Domaine de Namsen -

Le mercredi était un jour relativement chargé au domaine, il y avait en effet des cours au programme toute la matinée. C’était Murphy qui s’occupait de les encadrer tandis que son frère était de corvée des écuries. Ils s’étaient organisés comme cela depuis le début et cela leur convenait plutôt bien, ils inversaient les rôles le samedi. Le jeune homme aimait bien se retrouver seul aux écuries le matin surtout qu’il avait installé un système de sono lui permettant d’écouter sa musique en même temps qu’il travaillait. C’était beaucoup plus agréable et le temps passait ainsi plus vite, il venait à bout du dernier box sans même s’en rendre compte. Après un coup d’oeil au planning des chevaux, il décida de débuter avec l’étalon camarguais qui n’était pas prit pour les cours ce matin. Après sa semaine de vacances, il était temps de le remettre un peu plus au travail avec une séance de plat. Il alla alors le chercher dans son pré pour le préparer rapidement puis se mit aussitôt à cheval. Comme pour chacune de ses débuts de séance, il alla faire le tour du domaine au pas rênes longues pour rentra dans la grande carrière. Sa soeur occupait le manège avec ses élèves et il se retrouva donc en extérieur, heureusement pour lui le temps était plutôt clément du moins pour le moment. Il remonta alors sur ses rênes pour débuter le travail avec Mosquito. Après quelques flexions et extensions d’encolure, il se mit rapidement au trot pour mettre en route sa monture. Il était un peu flemmard sur les bords et il nécessitait donc un peu d’effort pour le mettre en avant et le rendre réactif aux jambes, c’était son principal défaut. Il lésinait souvent à la tâche et ignorait les demandes venant des jambes de son cavalier ce qui était assez compliqué pour travailler notamment sur le dressage. Nohan s’était donc équipé d’une paire d’éperons afin de rendre ses aides plus précises au cas où l’étalon ne répondrait pas. C’était toujours plus agréable de faire recours à ce genre d’aide artificielle plutôt que de passer la séance à se battre avec le cheval car celui-ci est froid à la jambe.

Pour mettre le poney en avant, son cavalier le fit donc trotter énergiquement en lui demandant très régulièrement des allongements. Pour cela, il utilisait ses jambes de manière alternée et discontinue pour lui faire comprendre ce qu’il attendait de lui. Dès qu’il sentait que Mosquito n’était pas réceptif et traînait des pieds, il utilisait ses éperons pour le rappeler à l’ordre. Il utilisait toujours ses aides de manière crescendo c’est-à-dire qu’il débutait par une simple pression légère des mollets. S’il n’avait aucune réponse, il insistait en augmentant ses pressions puis si toujours rien, il s’aidait alors des éperons. À chacune de ses demandes, il relâchait aussitôt la pression car il fallait laisser le temps au cheval de répondre. Cela ne servait à rien de garder constamment ses jambes au contact bien au contraire, cela rendait le cheval encore plus froid aux jambes. Il fallait mieux utiliser ses jambes de manière ponctuelle mais précise. Ainsi, Nohan fut obligé de le piquer avec ses éperons plusieurs fois car Mosquito ne répondait pas immédiatement à sa jambe flemmard comme il était. Il fit exactement la même chose au galop c’est-à-dire des allongements sur quelques mètres pour forcer le poney à se porter en avant. Avec lui, la détente devait être active et énergique sous peine de se retrouver avec un cheval mou toute la séance. Nohan commençait à bien le cerner et il savait donc comment s’y prendre avec lui à force de le monter et de le voir monté, il n’avait plus aucun secret pour lui.

Une fois le camarguais détendu aux trois allures, le jeune homme pouvait commencer un travail un peu plus poussé. Avec des rênes ajustées, il lui demanda alors de venir se poser sur le mors et de commencer à bouger latéralement. Pour cela, il s’aidait de sa jambe isolée et de son poids du corps pour lui demander des épaules en dedans. Il lui fit également rentrer et sortir ses hanches sur des cercles pour mobiliser son arrière-main. Mosquito avait beaucoup progressé depuis son arrivée au domaine lui qui ne savait rien à faire, il se débrouillait maintenant plutôt bien sur le plat et connaissait tous les rudimentaires du dressage. Il manquait encore de souplesse et de style mais c’était sur la bonne voie et il apprenait plutôt vite quand il avait un cavalier expérimenté sur le dos. Ils continuèrent alors ce travail sur deux pistes au pas puis enfin au trot. Ils enchainèrent des figures de manège telles que des cercles ou des diagonales en réalisant toujours un exercice : épaule en dedans, cession, hanche en dedans, allongement, arrêt... Nohan ne laissait pas le temps au poney de souffler afin de le garder concentré et réactif. Dès qu’il sentait qu’il sortait de sa bulle, il le rappelait alors à l’ordre à l’aide de ses éperons pour lui faire comprendre qu’il était au travail. Il s’installa ensuite sur une grande serpentine où il lui demanda de garder le pli du même côté tout le long alternant ainsi les boucles en étant incurvé et les boucles en étant contre-incurvé. Il complexifia ensuite ce travail en lui demandant de rentrer ou de sortir les hanches sur les boucles, c’était idéal pour le mobiliser tout en l’assouplissant. Il rajouta alors une autre étape qui consistait à s’arrêter à chaque fois qu’il passait sur la ligne du milieu donc à chaque changement de main. Pour réaliser cela, il préparait son arrêt assez en avance et n’oubliait pas de garder ses jambes au contact pour avoir un bel arrêt rassemblé. De part ses origines, Mosquito avait un très bon équilibre naturel et il était facile pour lui de réaliser des transitions rapprochées. Ainsi, il réalisa de très beaux arrêts presque instantané alors qu’il était au trot. Son cavalier n’oubliait pas de le féliciter d’une caresse dès qu’il réalisait bien un exercice.

Nohan décida ensuite de faire un travail au galop toujours en restant sur cette serpentine à trois boucles. Pour commencer, il lui demanda simplement des transitions au trot pour changer de pied à chaque fois qu’il changeait de main. Après plusieurs bons passages de la part du poney gris, il complexifia alors l’exercice en lui demandant non pas une transition au trot mais au pas. C’était déjà un peu plus compliqué car le cheval devait être parfaitement en équilibre et sur son arrière-main pour réaliser ceci. Les premières transitions furent un peu brouillons avec à chaque fois quelques foulées de trot mais ils parvinrent à réaliser de très jolies terre-à-terre. Le jeune homme changea encore l’exercice, toujours sur la serpentine, en lui demandant cette fois-ci de ne pas changer de pied et de rester au galop tout le long. Ainsi, il alternait les boucles au galop à juste et celles au galop à faux. C’était un très bon exercice pour avoir un cheval léger et équilibré puis cela faisait également travailler sa souplesse. Ce n’était pas un problème pour le camarguais qui était naturellement équilibré et qui galopait à faux avec grande facilité. Ils enchaînèrent plusieurs passages en changeant le pied sur lequel ils galopaient pour travailler les deux côtés. Enfin, Nohan repassa au trot et laissa glisser ses rênes pour que sa monture puisse s’étendre vers le bas et ainsi s’étirer le dos. Mosquito trottait d’un pas énergique contrairement au début de séance où il traînait les pieds, il était assez long à mettre au travail mais une fois qu’il y était, il était superbe. Après plusieurs minutes de trot en extensions d’encolure, Nohan repassa alors au pas et lâcha ses rênes pour féliciter sa monture content de la séance qu’il avait faite. Il devenait vraiment de plus en plus à l’aise sur le plat et les exercices devenaient beaucoup plus simples pour lui. Le jeune homme mit alors pied à terre et retourna aux écuries pour s’occuper de l’étalon et continuer le fil de sa journée.

Nohan observait d’un œil attentif le cavalier enchaîner le parcours de saut d’obstacle, il était le prochain à passer et il avait une certaine pression. En effet après sa performance sur le dressage et le cross, il s’était classé à la deuxième place provisoirement. S’il voulait conserver cette bonne place, il devait alors faire un sans faute sur le CSO aujourd’hui. Likington respirait calmement à l’entrée de la piste et attendait seulement de pouvoir s’élancer sur ce parcours. Il était tellement en forme qu’il ne semblait pas avoir couru un cross la vieille, il était vraiment impressionnant. Le cavalier se fit une dernière fois le parcours dans la tête puis entra sur la piste le temps que le participant avant lui finisse son parcours. Sentant que son étalon était plus que prêt à démarrer, il le fit simplement marcher autour des obstacles et lui donna une petite caresse rassurante en attendant le son de la cloche. Likington tressaillit à l’entente des applaudissements suite à la fin du parcours précédent, c’était maintenant à eux de jouer. Finalement, le speaker présenta le couple et leur donna le départ pour se lancer sur ce parcours du CCI 1*. D’un mouvement de tête, Nohan salua les jurys puis lança sa monture au galop. Il souffla un grand coup et dit une petite parole encourageant au bai brun avant de se diriger vers le premier obstacle.

Il s’agissait d’un simple vertical sans piège, Nohan l’aborda donc simplement avec tout de même pas mal de galop car le premier obstacle d’un parcours était toujours délicat. Cependant, l’étalon le franchit sans aucun soucis exagérant même son geste au-dessus pour ne pas frôler les barres. Dès la réception, le cavalier remit du galop et dessina bien sa courbe pour l’emmener vers le prochain qui était un oxer, rien de compliqué pour le moment. Il laissa glisser ses rênes entre ses doigts à l’abord afin que son cheval puisse s’étendre et réaliser ses trois foulées avant de s’envoler parfaitement au-dessus de l’obstacle. Le troisième obstacle était de nouveau un oxer et il arrivait rapidement, il était à seulement quelques foulées du précédent. Nohan se redressa donc rapidement pour bien dessiner sa ligne brisée afin d’aborder le suivant correctement. Pendant la reconnaissance, il avait calculé toutes les distances et se souvenait donc du nombre de foulées exactes à mettre dans les lignes. Il compta alors dans sa tête ses cinq foulées et sa monture arriva à la parfaite distance du troisième obstacle pour le franchir sans aucun incident. Nohan sentait que Likington répondait présent à chacune de ses demandes, il était concentré et avec lui et c’était un réel plaisir d’avoir un aussi bon partenaire. C’était leur tout premier concours et pourtant, Nohan avait l’impression de le connaître depuis très longtemps. Ce couple fonctionnait parfaitement bien et il était certain qu’ils s’étaient bien trouvés ces deux-là.

Après un virage assez serré, le brun arriva face à la première et unique combinaison du parcours : un double composé d’un vertical, une foulée et un oxer. Il travailla son galop dans la courbe afin de se présenter dans une bonne attitude de travail avec un cheval concentré. Ils rentrèrent parfaitement dans la ligne avec un bon saut sur le premier. Dès la réception, Nohan mit ses jambes pour encourager son cheval à réaliser une grande foulée afin de se rapprocher le plus possible de l’oxer. Likington l’écouta et augmenta son amplitude se retrouvant ainsi à une très bonne distance de l’obstacle et prenant son envol au bon moment pour ne toucher aucune barre. Ouf, la seule combinaison du parcours était passée sans incident c’était déjà un bon point mais le couple ne devait pas lâcher leur concentration. Ils avaient encore un bon nombre d’obstacles à franchir sans ne faire aucune faute pour conserver leur place. Nohan mit un peu de galop dans sa ligne courbe pour se présenter au cinquième obstacle. Il ne voulait pas avoir du temps dépassé et essayait donc de gagner du temps à chaque fois qu’il le pouvait. Seulement le suivant était un vertical donc à aborder avec une grande vigilance. Sentant que sa monture allait trop vite pour le franchir, il se redressa fortement et réalisa un demi-arrête afin de la reprendre. Likington l’écouta parfaitement et retrouva un galop moins soutenu pour franchir avec perfection le vertical sans commettre de faute. Le sixième obstacle était un spa, un profil d’obstacle donc assez large à aborder avec beaucoup de galop. Dans sa courbe, Nohan mit donc des jambes pour augmenter son amplitude et son impulsion ce que son cheval fit parfaitement. Il arriva face à l’obstacle et prit son appel d’assez loin, étant un peu impressionné par le profil. Cependant, il réalisa un gros saut au-dessus mais ne toucha aucune barre prenant le soin de bien plier ses membres lors du plané.

La courbe pour arriver au septième obstacle était assez serré, le cavalier s’assit donc dans sa selle pour retravailler son allure et aborder l’oxer de la bonne manière. Dès la sortie du virage, il n’avait qu’une foulée avant d’arriver à l’obstacle, il accompagna donc assez fort avec son assiette pour encourager Likington qui n’hésita pas une seule seconde à s’envoler au-dessus. De nouveau, il s’agissait d’une libre brisée pour arriver au huitième obstacle qui était un vertical. Comme il avait un plutôt bon galop, Nohan le laissa galoper et le redressa seulement quelques mètres avant l’obstacle. L’anglo-arabe prit son appel au bon moment et franchit le vertical sans commettre de faute. Le neuvième obstacle était encore un vertical mais il était placé en plein dans le virage, c’était donc assez délicat à aborder. Il redressa sa monture dans les derniers mètres avant l’obstacle se concentrant déjà sur le prochain obstacle. Erreur car il ne prit pas le temps d’aborder bien droit le vertical, il était déjà en train de tourner au-dessus et l’étalon commit donc une faute des postérieurs ce qui fit tomber lourdement la barre sur le sable. Nohan n’eut pas vraiment le temps de réagir car le dixième obstacle arrivait rapidement, il remit donc du galop pour franchir l’oxer sans toucher la barre cette fois-ci. Le onzième obstacle était de nouveau un vertical à cinq foulées du précédent, le cavalier prit donc le temps de retravailler son galop pour l’aborder à la bonne allure. L’anglo-arabe prit son appel au bon moment pour le franchir sans ne faire de touchette. Dès la réception, le couple tourna assez serré pour se diriger vers le douzième et dernier obstacle de ce parcours qui était un oxer. Le cavalier ne relâcha pas son attention même s’il s’agissait du dernier et le monta comme si c’était le premier. Son cheval fit un très beau saut signant la fin de ce parcours.

Alors que le public applaudissait la performance du couple, Nohan caressa son étalon pour le féliciter de ce beau parcours en jetant un coup d’œil au grand écran pour voir son résultat. Il s’en sortait seulement avec quatre petits points à cause de la barre sur le neuvième, il n’avait donc aucune seconde de dépassée et il était plutôt content. Mais étant légèrement perfectionniste sur les bords, le jeune homme pesta contre lui-même à cause de sa faute lui ayant coûté une barre. Il n’avait pas prit le temps de sauter le vertical et avait tourné au plané ce qui avait commis la faute des postérieurs. Il s’en voulait car c’était complètement de sa faute et cela l’énervait. Mais il était tout de même ravi du reste du parcours, Likington avait été incroyable sautant tous les obstacles avec une grande facilité malgré qu’il avait un cross entier dans les pattes de la veille. Le jeune homme resta à cheval tout en le faisant marcher près de la carrière pour observer le parcours du cavalier suivant qui était celui en première place provisoire. Finalement, la fin du concours arriva et le classement définitif sortit. Nohan et Likington montèrent fièrement sur la troisième place du podium pour leur tout premier CCI 1*. Ce n’était pas rien et le brun était aux anges, heureux de ce week-end de concours qui avait été formidable autant sur le point de vue sportif que social. Il avait passé quatre jours incroyables aux côtés de son meilleur ami et des cavaliers renouant avec l’ambiance des concours qui lui avait tant manqué. Ce qui était certain, c’est que cela sonna le début de la saison et que de longs week-end comme celui-ci l’attendaient.