauvaise grâce, le cheval en profita et partit en rodéo. Il mit rapidement à terre sa cavalière avant de filer au galop dans toute la carrière. Anna sourit, contente, il fallait que la cavalière comprenne la douleur de son cheval.

- Ne sois pas en colère contre ton cheval Camille, il ta juste rendue ce que tu lui avais fait. Maintenant, tu vas l'observer et attendre qu'il se calme. Ensuite, tu iras le chercher dans le calme et sans le punir.

- NON MAIS TU N'ES PAS BIEN ! Je t'ai fait venir pour que tu m'aides, pas pour me faire tomber !

On peut y repasser pour le calme, Camille était aveuglé par sa colère. Elle ne voyait pas la souffrance de son cheval. Anna souffla et partit rejoindre l'entier qui soufflait difficilement, le pauvre était épuisé. Elle lui flatta l'encolure avant de le mener vers sa cavalière, elle arracha la cravache de la jeune femme et la balança le plus loin possible.

- Apprends à comprendre ton cheval, créer un lien par amour et non par contrainte. Et seulement, là, tu pourras en faire un allier. Pense d'abord à lui et non pas à ton petit bonheur. Et change moi ce mors barbare. Il a une bouche sensible inutile de lui mettre un Pelham doublé d'un passe langue.

- Non mais tu rêves là !

- Ah ouais, tu veux parier ? Ok, donne-moi un mors double-brisure. À moins que tu es peur que je te ridiculise. Tu assumes de m'avoir fait venir maintenant.

En colère, la cavalière partit en furie dans les écuries. Nombreux étaient les spectateurs, Anna n'aimait pas la tournure que prenaient les choses. Camille revint avec le mors voulu, Anna lui prit des mains et libéra l'entier de sa prison.

La commissure des lèvres avait pris cher, le pauvre cheval saignait légèrement. Elle réajusta les montants du mors et retira le noseband. Elle balança cette horreur dans le sable, elle remit le filet au noiraud, ajustant le tout correctement.

Elle fit marcher le cheval dans la carrière, faisant fit des regards qu'on portait sur elle. Elle avait la boule au ventre, son sale caractère avait refait surface et la voilà faisant ce qu'elle avait voulu éviter : monter.

Pourtant, elle voulait rabattre le caquet à Camille et lui montrer que son cheval allait parfaitement bien et qu'il avait simplement besoin d'amour et de douceur. Elle finit par arrêter l'entier, elle lui flatta l'encolure puis mit pied à l'étrier.

Elle observa les réactions du cheval avant de forcer sur ses bras pour se hisser en selle. Elle passa sa jambe de métal de l'autre côté et le plaça dans l'étrier. Le noiraud ne bougea pas une oreille, elle lui flatta l'encolure avant de réajuster doucement ses rênes.

La sensation de légèreté fut plus grisante qu'elle ne voulut se l'avouer, Camille était verte de jalousie. Anna pouvait sentir sa colère émaner d'elle, ce qui l'a fit doucement sourire. L'entier marchait désormais doucement, elle le sentait encore sur ses gardes, prêt à bondir au moindre contacte des rênes.

La brune mit cependant vite pied à terre, son objectif était atteint. Elle avait trouvé le problème plus vite que prévu.

- Le problème ne vient pas de lui, mais de toi. Maintenant à toi de voir si tu saurais te remettre en question.

Elle tendit les rênes à la cavalière qui lui arracha littéralement des mains, le pauvre cheval fit un mouvement de retrait, essayant de fuir. Elle poussa un long soupir, c'était une cause perdue, son ancienne coéquipière avait trop changé. Et ne se remettrait pas en question.

Elle quitta les écuries sous les regards des gens présents autour de la carrière. Les murmures allaient de bon train. Tous avaient vu l'humiliation qu'elle avait mise à Camille, mais la jeune femme le méritait clairement. Anna fila donc avant de croiser d'autres personne, elle ne voulait pas s'attarder plus que nécessaire dans ce lieu pourrit jusqu'à la moelle.

   

Elle ne savait plus quoi penser. Aller aux écuries avait été une mauvaise idée, Anna était perdu. Son cœur se serra une nouvelle fois tandis que des larmes perlaient une nouvelle fois au coin de ses yeux. Elle voulait oublier cette vie passée, passer à autre chose. Reprendre une vie normale. Pourtant, tout semblait être contre elle, les souvenirs affluaient à chaque instant depuis plusieurs jours déjà.

Tout comme les remords de son erreur, elle s'en voulait de penser au bonheur. Elle refusait d'être heureuse alors que lui fût mort. Elle aurait tellement voulu se coller à lui, pleurer dans sa crinière d'ambre. Il fallait qu'elle sorte, qu'elle parte loin de cette ville qui lui rappelait trop de souvenirs douloureux.

Elle sortit à la volée, attrapant les clefs de sa voiture. Elle ferma son appartement et dévala les escaliers à une vitesse folle, si bien qu'elle faillît tomber. Elle sauta dans sa voiture, la pluie commençant à tomber sur la ville. Elle fila à travers la ville, les larmes brouillant partiellement sa vue.

Les immenses bâtiments furent remplacés par la campagne recouverte de neige, elle roula, encore et encore. Elle ne savait pas où elle allait, mais elle continuait de rouler. La musique à fond, Anna traça jusqu'à ne plus avoir d'essence. Elle s'arrêta au bord d'une plage.

La mer était calme, l'eau, d'un bleu pur. Le soleil se levait doucement au-dessus de cette immensité bleu. L'horizon se profilait devant ses yeux. Elle se laissa tomber sur le sable, de nouveaux sanglots la prirent, elle sera ses bras autour d'elle et hurla sa peine.

Les heures passèrent, ses larmes se tarirent doucement, elle resta prostrée ainsi. Fixant l'horizon sans vraiment le voir, elle était perdue. Ses pensées s'entremêlaient, lui donnant une migraine pas possible. Elle essuya le vestige de ses larmes et se releva, ses pieds se mirent à avancer, elle se laissa guider par cette force invisible.

Elle marcha le long de la plage, plongé dans ses pensées les plus sombres. Des rires aux loin lui firent redresser la tête. Deux cavalières avançaient vers elle, elle les observa comme bloquée. Elle les enviait, elle voulait retrouver sa joie passée.    

Il fallait qu'elle se pardonne, qu'elle change. Qu'elle se recentre sur son bonheur, qu'elle redécouvre la vie. Il fallait qu'elle se reconstruise pour pouvoir goûter de nouveau au bonheur. Elle fit demi-tour, la tête haute et le regard confiant.

Une nouvelle vie s'offrait désormais à elle, il suffisait juste d'un coup de boost. Sans le vouloir, les deux cavalières lui avait fait ouvrir les yeux. Elle ne pouvait tirer un trait sur son passé, elle ne pouvait pas oublier les peines, ni les joies que lui avaient procuré le cheval.

Cela prendrait peut-être du temps, mais elle voulait se reconstruire, elle allait de nouveau tout plaquer, quitter la ville pour se ressourcer dans un endroit calme et enchanteur.

   

Tout plaquer du jour au lendemain n'était pas vraiment la meilleure chose à faire. Elle n'avait rien dit à personne. Et puis personne ne s'occupait d'elle alors elle, c'était mise à chercher une région où s'installer.

Un coin en particulier avait attisé sa curiosité, bon nombre de maisons y était en vente. Trop de choix surtout. Elle avait visité plus de quatre maisons, toute plus belle les unes que les autres. Cependant, une des maisons avait attiré son attention.

Petite, rustique mais grand jardon ombragé par le saule pleureur. Son rêve ! Elle se voyait parfaitement lire en dessous pendant les journées chaudes d'été. Son choix avait été vite fait, une semaine, plus tard, elle avait signé le contrat de vente et avait mis son appartement en vente.

Le destin s'était montré particulièrement taquin, une grande écurie de propriétaire, c'était ouverte non loin de sa nouvelle maison. Tout ce qu'il fallait pour craquer et retrouver goût à la vie. Mais elle n'était pas encore totalement prête.

Elle voulait d'abord se reconstruire tranquillement, en prenant son temps et en faisant les choses bien. Comme faire ses cartons par exemple. Ce qui était bien quand on passait d'un appartement à une maison, c'est qu'on n'était pas obligé de faire du tri.

Elle ne s'embêtait donc pas à jeter plus que nécessaire. Elle emballait soigneusement ses cadres photo, vestige d'un passé trop proche. Un fin sourire mélancolique étira ses lèvres, ses doigts caressèrent la photo. Elle finit de l'emballer, se concentrant sur autre chose pour ne pas se remettre à pleurer.

Les jours passèrent, les cartons défilèrent tout comme les souvenirs. Anna était prête pour son nouveau départ, elle devait maintenant tout défaire et ranger dans sa nouvelle demeure. Le soleil était de la partie. Elle ouvrit les fenêtres en grand, elle inspira l'air pur et retourna à ses cartons.

Elle prenait un malin plaisir à détruire les cartons une fois vides, c'était sa façon à elle de passer à autre chose. De rayer son ancienne vie de citadine. Les journées s'enchaînèrent lentement, la maison était plus grande que son appartement. Anna, c'était même découverte une passion pour le jardinage, taillant les haies.

Elle avait même planté quelques fleurs de Lys et framboisier pour son plus grand bonheur. Elle avait rencontré ses nouveaux voisins. De charmantes personnes si on oublie l'espionnage maladif des petits vieux. Une jeune s'installant dans un coin paumé n'étant pas courant.

La jeune femme s'était alors concentrée sur son environnement, partant découvrir les montagnes et la forêt entourant sa maison. Rêvant de les parcourir à cheval, malgré sa peur de passer à autre chose.
   

Aujourd'hui, Lyna mettait la main à la pâte ! Elle était à cours de bonbon pour chevaux et n'avait pas envie de faire deux heures de route pour aller en chercher. Ni de commander et attendre quinze jours pour les recevoir.

Elle avait donc décidé de faire quelques recherches sur Internet pour trouver THE recette pour faire les meilleurs bonbons pour chevaux. Et ainsi régaler sa petite jument adorée. Elle sortit deux trois ustensiles de cuisine, comme un saladier et une balance par exemple.

Elle disposa sur la table tous les ingrédients nécessaires : farine, sucre, eau et une petite carotte. Elle suivit la recette de A à Z, respectant au mieux les doses prescrites. Elle mélangea les deux cent vingt grammes de farine avec le sucre et l'eau, utilisant ses mains.

Elle rajouta un peu de farine pour empêcher la pâte de trop coller. Lyna passa ses mains sous l'eau et les nettoya avant de couper la carotte en tout petit morceau. Elle les jeta dans le saladier et les intégra à la pâte.

Chantonnant un air enjoué, elle forma des petites boules avec la pâte. Elle les plaça sur la plaque et les aplatit sans vergogne. Les petites boulettes formèrent des petits cookies bien appétissants, si on oublie les morceaux de carottes.

Le four était chaud depuis quelques minutes, elle enfourna les petits bonbons et mit un minuteur d'une vingtaine de minutes, comme indiqué sur la recette. La rousse trépignait d'impatiente, c'était la première fois qu'elle tentait de cuisiner autres choses que des mousses aux chocolats.      

Elle partit s'installer sur le canapé, attend avec impatiente que le minuteur sonne. Lyna s'amusa sur son téléphone, elle sursauta presque quand le minuteur se mit à hurler dans ses oreilles. Toute contente, elle sauta du canapé et éteignit le four.

Elle plongea ses mains dans les gants de cuisine et sortit les bonbons du four. Elle les plaça sur la table et les recouvrit d'une serviette le temps qu'ils refroidissent et puisse être consommés. Alors elle décida de profiter de la fin de mâtiner pour se reposer un petit peu.